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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

dimanche, juillet 06, 2008

L’Avignon de paumée - rhume - les animaux dans la grande chapelle - le pape caché dans l’enfer
Très long, pour moi, sans trop de soucis d’ennuyer de très hypothétiques passants.
Petit matin ciel bleu, ressorti la badame à laquelle je consacre dix minutes tous les deux jours, pour constater qu’elle était décapitée - espéré que, contrairement à ce que disait carcasse, ce serait le seul pépin de la journée, et entre deux éternuements, en frissonnant un peu dans ma chemise de nuit, recapitée la pauvre chère
En fin d’après midi samedi départ vers le palais, sous un ciel de chaleur dure, pour la première partie de l’exposition de Douglas Gordon, une installation dans la grande chapelle.
Nombreux invités, et, en douceur, grâce à la pénombre, une fatigue de journée d’été, une courtoisie encore, notre circulation côtoyait, en s’y mêlant parfois, celle des touristes et, de plus loin celle des techniciens et acteurs préparant le spectacle du soir.
Reconnaissables à une tenue un tout petit peu plus recherchée et aux invitations transformées en éventail pour les amateurs (ou non : des râleurs) de Douglas Gordon , à l’audio-guide pour les autres.
Intentions : « il a constitué un bestiaire dans la pure tradition médiévale, où chaque animal renvoie à une symbolique, parfois corporelle, parfois cosmique, toujours très fortement connotée dans l’imaginaire religieux et les textes fondateurs des origines« .
Perception : pénombre - mondanités plus ou moins discrètes - cris d’oiseaux ou de corneilles - en grands panneaux, la camaraderie entre les montreurs et les serpents - des enfants fascinés assis devant des petits écrans à terre dans la sacristie, à coté de l’indifférence du pape - essais de photos sans espoir pour finir de stabiliser mon léger vertige-migraine - une délicieuse fraîcheur - quelques sourires échangés et devinés - et puis le son qui enfle - mais au total finalement assez banal, le cadre magnifiant la chose.
En sortant, jeté un regard indiscret sur l’activité tranquille et lente de la troupe de Roméo Castellucci, et retour dans mon antre pour me mettre en état de profiter de ma soirée, la seconde partie de l’exposition, cabinet de curiosité dans l’hôtel de la collection Lambert attendra un autre jour
Ce samedi soir, départ - forme qui se veut bonne, (jolie jupe pour m’aider), pour la cour d’honneur et le voyage dans la forêt profonde de l‘Inferno. Je suis assez inconditionnelle (mais avec une curiosité critique) de Castellucci pour ne pas trop craindre une déception, certaine qu’il sortira forcément quelque chose de la rencontre entre son esthétisme transcendé, la cour, la nuit et l’Inferno pour lequel j’ai une prédilection qui serait inquiétante si elle n’était, je crois, assez partagée (mais j’avoue que je n’ai pas lu le purgatorio, et ne verrai d’ailleurs pas ce qu’il lui a inspiré, refoulé qu’il est extra muros).
J’ai vu que Castellucci évoquait la présence de Clément V, Bertrand de Got dans l’ »Inferno ». Tâtonne pour le trouver puisqu’il est caché, dans le chant XIX, comme je le pensais, mais il fallait le deviner derrière
« Mais je me suis brûlé plus longtemps les pieds,
plus longtemps j’ai été sens dessus dessous
qu’il ne sera planté avec les pieds rouges (Boniface VIII le damné qui parle à Dante) :
car après lui, chargé d’actions plus laides,
viendra de l’ouest un pasteur sans loi ;
di ver’ ponente, un pastor sanza legge
Il sera le nouveau Jason des Macchabées ;
et comme son roi fut docile au premier,
ainsi sera celui qui règne en France… »

