commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

mercredi, juillet 11, 2018

Avignon jour 5 – poétiquement ou tragiquement notre monde tel qu'on l'imagine

A l'heure du petit déjeuner (je déteste l'onctuosité fabriquée de la marmelade de citron, mais faut assumer ses choix) le souvenir du titre d'un spectacle qui passait en début de matinée au Théâtre de l'Oulle, Réfugiée poétique, et l'idée que je ne devrais pas continuer à négliger ce lieu qui est devenu permanent, et m'a souvent tentée cet hiver.
J'interroge internet, je trouve une présentation de Claire Ducreux
Je trouve cette vidéo
et je traverse la place. 
Ma foi, les gens du théâtre sont agréables, la clim aussi, ma foi c'est un très joli spectacle, sans mièvrerie et le public était conquis, aimablement et gentiment conquis (une certaine admiration pour les trois membres du public – à vrai dire pour la femme je ne suis pas très certaine que c'en était vraiment une – l'homme surtout et son talent courtois et bonhomme - qu'elle fait participer pour que l'intérêt ne faiblisse pas pendant une heure sur sa trame assez ténue)
retour par la petite rue longeant les remparts ,
et comme en fait la petite fatigue accumulée était toujours là, déjeuner rapide et sieste prolongée résolument pendant une heure et demi avant de repartir, 
par la ville parce que je devais passer chez le pharmacien au lieu de longer tout doux tout doux les remparts,
dépassant la zone et de l'animation avec la fresque maintenant presque détruite de mon cher vieux bonhomme assis, continuant dans le vide de la fin de la rue Carreterie, retrouvant le plus beau, à mon avis, platane – l'un des deux du tabac Saint Lazare, prenant petit plaisir des yeux avec l'eau, 
touchant mon but la découverte de ce nouveau lieu, la scierie et de Pur présent, le spectacle réunissant trois tragédies de notre temps que Py a écrit après avoir monté la trilogie d'Eschyle (à la Chartreuse, grand et bon souvenir)
avec un mélange de lassitude parce que pas tant envie de remettre nez dans ce que devient notre monde, de loyauté parce que j'apprécie de plus en plus le "bonhomme" Olivier Py, d'attente parce que j'aime souvent même un peu hérissée d'agacements ce qu'il fait, lassitude de nouveau parce que sauf quand un texte ancien le tient en lisière (plus ou moins) j'ai toujours envie d'avoir des ciseaux, ou presque toujours... mais il est vrai que cette fois il a décidé de faire court et que la durée annoncée pour l'ensemble est de trois heures dix minutes... (bon on ne se refait pas, ça a un peu débordé, mais n'y avait guère de longueur...)
sur le site du festival : Composé de trois courtes pièces, Pur présent se souvient des tragédies d'Eschyle qu'Olivier Py traduit et monte depuis dix ans. Cette intimité avec le poète antique a ouvert une brèche dans son esthétique comparable à celle issue de son travail en prison. Pour le dramaturge et directeur du Festival d'Avignon, les pièces nées de ces compagnonnages, comme ici L'Inaccessible, L'Inaccompli et L'Irrévocable, sont l'occasion de dépouiller son geste théâtral et d'aiguiser sa langue. Pour « cette tragédie de notre pur présent » dans lequel « le moindre geste nous rend coupables », Olivier Py a voulu la fulgurance, la concision grâce à quelques personnages puissants et situations extrêmes : un détenu et un aumônier, un banquier et son fils, un homme masqué et la foule, une prison qui brûle, un coup de feu, une révolution masquée. Tous sont pris dans des joutes oratoires qui s'entremêlent et se répondent. Tous s'emparent d'une question pour laquelle morale et loi sont impuissantes. 
« Comment vivre dignement ? »
un texte tout de même parfois un peu difficile d'entrée, la première partie alliant un peu de philosophie noyée dans la surprise du texte poétique, très écrit, et du réalisme même distancié - un texte (résumé de notre petit échange avec ma voisine) à la Genet avec accents hugoliens – un peu noyé aussi pour moi par le plaisir de saisir au vol dans la voix du prisonnier-petit-déliquant-de-banlieu qui joue avec flamme le choeur, Dali Benssalah un, deux, trois alexandrins
Il ne fait rien, il parle, il écoute et c'est tout
Mauvais pour les affaires, la présence d'un saint !
et ma tendance à me polariser sur la métrique avec délice et sourires
Les rats regardent les hommes et les hommes regardent les rats
Les lois du monde ici n'ont aucune valeur
Mais la loi fondamentale éclaboussée d'étoiles
C'est l'homme qui la sait au plus profond du coeur
même si l'attention tend à se fixer peu à peu sur le sens de la disputatio (enfin une disputatio un peu spéciale) entre le Roi de la prison (auquel Nazim Boudjenah donne l'autorité de son jeu capable de dépasser le type, comme il le fera du banquier dans la seconde partie) où chacun tort un peu les mots, les idées, parce que ce qui sous-tend, à mon avis, le débat, c'est leur attirance mutuelle.
Un entracte dans la lumière adoucie
la seconde partie (plus facile d'accès, l'habitude jouant, et puis le chemin emprunté semblant si familier) l'argent entre un banquier, qui refuse d'être ébranlé par la mort de son fils (l'aumônier de la première pièce), qui expose avec un cynisme qui à mon avis lui fermerait l'accès au pouvoir désiré (lui faudrait un outil comme celui qui nous gouverne) son goût de l'argent, le fonctionnement de l'économie et ce qu'il attend, faussement navré, de la crypto-monnaie qu'il a fondée, pour aider, et qui est devenu un formidable outil de spéculation... et son second fils, disons en gros gauchiste, venu pour le tuer et qui peu à peu désespère – le secrétaire qui joue le choeur, se révoltant
et se couvrant le visage d'un masque noir
Le Banquier
C'est moi, moi et moi seul qui ait repeint en noir
Le ciel qui autrefois protégeait les destins
Pourquoi j'ai fait cela ? C'est difficile à dire...
A cause de la beauté que je ne trouvais pas
nouvel entracte – bu un café presque passable servi par deux garçons hilares avec une joue marquée du drapeau français et une joue marquée du drapeau belge (ai entendu des clameurs en arrivant, je pense que les pauvres belges ont perdu)
et la troisième partie le masque la plus brève, marquée pourtant de la mort (cardiaque) du banquier et de l'acceptation par le secrétaire toujours révolté et masqué de noir de suivre un «mystique» qui pense que dans ce monde livré à la finance la seule solution qui ne soit pas minée est la paix entre compagnons, en petits groupes, hors des biens de ce monde. J'oubliais, et pourtant j'étais à côté de lui, l'accompagnement discret et efficace d'un pianiste. Comme d'habitude les photos du spectacle sont de Christophe Raynaud de Lage
Saluts... une envie de creuser mon impression (ma voisine aussi, plutôt plus réservée à la fin que moi, alors que c'était le contraire au début) ce qui, de toute façon n'est pas un spectacle parfaitement anodin (sans doute moins important qu'il le voudrait)
et le plaisir immense de rentrer, seule, entre remparts et Rhône, à la poursuite du soleil qui descendait plus vite que je n'avançais vers lui.


