Annonce pluie pour demain,
enfin mais... dans les deux soirées prévues dans des cours, il me
semblait que j'aurais préféré, peut être, que ce soit ce mardi,
or le ciel au dessus de ma cour, à l'heure des premiers pas, café
en main, rutile.
Au théâtre du Roi René
(suis retenue par petite méfiance idiote faute d'avoir testé la
clim) je suis, depuis le premier jour, attirée par deux pièces qui
passent en alternance à 11 heures, avec une préférence pour celle
des jours pairs, que j'ai loupée lors de son précédent passage en
2011... n'ai pu les joindre au téléphone et m'en suis allée, vers
dix heures.
Malheureusement - avec
raison je pense - la salle était complète... la jeune femme m'a
proposée de me mettre en ligne d'attente, j'ai préféré réserver
une place pour jeudi et profiter de la proximité des halles
pour remplir le sac de
secours qu'ai toujours dans ma besace... vais continuer à engraisser
(fière et agacée, j'ai dépassé les 38kgs)
retour dans la ville qui,
sauf pour les spectacles qui me tentent, semble vraiment avoir tourné
la page du festival, parcourue surtout par des touristes (familiaux)
venus humer l'ambiance, et où seuls quelques acharnés distribuent
encore leurs petits cartons, ou recollent des affiches.
Et pour me féliciter
d'avoir en gros rétabli mes finances et mon poids (même si les
forces sont encore un tantinet absentes) me suis offert le petit
cadeau dont j'avais envie, ne sais trop pourquoi, un oiseau un peu,
pas trop, kitch, dans une jolie petite boutique de décoration qui
s'est ouverte au coin de la rue Baroncelli…
Déjeuner, sieste, envie
de végéter... toujours pas touché au repassage, hésité entre
plusieurs spectacles, dont j'avais bien entendu grande envie, mais en
fait... pas tant que ça, me suis offert une bonne crise
d'aquabonisme..
et ne suis partie qu'au
crépuscule, un pas en avant, parce que j'avais envie de retrouver le
cloître des Carmes (sans pouvoir me revancher de mon abandon le soir
du Vivier des noms de Novarina), parce que danse, parce que
Afrique, parce que cela me manquait sérieusement cette année (dans
le souvenir de Niangouna, de DeLavallet Bidiefono, Faustin
Linyekula....), parce que quand même ma fille t'as pas honte ?.., un
pas en suspens, essayant d'effacer de ma mémoire des critiques
passablement mauvaises et surtout celle de Malte Schwind sur
l'Insensé http://insense-scenes.net/spip.php?article382 Et comme n'y arrivais pas, ruminais, petite chose indécise, parmi
les pas assurés se pressant vers un but : avoir oeil neuf, et puis,
bon, suis vieille ratatinée de beaucoup plus de cinquante ans, mais
j'ai l'illusion, peut-être, de penser que ne suis pas raciste, ayant
toujours trouvé cela absurde – oui mais pourtant : mon éternelle
curiosité n'aurait-elle pas, inconsciemment, en ce cas, en ce cas
seulement, un fond rancis de racisme, et même mon admiration
éventuelle ?... zut on n'en sort pas.. et en outre cela n'a rien
à faire là.
Tant et si bien que quand
suis arrivée sur le trottoir devant la file d'attente, elle avait
des proportions telles que j'ai bien cru que n'aurais pas Ma place au
premier rang à gauche sous ma gargouille (oubliant une fois encore
que suis une des rares adeptes du premier rang), et que ce fut longue
attente, avec un piapiatage détendu qui m'a mise de bonne humeur.
Il s'agissait en fait de
la femme, du sort de la femme au Sénégal et de la société de
consommation. C'est un spectacle de Fatou Cissé qui avait conquis le
public par la force de sa danse et sa dénonciation du sort des
femmes (aveu, je n'ai pas vu son solo). Cela s'appelle le bal du
Cercle et sur le programme du
site, sous quelques belles photos de Christophe Raynaud de Lage, dont
les deux que j'ai reprises, il est dit
Un ring, un podium, une
agora, une scène : le cercle décrit par Fatou Cissé est tout cela.
