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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

lundi, novembre 10, 2008


au coeur de l'arrière saison
un « au » long et sourd comme une trompette bouchée, et derrière le gong assourdi de "tomne", une image d’or bruni; un parfum d’ambre, Jeanne en cirant ses meubles dans l’odeur du miel rêvassait au mot automne pour oublier ce léger frissonnement de ses épaules en s’habillant ce matin, et le silence cotonneux de l'appartement maintenant que la pluie s'était tue.
Et le long silence de ses enfants.
Elle s’est assise devant la porte fenêtre du salon; et la morne rambarde noircie avec, presque sur le même plan, la façade grise de l’immeuble d’en face et les grasses et molles sculptures qui ornent sa bourgeoisie satisfaite. Elle a tiré vers elle la petite table du téléphone et elle a appelé sa fille - une attente qui se prolongeait - et elle suivait la sonnerie qui devait s’insinuer depuis le hall de granit rugueux, monter l’escalier, chercher des oreilles attentives, et puis les pas précipités et une voix aiguë "allo ! c'est qui ?"
"chéri, on ne répond pas comme ça ! ... C'est Mamie de Paris"
et elle l'entend appeler "Maman" et puis son souffle de nouveau, et elle lui dit qu'elle l'embrasse, lui demande ce qu'il fait pendant ces quelques jours de vacances
"il pleut, notre match a été annulé"
"et quoi d'autre ?"
"Je fais des bonshommes en écorce comme tu m'a montré - j'ai été (décidément) chez Vincent l'autre jour - il ne pleuvait pas - on a fait des cabanes"
A ce moment le récepteur change de main et Alice complète :
"et ils étaient merveilleusement sales, plus un bon rhume et un genou quadrillé. Mais tu ne peux pas savoir comme c'est beau en ce moment... Quand tu marches dans notre allée, tu avances dans une lumière rouge sombre et tes pieds s'enfoncent un peu dans un tapis... Je te dirais bien de venir. Tu verrais, c'est le Cours la Reine à la puissance dix, au moins... mais il y a le problème chauffage."
"toujours pas réglé ? Tu ne peux pas rester là avec les enfants, voyons !...
"Le chauffagiste devrait terminer demain. Je ne veux pas que les garçons manquent la classe. Laurence est une petite boule de graisse tiède. Et puis il y a la cuisine... et si tu voyais leurs mines"
et Jeanne a une vision de petites joues rouges calées sur des écharpes.
"Ne t'en fais pas... et toi, Maman, comment vas-tu ? Tu as vu et entendu quelque chose de bien ces jours ci ?"
"rien d'extraordinaire.... "
Et en repoussant la table après avoir raccroché, en regardant ses jambes étendues devant elle, en les étirant, en remuant ses orteils dans ses bottes, elle se résigne à laisser monter en elle, à l'envahir, la submerger, privilège amer de son oisiveté tellement désirée, le désenchantement qui pour elle a toujours accompagné l'automne, cette petite angoisse vague, qui ne doit pas s'avouer, puisque, bien sûr la saison est si belle, et s'accompagne toujours de projets....
Mais tout en elle refuse, renâcle, ne veut pas jouer l'acceptation de la longue descente dans ces jours sombres, humides et froids, dans la certitude que la lumière ne reviendra jamais, et elle s'intalle dans la volonté têtue de regarder ce que l'on appelle les plaisirs de l'hiver glisser autour d'elle sans qu'elle en soit si peu que ce soit concernée ou consolée.
"Belle, tu parles" marmonne-t-elle en se levant et, en se tenant les reins; elle regarde ses meubles, livres, disques, se cherchant une occupation, sans désir d'en trouver.
encore, comme distraction au sens d'antan, un essai pour un exercice d'écriture ludique le n°67 proposé par Michel "à la faveur de l'automne" http://www.ecritureludique.net/article-24533104.html avec un montage photo de Barbarette dont je me suis fort peu inspirée (pas obligatoire) http://www.barbarette.com/article-23924035.html - pas plus que je n'ai réussi à être originale ou à éprouver ou faire éprouver des sensations fortes comme recommandé.
une photo au hasard, en ponctuation, una vez màs.
Et en attendant que la faim vienne, en début de nuit, repris dans mon petit grenier "publie-net", où j'engrange au gré de mes envies, "du seuil s'enfoncer" de Fred Griot http://www.publie.net/tnc/spip.php?article175 (présentation, premières pages, commande éventuelle comme toujours) ou du moins le premier groupe de textes "la voix ça" et "boue ici lumière haut" où je me trouvais bien.

