Comme hier, comme de plus en plus souvent ces jours ci, le ciel était uniformément gris, se retenant de crever, au dessus de la cour pendant que vaquais et tentais de terminer le #13 de l’atelier 2024/2025 de François Bon, que j’ai mis en ligne, pas fort contente de moi tant pis, ce soir, au dessus des rues quand suis sortie dans l'après-midi…
et comme hier avant de s’endormir le ciel m’a fait un petit coucou pour mon retour.
Cheminant à pas presque aisés mais sans grand intérêt pour ce que voyais sur mon trajet dont je ressentais plus intensément que d’habitude l’extrême familiarité, et refusant de penser, pour autant que cela soit possible, j’ai décidé de rechercher des images en relation avec ma contribution (publiée mercredi) à la proposition #2 de l’atelier « Boost » du tiers livre qui portait en gros sur l’ouverture et le franchissement de portes … en évitant les trop belles ou les trop baguées et abîmées… Bon mes ôte ici mais en fait le texte auquel vais avoir recours est celui de la proposition #1 et ne concerne en aucun cas les portes ou seuils.
Terre ou terres
S1
la terre et l’arbre ou les plantes modestes qui partent coloniser les corniches, les ressauts du rocher, la terre que l’arbre semble créer pour y ancrer les graines que le vent a plaqué sur cette minuscule accroche ;
la terre que les plantes retiennent dans sa plongée dans le fleuve ;
les tapis de plantes qui nagent au dessus de la terre collée au fond du fleuve, juste frisée par le courant ;
la terre cailloutée du terre plein que le vent emporte et fait courir sur elle-même, sur ses couches durcies et qui ne porte d’herbe qu’à l’abri des blocs de pierre disposés comme sièges ;
la terre assoiffée qui ouvre ses sillons comme une bouche pour se nourrir de vie ;
la terre amorphe dont un coup de pelle découvre le grouillement de vies ;
la machine qui descend son bras rouge dans la terre, qui l’éventre pour annoncer les fondations ;
S2
cheminement tracé vers le sens dans le mélange de légère terre poussiéreuse semée d'aiguilles de pin ;
après l'averse la terre luisante sur laquelle glisse l'avancée indécise qui perd son chemin ;
la boue où s'engluent les pas et les mots ;
travailler le langage comme on travaille la terre, creuser pour qu’advienne nourriture ;
le brun rougeâtre de la terre de Sienne, l’ocre rouge devenu terre sur les chemins de Roussillon ;
la terre noire qui pétrit les écorces, le bois pétrifié, les champignons, l’humus pour en faire deux mots qui roulent rudement et emplissent ;
la terre en mer ce mot de l’autre vie ;
S3
marcher sur la terre sèche, la terre morte, en portant des bannières et en l’arrosant d’encens ;
se pencher, prendre dans le bac lourde brassée de terre, la porter courbée, la poser, l’humecter, la taper longuement avec un bâton et pétrir l’argile ;
les doigts qui s’allongent dans la terre pour la façonner la paume qui s’applique pour lisser et renforcer, le contact de l’essentiel, la vie qui s’échange ;
la banalité de la terre, la sensualité de la terre ;
creuser la terre et saluer les vers ;
trancher la pente de terre et retenir l’effondrement avec des pierre sèches, de terrasse en restanque ;
appuyer sur les bras de l’araire pour labourer l’étroite terrasse ;
S4
atterrir, atterrage, terrain, terrasser, terrassement , l’humus, le sable, l’argile, le loess, le terreau,
4 commentaires:
« travailler le langage comme on travaille la terre », c’est la meilleure des solutions :-)))
fatiguer le langage et l'écrivain.e comme on fatigue la terre
Des terres riches chez Brigetoun (sourire)²
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"Terre" nous la nommons ainsi
tout comme si
notre nom à nous était "Peau"
merci !
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