11 commentaires:

casabotha a dit…

L'envie file bleue au ciel sur les gambettes au détour

Dominique Hasselmann a dit…

Beaux cieux du retour...

J'avais bi"n aimé la présentation écrite faite par Oiivier Py du programme du festival.

Il est rare de voir et de lire l'engagement politique d'un artiste, à l'heure où la ministre de la Culture s'aperçoit - un an après sa nomination ! - que de possibles conflits d'intérêt, dans le livre et dans le cinéma, viennent la gêner aux entournures dans la mission pour laquelle elle a été choisie par le roi et le chef de sa grande écurie.

casabotha a dit…

Je file au désert pendant quelques jours, foncez encore, Carcasse vous présentera l'addition APRÈS

Brigetoun a dit…

Dominique, c'était encore plus beau que ça, et avec le silence et les reflets sur le Rhône, même si cette année y a pas tant de monde que ça c'était une pause merveilleuse avant le carrousel de voitures klaxonnant qui tournait autour de l'antre à mon retour (même si ça n'a pas duré)
Py est de mieux en mieux… il a gagné en calme et profondeur 'il attribue ça à son travail en prison) et la première pi!ce relue tranquillement = ça se tient et souvent fort beau

Caroline a dit…

Cette vue sur le Rhône est celle que nous avons de notre nouveau "chez nous".
Bon courage pour la suite, nous abandonnons Avignon épuisés.

Brigetoun a dit…

là je me reconstitue et prépare, parce que c'est Gosselin et la Fabrica et que j'en attends vraiment peut être trop on verra, mais un rien épuisée… pense que vais faire sauter Aubanel demain et en rester à Iphigénie la nuit
Je vous envie votre vie (e savais déjà)

Arlette A a dit…

Cela n'aurait plu vraiment ton retour est en contre point parfait ..moment de grâce offert Merci
Pense pas que ce soit calcul pour Nyssen elle s'est jetée dans la fosse aux lions désolant de naïveté même moi y avais pensé !!!!

Claudine a dit…

bon courage, on vous suivrait partout

Nicolas "Moutard Abeille" a dit…


9 juillet. Lieu que je ne connaissais pas : La Scierie. C'est calme et c'est bien. Passer deux jours ( seulement) au festival sans aller voir un spectacle de Py ce n'était pour moi pas envisageable. Py me parle depuis plus de 20 ans. A un des entractes je me suis régalé d'une salade Quinoa et poulet....ce n'est pas négligeable. C'est vrai, parfois Olivier Py est agaçant. Mais il vaut mieux agacer qu'ennuyer. Olivier PY est un grand dramaturge et metteur en scène. Je le trouve bien plus à l'aise dans ces rôles là que dans celui de programmateur ou de directeur de théâtre. Je vous embrasse Brigite

Nicolas Mouton Bareil a dit…

Brigitte j'ai écorché votre prénom ! Pardon!

Brigetoun a dit…

aucune importance et d'accord sur Olivier Py, si ce n'est tout de même qu'il gâche souvent ses qualité 'pas le cas cette fois - et me suis régalée à le lire cette nuit - par un peu trop d'enthousiasme et de longueur