"pourtant ça doit être poss
possible
rienfaire rienpenser penser autrement penser paspenser penser autrement penser sanspenser sans creuser l'os du crâne sans penser vraiment sans creuser l'os toujours.


j'ai aujourd'hui cette année cette nuit cette année j'ai réussi presque à apprendre presque à ne plus penser réussi à apprendre à arrêter tout ça ou tout du moins à ralentir tout ça cette tête son activité pourtant."
un petit rajout : comme me le suggère Michel Benoit allez voir http://www.nosenfantsnousaccuseront-lefilm.com/ - comme je me le suggère : tâchons, sans obsession, d'en tenir compte naturellement dans nos petits choix quotidiens, dans la mesure de nos moyens

12 commentaires:

Anonyme a dit…

Superbe ta "Voix humaine" é ta façon ! Texte très vivant. J'aime la manière dont tu décris la voix de la mamie s'introduisant dans les activités devinées de la fille et du petit-fils.
Bonne journée à toi. Un petit coup de fil, peut-être?

Muse a dit…

J'aime beaucoup le désenchantement de ton automne qui ressemble aujourd'hui au mien...Je n'aime vraiment pas cette période.

Anonyme a dit…

C'est vivant, bien observé et très bien dit : il n'y a rien de banal dans ton texte. Il me plaît !

micheline a dit…

toutes ces personnes qui ont lévé le doigt!
et pourtant on vit plus longtemps
alors plus longtemps malade??

Jerry OX a dit…

cette Jeanne tout de meme !! un formidable personnage !!

j'adore la scène au téléphone !!remarquable !!

dis donc !! il est très bien écrit ce texte !!! bravo !! tu n'es pas si "paumée" que çà !
beau lundi !!

Anonyme a dit…

je pense que je n'ai pas envie de penser ce soir, fallait y penser !

Anonyme a dit…

Eh bien, je le trouve très...touchant ton texte!
Superbement écrit, doux...je manque d'inspiration pour dire ce que sa lecture m'a procuré, désolée:-)
Petite touche personnelle quand même: c'est assez "amusant" de lire "mamie de Paris", c'est comme cela que ma pitchoun appelle sa "mamie de Paris "justement...encore maintenant qu'elle a déménagé à Melun, c'est mimi!...

Bises et à bientôt, merci d'être passée me voir...
Flora

Anonyme a dit…

Oui, nos enfants nous accuseront.
regardez ce document! Contre la démesure;

Anonyme a dit…

Combien sont-elles à téléphoner à leurs enfants ou petits enfants pour essayer de passer les jours difficiles ? Beaux textes, on s'y croirait ...

Anonyme a dit…

l'originalité provient de cette scène de vie familière, la solitude accentuée par la mauvaise saison ressentie par tellement de personnes, perso j'ai la chance d'y échapper tout au contraire elle me stimule et m'enchante :-)
big bisous

Anonyme a dit…

Bravo pour ton portrait d'automne !

J'aime l'illustration aussi, c'est saisissant (c'est un mot ?).

Non, non, non, pas la peine, Petit Bob me le dira après que je ferme cette fenêtre, et je rougirai de honte toute seule, comme il convient dans de telles circonstances.

;-)

Anonyme a dit…

Joli, simple et touchant... j'aime beaucoup.