Matin, marchant dans les
rues entre la lumière éblouissante qui filtrait à travers les
branches et l'ombre des murs, des recoins qu'elle baigne de charme,
dans l'aigreur du petit vent frais de la renverse de l'été, j'étais
dans le remâchement - sans doute prolongement de mon écoute pas
tout à fait assez détachée de la radio à l'heure de l'entrée
lente dans le jour – de la perte d'illusion sur la très minime
prise que nous avons sur notre monde, maintenant que l'argent est
sorti de son rôle d'outil pour devenir, avec de moins en moins
d'hypocrisie, le maître de nos corps, opinions, visions de l'avenir,
non seulement dans ce qui nous est débité, mais dans la réalité
dès que nous voulons rendre réelles et durables toutes les idées
donnant priorité à l'humain. Dans l'effritement de ce principe
auquel je croyais qui veut qu'on ne puisse refuser de voter, au
risque d'abandonner les plus faibles, quitte à se salir les mains,
en tentant de choisir le moindre mal, sans se faire plaisir... à
faire semblant de croire que les hommes politiques, même ceux qui
sont sincères et intelligents, aient la moindre chance de sortir du
théâtre d'ombres travesti par les médias, de la trahison des mots
dénaturés, du jeu des majorités qui ont été propulsées vers les
scrutins, pour corriger si peu que ce soit l'élan qui nous entraîne.
(bien entendu une éventuelle abstention, au nom de la lucidité, et
la crainte que ce soit faute, n'a aucun effet réel, en dehors de mon
auto-appréciation)
Mais les sourires, mais
l'oiseau qui filait au dessus de la place, cap sur le rocher, mais
l’imbécillité de ceux qui portent visages graves, se croyant
seuls conscients, porteurs et interprètes de la misère humaine, les
asséneurs de vérités.
Et ne suis pas certaine
que ce soit par lâcheté que me suis repue du dessin, contre le
ciel, des branches fines d'un arbuste perché sur une ruine, de
l'éclat d'herbes lumineuses dans un bac, que j'ai souri à un
souvenir, que me suis replongée avec délice dans Boussole de
Mathias Enard, et ce passage à propos de la sonate opus 111 de
Beethoven, alternant avec l'évocation de Sohrawardi, de
Corbin, des échanges avec un ami poète à Téhéran etc..
Ce fameux troisième
mouvement est présent en creux.
Par son absence. Il est dans les cieux, dans le silence,
dans l'avenir. Puisqu'on l'attend, ce troisième mouvement, il brise
la dualité de l'affrontement des deux premières parties. Ce serait
un mouvement lent. Lent, si lent ou si rapide qu'il dure dans une
tension infinie...
7 commentaires:
La lumière fait sa partition sur les murs.
Bonne journée amie.
merci
à toi aussi
Michel Onfray ayant annoncé urbi et orbi qu'il ne voterait pas à la prochaine "Présidentielle" (une info capitale pour la marche du monde), il vaut mieux en effet s'attacher, pour l'instant, au vol d'un oiseau ou à une sonate de Beethoven...
et se moquer du sacré réflexe (fomentée suis) qui fait qu'on se sent lâche.. il y a des trucs qu'on ne peut soutenir même pour en éviter d'autres
Cet espace indéfini du " vide médian " dont parle souvent François Cheng
et juste un doux soleil dans une impasse
Merci, Aime ce moment de réflexion
Tu as raison, il ne reste plus grand crédit des hommes politiques, la musique elle ne trompe pas.
suis passée par hasard mais sans doute avec l'intuition que tu ne nous laisserais pas trop longtemps sans nouvelles, je me réjouis de te lire à nouveau; gratitude Anne-Marie EMERY
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