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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

dimanche, février 04, 2024

Halles et montagnes

 


Mécontente de moi et de mes trahisons de ce que je m’étais fixée, m’en suis allée dans ce que ne méritais pas (il n’y a pas de justice)



Bonheur lumineux

du bleu tendre de ce ciel

et de l’air calme

L’affairement souriant

La saison sur les étals



Et pour continuer à ne pas mériter ai vécu le reste du jour tranquillement entre l’écoute de cours donnés l’année dernière par Antoine Lilti au Collège de France sur « Tahiti et l’Europe des lumières » et la recherche chez Giono de montagnes en écho à Ramuz et à sa « Grande peur dans la Montagne »

avec, en des montagnes un peu moins hautes, un peu plus sud et moins tragiques (au moins dans ce passage)

« Et les crevasses dégorgèrent un flot d’eau bleue, extrêmement bleue, qui se déroula nonchalamment dans le plis des glaces. Il y eut une détonation sourde et longue s’allongeant lentement en bas dans le vallon d’Ebron. L’eau disparut dans les crevasses. Il n’en resta que des flaques très bleues, de plus en plus bleues, pendant que le glacier redevenait blanc, brillant, très vite, comme s’il était saigné par en bas de tout ce sang bleuâtre. Les crevasses sonnèrent d’un gros bruit vide sous des décrochements de glace. Puis y eut le silence et, comme la lune éclairait en plein, la grande immobilité de tout. Mais le silence était fait d’un vaste battement d’ailes répandu partout et d’un grondement continu sans arrêt, à la même intensité… » (Batailles dans la montagne  - 1937)

Et moins lyrique, avec l’écriture plus sèche de la fin que je préfère, montagnes plus basses et encore plus sud, les béliers et les chèvres remplaçant les vaches de Ramuz

« Les béliers avaient pris un pas lent et long ; le balancement paresseux de leurs cloches battait des tambours voilés ; toute la troupe emboîtait le pas en cadence dans le velours du matin. Il faisait frisquet. Le soleil ne se risquait pas jusqu’au fond de la vallée ; de temps en temps il envoyait un rayon qui éclatait tout de suite en poussière avant de toucher terre et il placardait sur les parois de la montagne les prés acides ou le mordoré des foins coupés. A mesure que l’heure passait, la lumière écartait davantage les branches de son éventail ; des décors s’effaçaient ; d’autres se dressaient : un an de forêt en écailles noires, des rochers ruinés qui échangeaient quelques gros oiseaux la couronne grenat d’un village de bois au sommet de vertigineuses prairies, la chapelle de Saint-Basile (dit Louiset) avec son clocher en fer de lance, en équilibre dans de fragiles éboulis d’argent, une étroite chute d’eau… » (L’iris de Suse - 1970)

J’espère que la longueur de chaque fragment de mon pillage n’est pas trop hors la loi… mais j’aggrave avec un copié-collé du début d « Village dans la montagne » de Ramuz que je viens de télécharger sur la bibliothèque numérique romande 

« Comme le soleil donne fort, une première tache brune vient d’apparaître, tout à coup. Et d’en haut la chaleur descend et agit avec sa belle flamme claire, mais d’en bas, de dessous la neige, il semble que la terre elle aussi s’aide, étant impatiente après son long sommeil d’hiver. Cependant de tous les côtés, qu’on regarde vers en haut, qu’on se tourne vers en bas, on ne voit rien que du blanc, tout est recouvert : dessus un ciel tout bleu, posé sur les arêtes, comme le toit sur la muraille. Et tout est bleu et blanc, il n’y a qu’ici cette tache brune qui sort, puis qui s’élargit peu à peu, et au bord il se forme une mince croûte de glace où roulent une à une comme des perles d’eau.

On s’étonne de cette vieille herbe de l’automne qui se montre ainsi, de nouveau, ayant été cinq mois ensevelie, toute rase, de couleur sale, pareille à un tapis usé. Pourtant déjà, dans les petites racines cachées, on sent comme un peu de vie qui travaille et en elles aussi une impatience, à cause du soleil qui vient ; et que s’il dure un peu, ce soleil, elles vont bouger et s’encourager à une pousse verte, donnant le bon exemple. Car déjà, à côté de la première plaque, une deuxième paraît, et ce coin de pré est tout tacheté de noir et de blanc. »




6 commentaires:

arlette a dit…

Beaux extraits..ah!!! L'iris de suse

Brigetoun a dit…

mon préféré je crois (avec Noë)

Dominique Hasselmann a dit…

Compétition en montagne (on dit qu'il y a de moins en moins de neige)… ;-)

Emma Corde a dit…

Merci pour cette découverte (l'Iris de Suze) et pour ces prés tachetés de printemps qui ressemblent aux animaux qu'ils portent sans effort sur leur dos. Contente de te voir t'en aller (méritante ou pas et de quoi d'ailleurs) dans le velours du matin.

Brigetoun a dit…

Dominique ah ce réchauffement !

Brigetoun a dit…

Emma un des derniers lvres et ne sais pourquoi l'aime beaucoup