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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

jeudi, juin 04, 2009

mercredi matin la chaleur, solide, touchait nos bras et le ciel renouait avec la dureté irradiante du bleu,
j'ai cédé au charme de poissons trop recherchés, et comme le fromager me reprochait de ne plus prendre de photo, celle ci du brousse du Roure, dont j'ai emporté un morceau tendrement humide, avec un Saint Félicien âgé, jaunissant et se concentrant, et un petit Langres gras et roux.
Et puis, dans l'après-midi, je les ai regardé ces deux là, j'ai installé après les pavés le ciment d'un quai, et puis un petit port, quelques pointus, des voiliers de plaisance et de grosses vedettes ventrues et hautes comme des pavillons prétentieux le long d'une digue, plus loin, et il y avait un petit feu à son extrémité, et un bateau à bancs pour la ballade avec un aboyeur qui racolait les passants.
Nous, nous étions au bout du quai, devant l'église, vers la petite pointe qui séparait le village de la plage, et l'agitation était moindre.
Juste des voix d'enfants qui se défiaient dans le jardin, sur la pointe, entre agaves et lentisques, juste un petit murmure dans les branches de pins et une musique tonitruante sortant d'un cabriolet conduit, bras sur la portière, par un minot, mais il est passé, et le son s'est effacé peu à peu.
Le vieux s'était enfoncé dans une absence patiente, jusqu'à faire partie du mur où il cueillait chaque jour le soleil, et les jours sombres on ne savait pas s'il existait encore, et il ne voyait plus la mer, si elle l'avait jamais intéressée.
Je me suis appuyée au soubassement de la croix, à coté de l'autre, et au bout d'un moment il s'est poussé pour que je puisse m'asseoir.
Nous regardions le soir décolorer un peu le ciel et l'eau et les canotes tourner la jetée avec un teuf-teuf qui solidifiait le calme.
Il a dit comme s'il ne savait pas qu'il parlait : "j'aimerais repartir" et puis "toi tu ne pars jamais. Tu attends ?"
- non... Qui ?
- le Commandant
- On ne le verra pas plus que je ne le vois.
- Il y a longtemps.
- Vous croyez ?
- et il a du se laisser couler jusqu'à l'écluse, et puis suivre la Seine
- et il aura fallu qu'il fasse une longue route, jusqu'à franchir le détroit et rentrer dans sa mer
- Je me demande vers quelle cote il est allé
- au sud, je pense, vous ne croyez pas ? et puis il aura caboté tout au long des cotes
- je le vois sur un chebeck, et il mouille dans une crique des îles.
- il fume sa pipe en regardant des colonnes sur une pointe
- mais il va continuer et il viendra
- il passera au large d'Escampobariou en saluant le frère de la côte
- et il chantera "sole mio"
- il aura le principal, sa pipe, un bout, et son couteau
- et puis le souvenir de nous.
- bien sûr, nous sommes son souvenir - ou le contraire

8 commentaires:

chase a dit…

bonjour Brigitte,
vous avez vraiment capturé le ton d'une journée rêveuse ensolleillée qui réchauffe les vents de l'imagination, ou on se laisse trainer les conversations avec les étrangers sur les rêves et les possibilités.
oui le soleil contre le ciment c'est comme une drogue.
J'étais trop malade pour aller au travail aujourdhui et j'ai passé une journée un peu similaire ensolleillée.

C'est très beau les mots et le voiliers.

JEA a dit…

Une page comme un coquillage. Avec le roulis de mots qui ouvrent grand et large (roulis n'est en rien péjoratif, c'est le canot qui s'y roule comme dans un lit non de fièvres mais de rêves mouvants et émouvants).
Au Langres, permettez, pour vous remercier et peut-être étonner (pas au sens étymologique, bien entendu) vos papilles d'ajouter un gris de Champagne, une boulette d'Avesnes et un Dauphin (en forme de poisson mais portant le nom d'un fils royal).

Dominique a dit…

je sors de chez Didier et sa clinique pour neurasthéniques donc quelques images d'agapes me font du bien, je sens les odeurs jusqu'ici

micheline a dit…

en partance, le temps de l'imaginaire,pour ces contrées lointaines et retour à déguster une pointe de ce Langres....
Langres mon pays presque d'origine, sinon de la ville au moins du département

Michel Benoit a dit…

De la Seine à Giens ! Quel cabotage !

Gérard a dit…

Tu connais le Ste Maure pur chêvre AOC avec un verre de Chinon, deux villes très proches de chez moi.

Brigetoun a dit…

problème avec le vin, à ma grande honte - en ai été dégoutée jeune - m'y met peu à peu (un verre par mois en gros ou un peu plus) - je préfère savourer les noms et en servir

DUSZKA a dit…

L'eau à la bouche, le soleil dans les yeux, le dialogue en sourdine, un moment de rêve, languide... et des images léchées... ça fait du bien. Bises.