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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

samedi, mai 30, 2020

Halles et atelier d'écriture

N'avais envie d'activité que physique (et à mon échelle) et n'avais plus qu'une petite pomme de terre de Camargue dans mon couffin. M'en suis allée, regardant le ciel blanc/bleu douteux (on annonçait un risque d'orage, le ciel fut bleu ardent à midi et s'entêta à le rester... jusqu'à la fin de l'après-midi et un coup de tonnerre)... saluant les divers travaux – réfection d'un restaurant de ma place, renouvellement des plantations – de la ville qui se refait une beauté vivante
et dans les travées presque désertes, confortablement, agréablement, sagement, ai rempli en partie mon chariot (recommence, et ne sais pour combien de temps, mon défaut de lien avec la banque... ce qui fait qu'en général mon soutien aux différentes activités revenues ne pourra être que de sympathie... et en fait n'avais guère de besoins)...
ce qui a suffi à satisfaire mes velléités d'effort ; ai laissé couler le jour en compagnie de France Culture (entre autres le témoignage d'un jeune chinois parisien coincé à Wuhuan où il rendait visite à ses parents https://www.franceculture.fr/emissions/les-pieds-sur-terre/wuhan-confidentiel-12 et https://www.franceculture.fr/emissions/les-pieds-sur-terre/wuhan-confidentiel-22
et je recopie ma contribution au #9 de l'atelier «personnage» de François Bon http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article3826 ou https://youtu.be/WSaHQGuKUdM
Dans le jardin
Ils sont là, quatre adultes, plantés sur l'escalier de la terrasse devant la grande maison, avec ces passés dénoués par le temps ou déchirés, et ce qu'ils ont en commun c'est leurs regards sur les deux enfants, le fils et puis cette petite sœur, Julie, qui n'est sienne qu'avec éclipses, l'ainé faisant semblant d'hésiter, elle le suivant avec attention, roulant sur les petites jambes potelées qui sortent de la jolie robe à smocks – elle s'est pavanée avec délice ce matin devant son père, celui qui est un peu en retrait là, en visite dans ce jardin, quand sa mère a tapoté le dernier petit bouton de fausse nacre dans son dos – sa robe de fête qui dépasse de sa parka puisque oui le printemps pique les joues et les mollets de sa fraîcheur, et elle a des petits rires de triomphe quand elle se précipite pour écarter les feuilles au dessus desquelles le garçon a laissé flotter sa main, et découvre, dans un petit nid de papier posé sur la grasse terre brune des minuscules œufs de sucre rose, vert ou blancs ou des petits poissons d'un brun chaud.
Et les deux femmes qui se sont embrassées tout à l'heure quand le couple est arrivé puisque c'est le début de la semaine de la mère et que leur bonne entente avec lui, le père, est si évidente, bien entendu, que la cérémonie de la chasse aux œufs doit avoir lieu ici – ils n'ont pas de jardin – avant qu'ils repartent tous les quatre, eux et les enfants, pour le déjeuner, le gigot rituel, chez le notaire, le grand-père de la petiote, qui a autorisé cette légère dérogation, les deux femmes entre deux cris d'encouragement, se sont rapprochées et revivent, en petites phrases qui volent de l'une à l'autre comme un pingpong presque sans erreur, les rires cascadant de celui qui a maintenant fini de jouer le grand frère protecteur et va chercher, là où il sait qu'ils se cachent, les deux gros œufs, la poule, le poisson, choisit les plus gros, ramène à sa sœur les deux plus petits et plus clairs – pas de chocolat au lait pour lui –, et trouve visiblement que cela a assez duré, lui qui, dans les bras de son père accueillait alors les bonbons colorés avec la grâce attendue, et elle la mère rappelle la terreur qui lui a fait se cacher le visage contre le torse paternel quand sa toute nouvelle tante – alors tu t'installe ? si contente que tu fasses revivre notre petite maison – lui a présenté un énorme lapin noir – oui je ne réalisais pas, tu sais les enfants moi à cette époque – alors que maintenant ? – oh maintenant j'ai des neveux.
Les deux hommes eux sont silencieux, détendus, l'un, en retrait toujours, avec son sourire plaqué comme un insigne, attend qu'il soit temps de remercier, de partir, pendant que lui, le père s'est absenté, il est l'ainé, et son petit frère, en courant avec lui d'une touffe, d'un rosier à l'autre, lui demande s'il croit vraiment que les cloches que l'on ne voit ni entend jamais sont passées au dessus de leur jardin et comment elles font pour viser aussi bien sans déranger les feuilles et les premières fleurs, et il ne sait pas répondre, d'ailleurs il s'en moque, comme du sucre et du chocolat – ne pas le montrer pour ne pas chagriner les parents – ce qu'il aime ce sont les fleurs du pommier, et puis la cabane qu'il a commencé à construire dans la haie et qu'il retrouvera dans l'après-midi quand son père dormira presque devant la télévision.

6 commentaires:

Dominique Hasselmann a dit…

Les clochers d'Avignon sont des pièces de théâtre en réduction... ;-)

Brigetoun a dit…

sont un peu n'importe quoi parfois (celui-ci domaine des commerces qui ne durent pas)

Godart a dit…

Et puis, ces personnages posés sur la pelouse du jardin. Comme un voile entourant les adultes, seuls les deux enfants apparaissent nettement avec leur légèreté et déjà un soupçon de retenue.

Brigetoun a dit…

merci pour votre lecture Godart (en fait c'était le jour des cloches et ça remplaçait les enfants que connus autrefois et leur descendance actuelle hors de portée)

Claudine a dit…

quelle tendresse versée sur ces personnages...

Brigetoun a dit…

toujours gentille, Claudine