Julie était assise, avec trois des plus jeunes pensionnaires, sur des bancs de pierre, devant la vieille maison des dortoirs, contre la haie de troènes séparant leur monde du « jardin d’agrément « réservé à Madame de Cayranne, et elles brodaient, en écoutant cette petite folle de Rosalie expliquer, les yeux écarquillés pour demander une approbation, que la petite flaque de pâle lumière qui s’était enfin posée sur le gravier, devant leurs yeux, était bien la preuve que - même si je commençais à en douter vraiment, Mademoiselle - le printemps était là, et depuis longtemps, et bien installé, un vrai printemps, comme dans ces vers que Monsieur Bernardy voulait qu’elle apprenne - mais il devrait pourtant se résigner, je n’ai pas de mémoire !
- justement… Tu ne veux pas rester idiote !
- Sophie ! Quelle façon de parler à votre sœur ! Et Rosalie, nous l’apprendrons ensemble cette poésie.
Et Sophie soupire : - Quel calme ! Enfin, les charrois sont finis. Vous irez la voir à Marseille cette bastide de Mademoiselle de Cayranne ?
- Madame Icart,
- Six mois après son mariage,il était temps qu’elle ait une maison
- Mais elle l’avait. Simplement les pièces de réception étaient tristes, anciennes, et son mari les voulait plus belles pour elle. Les travaux sont finis, et c’est délicieux m’écrit-elle, alors on lui envoie les meubles que sa mère lui destinait… et deux nouvelles salles d’études vont pouvoir être installées pour vous, à côté de la bibliothèque
- délicieux ? Ça ne lui ressemble pas, elle devait être pressée en vous écrivant… Non, ne grondez pas ! Vous irez la voir ?
- Hé !je ne peux pas ! Comment pourriez vous vous passer de moi !
Elles regardent la belle courbe de l’aile des études, de l’autre côté de la cour.
Anne-Françoise de Cayranne descend les quelques marches du petit perron, suivie de Jean Bernardy et d’une grande silhouette un peu courbée.
- Vous le connaissez ce monsieur, Mademoiselle ?
Et Julie, se penchant pour ranger soigneusement les soies, se demandant si son regard avait été trop…, répond posément
- Mais oui, je l’ai rencontré au mariage de Mathilde de Cayranne. C’est Monsieur Castelle, un ami d’enfance du jeune Monsieur du Bernaux. Il est ébéniste. Je crois qu’il va être chargé de meubler vos classes. - Il fait frais maintenant, vous devez rentrer. Perrine a dû vous préparer un chocolat.
Elle reste debout. Elle froisse dans sa main une feuille cueillie sur un oranger en pot, s’appliquant à en goûter l’odeur, à s’absorber dans ce plaisir, à oublier de suivre les petites filles, et heureusement Anne-Françoise lui fait signe.
Elle va lentement vers les trois silhouettes.
- justement… Tu ne veux pas rester idiote !
- Sophie ! Quelle façon de parler à votre sœur ! Et Rosalie, nous l’apprendrons ensemble cette poésie.
Et Sophie soupire : - Quel calme ! Enfin, les charrois sont finis. Vous irez la voir à Marseille cette bastide de Mademoiselle de Cayranne ?
- Madame Icart,
- Six mois après son mariage,il était temps qu’elle ait une maison
- Mais elle l’avait. Simplement les pièces de réception étaient tristes, anciennes, et son mari les voulait plus belles pour elle. Les travaux sont finis, et c’est délicieux m’écrit-elle, alors on lui envoie les meubles que sa mère lui destinait… et deux nouvelles salles d’études vont pouvoir être installées pour vous, à côté de la bibliothèque
- délicieux ? Ça ne lui ressemble pas, elle devait être pressée en vous écrivant… Non, ne grondez pas ! Vous irez la voir ?
- Hé !je ne peux pas ! Comment pourriez vous vous passer de moi !
Elles regardent la belle courbe de l’aile des études, de l’autre côté de la cour.
Anne-Françoise de Cayranne descend les quelques marches du petit perron, suivie de Jean Bernardy et d’une grande silhouette un peu courbée.
- Vous le connaissez ce monsieur, Mademoiselle ?
Et Julie, se penchant pour ranger soigneusement les soies, se demandant si son regard avait été trop…, répond posément
- Mais oui, je l’ai rencontré au mariage de Mathilde de Cayranne. C’est Monsieur Castelle, un ami d’enfance du jeune Monsieur du Bernaux. Il est ébéniste. Je crois qu’il va être chargé de meubler vos classes. - Il fait frais maintenant, vous devez rentrer. Perrine a dû vous préparer un chocolat.
Elle reste debout. Elle froisse dans sa main une feuille cueillie sur un oranger en pot, s’appliquant à en goûter l’odeur, à s’absorber dans ce plaisir, à oublier de suivre les petites filles, et heureusement Anne-Françoise lui fait signe.
Elle va lentement vers les trois silhouettes.
7 commentaires:
ces personnages qui nous racontent un autre temps ...
Bonne journée Brigetoun.
Pourquoi ça s'arrête ?!?
Je veux savoir ce qu'ils vont se dire, moi.
Kiki :-)
(PS, désolée de ne pas passer plus souvent, mais plein de raisons qu'il serait bien trop long d'énumérer m'en empêche. J'espère qu'elles ne dureront qu'un temps)
Je ne sais pas si j'aurais aimé monsieur Castelle ébéniste....moi les gens qui me nuisent.....
J'aime ce mot (sans parler de la chose) "pérégrination"; il y a de la migration, du pélerinage en lui, du retour sur soi. Un peu comme levoyage autour de ma chambre.
Le grand retour du "roman de gare" de notre chère Brigetoun, et de ses personnages aux dialogues et propos aussi finement ciselés que ceux qu'elle fait de ses mains... Un délice
Me voici te dire bonjour et rêvasser avec tes pérégrinations littéraires. Amitiés.
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