Et pensant au mur que je m’apprêtais à retrouver dans sa beauté nocturne, je pensais que Clément ne l’avait pas connu. - et qu’en fait j’ai par delà la quête, les cercles descendant vers Lucifer, parfois, (cela dépend bien sur de mon état d’esprit du moment), dans mes petites incursions dans cette merveilleuse et harmonieuse cruauté, une lecture focalisée par une curiosité pour ce qui est critique de son époque, d’autant plus fascinante que je n’y connais quasiment rien -
Cherché, pendant que mon dîner se préparait, des traces de Castellucci dans mes minuscules archives : pour l’année dernière, légère déception et finalement souvenir tenace, les dernières images de
http://brigetoun.blogspot.com/2007/07/une-moisson-de-photos-de-christophe.html et, réaction ensommeillée et à chaud http://brigetoun.blogspot.com/2007/07/un-peu-aprs-minuit-la-rue-joseph-vernet.html mais je ne trouve pas mes notes pour le spectacle bref et beau au théâtre (en 2005, avant le blog) et au delà ne sont que souvenirs du temps de l’Odéon. Retrouvé sur « épitaph » joli livre édité par les Solitaires Intempestifs, des images qui réveillaient des souvenirs de spectacles passés, forcément différentes, forcément parentes de ce que je vais voir (noté à 21 heures)
Attente toujours un peu longue (il faut que j’évite d’avoir un quart d’heures d’avance) et petit début d’agoraphobie neutralisé par des plaisanteries (je commence à connaître des têtes et à en être connue)
Dans le programme : « Seul sur le grand plateau du théâtre, ou au contraire muré dans la foule et confronté à la rumeur du monde, l’homme que met en scène Romeo Castellucci subit de plein fouet cette expérience de la perte de soi, désemparé. Tout ici l’agresse, la violence des images, la chute de son propre corps dans la matière, les animaux et les spectres. La dynamique visuelle de ce spectacle a la consistance de cette hébétude, parfois de cet effroi, qui saisit l’homme quand il est réduit à sa petitesse, démuni face aux éléments qui l’accablent. Mais cette fragilité est une ressource, cependant, car elle est la condition d’une douceur paradoxale. Romeo Castellucci montre à chaque spectateur qu’au fond de ses propres peurs, il existe un espace secret, empreint de mélancolie, où il s’accroche à la vie, à “l’incroyable nostalgie de sa propre vie »
Castellucci extrêmement Castellucci, et beauté et violence très infernale. Et malgré trois imbéciles ricanant derrière moi, trop sots pour avoir la courtoisie de partir (j’ai fini par m’asseoir par terre au premier rang) je suis entrée dans le tremblement requis
Une rangée de chiens enchaînés et écumant devant moi pendant que trois chiens s’acharnent sur Castellucci à terre (avec un costume rembourré) - une peau de loup qui passe de lui à un homme qui escalade à main nue la façade, interminablement, jusqu ‘au sommet de la tour de droite d’où il envoie un ballon à un gamin qui, après avoir ramassé la peau, a tagué en rouge « Jean » sur le mur etc…
La peau de loup et le ballon qui passent de main en main - une foule s’avançant en défilé, se couchant comme un tapis de morts, les corps roulant sur eux-mêmes - des sons aussi forts que des détonations et des éclairs de lumière dansant et fusant derrière les arcades, les fenêtres ou sur le mur - une tension permanente même dans les moments de tendresse (que d’enfants !) et une peur permanente ou presque - voix entre grégorien ou madrigal et cri - on passe de cycle en cycle
Des images fortes et, tout de même, parce que c’est Castelluci et qu’il devait y avoir un cheval et du feu ils sont là et le public fait danser au dessus de sa tête une grande toile blanche parce qu’il ne pouvait pas ne pas y avoir un voilage.
Le dernier cercle est celui d’Andy Warhol - et nous partons. Notant cela avant de dîner et dormir, je reprends les derniers vers de l’Inferno. (le poème n’était qu’évoqué, trame d’actions sans paroles )
« nous montâmes, lui premier, moi second,
si bien qu’enfin je vis les choses belles
que le ciel porte par un pertuis rond.
Et par là nous sortîmes, à revoir les étoiles ».

8 commentaires:

tanette a dit…

Etait prête à venir avec toi au spectacle la belle badame recapitée...

FalconHill a dit…

TIens, rhume toi aussi ? Mal à la gorge ou non ? (moi très mal)

Samedi prochain, je vais me ballader au festival et manger dans mon restaurant grec préféré place des Carmes, miam

Bon weekend à toi. Repose toi bien et profite du festival quand même (et donne moi des conseils, hein)

Brigetoun a dit…

hum assez envie d'arrêter là (pas le festival, paumée)

Anonyme a dit…

Ca m'a l'air intéressant le festival d'Avignon que je n'ai encore pas eu l'occasion de participer.

Quant à ta sculpture, c'est un travail de longue halène !

Puisse ce dimanche t'être agréable et paisible.

Anonyme a dit…

Très belle (mais ça ne veut rien dire !) cette description du spectacle. J'ai une larme à l'oeil. Je n'ai quasiment aucune culture théâtrale, alors un sincère merci.

Comme d'habitude, une journée riche, trop riche, ai-je envie de dire, pour ne suciter qu'une brève réaction en commentaire qui puisse être pertinente et à la hauteur de tes balades de lieux en mots, de mots en images (des divagations, diras-tu peut-être).

Je dois t'avouer que tes messages sont trop longs pour que je puisse quotidiennement m'y plonger, et bien souvent, je ne fais que survoler ta cour et Avignon, mais toujours interpellé, ému, enchanté, d'y imaginer vivre ta "carcasse" ainsi animée.
Et des jours comme aujourd'hui, où je prends le temps, et que je m'aperçois que tu doutes à continuer, bé je suis triste !

Je pense aussi à tes autres blogs, j'espère avoir tant de choses à dire, tant de sujets à aborder, d'un regard aussi poétique et lucide, quand je serai plus âgé.

Oliv'

Anonyme a dit…

Ah ! Brigetoun au Festival, ça promet de belles lectures blogguesques et des découvertes passionnantes. Merci par avance

Anonyme a dit…

Trois journées dans une quand arrive le festival et tu arrives à en oublier le rhume !

Muse a dit…

vu quelques extraits du passage que tu cites concernant les chiens aux infos, bien confortablement assise dans un fauteuil , à écouter carcasser ma maman. Cela n'aura sans doute pas le même charme que ce que tu vis. Douce nuit et à demain.
Quelle idée Brig! tu es la seule à nous permettre de suivre Avignon.