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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

jeudi, mai 31, 2018

Le ciel pleure, mes tentatives coulent, reste René Char

Ondée matinale qui s'installe, semble inéluctable et éternelle,... endosse ciré, pose un foulard de vieille cotonnade ocre doux et rose au dessus des sourcils, le noue sur la nuque, le remonte pour dégager le front, enfile mes croquenots et m'en vais, puisque le mercredi elle ouvre le matin, vers la médiathèque installée dans la livrée Ceccano
avec une brève tentation (mais les ouvriers n'auraient pas apprécié) de rester devant le chantier à l'angle, à regarder dans la presque accalmie du ciel le ciment couler dans une machine qui le filtre, le bonhomme qui taloche les murs, cette humidité solide dans ce monde pleurant d'humidité...
Et j'ai aimé ce que j'ai vu mais, comme, après avoir bossé sur l'appareil hier, j'avais contactée un vague désir de mise au point personnelle, comme l'ai oublié en court de route, comme surtout, à l'étage je me suis accrochée à mon plaisir malgré la gêne d'un bibliothécaire (ou je ne sais quel autre membre de l'équipe) comme ce que voulais garder était tout petit ou dans des vitrines avec reflet, ai quasiment jeté toutes mes photos... Vais bien entendu, après une journée en bonne partie vouée à une errance dans livres, sites, consacrés à René Char, être tout de même beaucoup trop longue.
Galerie d'entrée donnant sur le jardin : de grands tirages de photos plus ou moins connues.. dont j'ai sauvé deux captures
et, puis entrer, dans le hall, monter le grand escalier
passer à côté d'un vestige d'une exposition antérieure (2016) «terres écrites» : un panneau de terre cuite d'Armand Taetossian - J'étale des pages d'argile, comme des pages blanches, sur lesquelles j'inscris mes perceptions sensitives, mes pensées ; j'y transcris enfoui au plus profond de mon être donc mes racines, les joies et les douleurs, les espérances et les craintes qui m'ont été léguées comme des données de destinées.
Un pas, comme un salut, dans la grande salle de lecture du premier étage, tenter une photo (si timidement qu'outrageusement floue et donc détruite) des restes de fresques et des poutres peintes, 
et grimper l'escalier de la tour jusqu'à une salle en longueur où se tient l'exposition, et sur laquelle ouvrent des salles de conférence, dont l'une libère mon trop gentil et très peu désiré compagnon de visite. (en fait pendant toute la durée de l'exposition se sont succédé, dans l'un ou l'autre lieu, et parfois je crois à la maison de la poésie, des lectures, conférences etc... que j'ai loupées et je pense que la prochaine était en préparation dans ladite salle)
Sur le mur donnant sur l'extérieur, entre les fenêtres, l'hommage, ou quel que soit le nom qu'on voudra lui donner, bien plus intéressant que m'y attendais, mariant le travail de Jo'Graffies (photographe) et Polo 51.67 (pochoiriste)
et des vitrines détaillant (pour le très grand plaisir de celle qui a toujours aimé observer – tout en sachant par une très ancienne et petite expérience – combien cela peut être une gêne pour l'intéressé - au travail intelligent des mains d'artisans), le travail de Gérard papetier (à partir de chiffons), Benjamin tourneur sur bois et surtout Natale tailleur de pierre (allusion aux tailleurs de pierre de Thouzon... bon je ne les cherche pas chez Char, faut limiter tout de même)
Tournant au bout de la salle, après cet étrange objet, en revenant vers l'escalier et la sortie, sous de grands tirages d'illustrations 
comme les empreintes de Pierre-André Benoit pour «les dentelles de Montmirail»
La réalité ne peut être franchie que soulevée.
Aux époques de détresse et d'improvisation, quelques-uns ne sont tués que pour une nuit et les autres pour l'éternité : un chant d'alouette dans les entrailles.
ou des bois de Giacometti, des lithos Picasso (en rappel de l'exposition chez Angladon)
s'alignent des vitrines exposant, au milieu des galets peints pour être offerts à Char (dans les deux premières) que j'ai massacrés, les tout petits et précieux livres réalisés par Pierre-André Benoit dit PAB que j'ai massacré encore davantage...
tout comme les galets peints par René Char
(alors j'ai piqué cette photo sur un billet annonçant un atelier pour enfants qui eut lieu autour des galets à Angladon https://angladon.com/atelier/ateliers-printemps-inspirations-poetiques/
J'avais découvert, dans l'après-midi – pour un très long plongeon - en cherchant des renseignements sur les galets peints pour René Char (pour identifier ma petite photo, et j'en ai tiré qu'ils étaient plusieurs à lui en offrir) un mémoire (ou je ne sais quel est le statut de ce texte) de Céline Desclaux René Char lorsque peinture rime avec poésie https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01136091/document où bien sûr il s'agit de bien plus que des seuls galets, mais de l'ensemble du compagnonnage entre Char et les artistes (juste l'objet des deux expositions) et puis...
René Char a donc œuvré sur des pierres dans La nuit talismanique (note Brigetoun : 1972, après la perte de la maison des Névons et la mort de Staël). Ramassées le long des chemins, ou en bord de rivière, elles font partie de sa vie quotidienne. Il affectionne tout particulièrement les galets pour leurs formes rondes qui laissent supposer un visage perdu... Nés de l’épreuve du courant, lorsque le poète les travaille, ils sont encore pleins de l’écume du libre torrent qui les a roulés. Tout comme le roseau, la comparaison se fait avec René Char, sauf que pour lui, c’est le temps et non le courant qui l’a battu.
Ces pierres, le poète les peint, en fait souvent des visages car, « seule des autres pierres, la pierre du torrent a le contour rêveur du visage enfin rendu.» Mais il peut tout aussi bien y noter simplement un vers, une parole, et ses dernières productions semblent toutes être de cet ordre...
Emergeant de cette lecture-survol-arrêts-attentifs-sauts-en avant, et fouinant à la recherche de l'importance pour Char du dessin dans une période où je ne pouvais dormir,... vers 1918 (Char à France Huser) et, plus tard :

un temps où la nuit qui m'avait tant servi se retira de moi, me laissant les sables et l'insomnie (1955-1958). Je sus alors que la nuit était eau, qu'elle seule abreuve et irrigue, et pour m'assurer contre ce passage difficile, je rassemblai mes précaires outils : encre de Chine de couleur, bâtons de cire, pointes rougies au feu, écorces de bouleau, plumes, couteaux, crayons, clous, poinçons, pinceaux, cartons, bois, buvards humides. J'étais immobilisé dans ma chambre sous une électricité haïssable. Servante ou maîtresse, proche du souffle et de la main, rasante et meurtrie, cette flamme dont j'avais besoin, une bougie me la prêta, mobile comme le regard. L'eau nocturne se déversa dans le cercle verdoyant de la jeune clarté, me faisant nuit moi-même... Il est des orages voûtés et bredouillant au-dessus de notre tête. Ce sont de vieux dieux devenus mendiants... 

4 commentaires:

Dominique Hasselmann a dit…

IL devait y avoir quelque part du Ponge chez Char (une sorte de Résistance commune)...

Brigetoun a dit…

n'y avais jamais pensé… tout de même me semble que s'il était sans doute en quête du mot juste c'était moins primordial que pour Ponge (mais ce n'est qu'impression d'ignorante)

lanlanhue a dit…

magnifiques matières détails !

Brigetoun a dit…

mais tant de photos loupées et détruites (mini livres et galets)