En allant vers la banque
pour écorner un peu plus ce qui doit me permettre de profiter un peu
des saveurs de la vie, de mon tout petit et un peu honteux privilège,
en marchant dans l'air qui a oublié la grande rigueur, en savourant
le plaisir de laisser pendues doudoune, canadienne ou parka et de
retrouver une fine redingote, je rêvais du printemps qui s'annonçait
dans les sculptures de cartons devant les boutiques.
Et, comme ne rencontre
encore qu'ébauches de bourgeons et quelques fleurs transplantées de
serres, ai cueilli tous les symboles que j'ai trouvé sur mon chemin.
Mais, comme suis
paresseuse, n'ai pas commencé le tri des vêtures, avec la
gymnastique qu'il me faut faire pour avoir accès aux étoffes plus
légères et mettre en sommeil l'hiver, les repassages etc.., ces
moments où j'aimerais tant être magicienne.. Me suis plongée dans
le Monde Diplomatique, le journal de Filoche etc...
et pour nourrir Paumée ai
repris, après hésitation, parce que c'est son tour, ce qui est sans
doute, de toutes mes petites contributions aux cosaques des
frontières http://lescosaquesdesfrontieres.com,
celle dont je suis le plus loin d'être presque satisfaite.
Ce serait –
21 – trente six vues
Ce serait chercher dans le
catalogue de l'exposition (que j'avais fort aimée) le japonisme
qui s'est tenue en 1988, d'abord
au Grand Palais, puis au Musée d'Art occidental de Tokyo, une
reproduction de la très belle Sainte Victoire conservée au Japon,
et ne pas la trouver puisque les droits de reproduction n'avaient pas
dû être obtenus, mais feuilleter, me souvenir, et re-découvrir,
l'avais oublié, la série de planches des trente six vues
de la Tour Eiffel dessinées
entre 1888 et 1902 par Henri Rivière (collection particulière –
Meudon)
Ce
serait un clin d'oeil, hommage modeste, au moins par le nombre, aux
cent vues du mont Fuji, mais
sans la souplesse du trait d'Hokusaï.
Ce
serait aller au delà des japonaiseries dans lesquelles s'étaient
complus quelques créateurs à l'époque - Monet disait japonnerie
et en faisait le titre d'un
portrait assez charmant, juste assez charmant, qui n'était certes
pas la meilleure de ses oeuvres figurant dans ces salles.
Ce
serait cette découverte d'une représentation se passant des
traditionnelles règles de perspective. Ce serait la même survenue
joyeuse d'un nouveau regard, de cadrages apparemment libres, que chez
les peintres. Ce serait la même simplicité d'abord, le même
raffinement que dans la structure apparente des mobiliers de
Serrurier-Bovy, Rennie Makintosh ou Josef Hoffmann.
Ce
serait, en contrepoint des oeuvres importantes qui étaient exposées,
un élément de la petite musique de fond sur laquelle elles se
détachaient.
le
rude métal de la tour devenu bijou barbare
la
courbe du fleuve se jouant des lignes, l'île se cachant dans un
noeud
le
ciel jaune dans lequel flottent des nuages en forme de fleuve
le
petit bateau qui suit la poutre, nez vers la masse brune
la
netteté – endommagée par ma mauvaise photo – de cette grille
appliquée sur le paysage fluide, comme le jeu des claustras du Mucem
sur le port, la mer, qui fait la joie des photographes.
5 commentaires:
Ce serait savourer vos rêves colorés de printemps et avoir envie de sortir au soleil , merci !
Savoir mélanger (et disposer) les teintes et terminer par cette vue "japonaise" : la reprise s'imposait !
merci pour ce désaccord (moins nulle que le pensais)
Et Trente six ou cent une façons de regarder la vie
Merci pour cette belle logique
admirable tableau d'Henri Rivière que vous nous faites découvrir !!!
quel régal
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