En son sein, chaque geste, chaque regard fait sens. Ce cercle est le
lieu du Tanebeer, une pratique ancestrale réservée aux femmes dans
la société sénégalaise. Autrefois organisé à l'occasion des
mariages ou en l'honneur de personnalités importantes, ce bal a lieu
dans la rue et dans les arrière-cours des quartiers populaires. Les
femmes y rivalisent d'excentricité, se livrant à des danses à
forte charge sexuelle entraînées par une formation de
percussionnistes – le sabar –, arborant parures, maquillage et
vêtements d'exception. Un
espace de réalisation pour les femmes Mais il est aussi
un moment de régulation sociale, de règlement de comptes où
rivalité et solidarité se confondent.
Et les
critiques que j'avais lues déploraient surtout, outre la longueur de
la partie essayage de tenues ahurissantes, en beau mélange de
couleurs claquantes, de tulle et de strass, point extrême de leur
recherche d'une affirmation de soi, telle que notre société de
consommation la permet – et effectivement cela dure un tantinet
trop, c'est d'ailleurs à ce moment, un peu avant la fin que j'ai du
replier mes jambes pour laisser sortir quelques exaspérés – quant
aux moments où le danseur et les danseuses, celles-ci perchées sur
de hauts talons (la très fine, superbe danseuse, que j'avais
tendance à suivre des yeux, l'une des trois vedettes avec les deux
chargées de prendre la parole pour apostropher le public,
s'apostropher, et l'on ne comprend pas tout d'autant que tout n'est
pas en français mais la gouaille est réjouissante, la très fine
donc se tordait les pieds avec une maestria admirable) quand donc ils
viennent vers nous avec la démarche hautaine et mécanique d'un
défilé de mode, l'ai senti comme un défi, un peu à nous, un peu à
leur vie ordinaire,.. je rembobine, les critiques donc déploraient
surtout que la revendication ne soit pas assez nette, le sens assez
évidemment affirmé, mais, dans le petit programme de salle Fatou
Cissé se défend de revendiquer, affirme qu'elle veut raconter une
histoire, histoire qui n'est d'ailleurs pas exactement celle du
Tanebeer qu'elle connaît mal, puisque c'est une coutume qui se
déroule surtout dans les quartiers et qu'elle est citadine, mais
histoire qui reprend, déstructuré, retravaillé, le sabar, cette
danse à bras et jambes très ouverts, en y mêlant des battles,
danses de club. Et ma foi, même si ce n'est pas un spectacle
parfaitement abouti (suis assez d'accord avec Malte Scwind, mais j'ai choisi d'en rester au plaisir de l'énergie, d'ailleurs très
organisée, de cette danse), j'ai aimé ce défi, entre elles, et vis
à vis des contraintes de la société et de la religion.
A part
ces quelques sorties et quelques huées, elles avaient conquis
l'assistance...
et
m'en suis revenue dans la ville qui reprend vie avec ces premières
heures de nuit.
7 commentaires:
On sent que l'on approche de la fin du festival (dans trois jours), mais un voyage en Afrique est toujours agréable en votre compagnie !
mais ne devrais pas lire les critiques dépités (le suis déjà facilement moi même) et les gens intelligents - en étais à ne plus avoir envie de lire, de musique, de théâtre, presque de respirer
tente de franchir migraine et de rebondir, quitte à être idiote si j'y trouve plaisir
Heureusement l'étal du marché poursuit son cours ...même la tête à l'envers
à vrai dire nettement moins de choix et plus de touristes que de clients (ce que j'ai bien aimé : servie rapidement)
n'aimerais lire que les critiques de spectacles aimés
ben c'est assez rare cette année, tant que je me retrouve en tentée de défendre Py (alors que me sentais un peu seule dans mes réserves, mais là il tourne à la tête de turc des médias)
oui parfois une lassitude (une envie aussi !) devant la parfaite maîtrise de discours qui écrasent les objets dont ils traitent et parfois encore une déception, écrivains plus brillants et plus diserts que leur production mais fête d'une forme d'intelligence, un plaisir à ne pas bouder
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