Au matin, ai rencontré une princesse, doux visage mat et rond, blotti en une coiffe de boyardesse, grand corps dru supportant, bien droit et bien souple, la parure d'un caftan et d'une robe d'or pâle. Pieds droits, légèrement cambrée pour mieux me toiser avec une dignité bienveillante, elle levait une main en un geste de salut qui évoquait une bénédiction, et serrait contre elle, dans sa main protectrice, un petiot emmailloté.
Me suis sentie d'autre barbarie, de lentisques, de chèvre et de mer, et me suis plantée face à elle, qui tant me plaisait, comme une jeune femme de belle origine, et l'ai saluée avec toute l'autorité familière que me donnait mon ancienneté.
Elle m'a répondu en longue phrase, roulement de mots mats et doux, que je ne comprenais pas, et cela faisait une musique tendre.
J'ai remonté la lanière de mon sac sur mon épaule, et suis repartie. J'ai entendu un très léger déchirement, et, continuant à avancer, j'ai tourné la tête vers elle. Elle avait déposé l'enfant sur un amas d'étoffes précieuses, et rompant un lien qui la retenait, elle me suivait.
Nous sommes parties doucement, et sous ses petits pas étrécis des pétales d'argent dessinaient le chemin du retour.
Je me suis arrêtée devant une douce vasque, mais la palpitation du marbre était sèche, à ne plus avoir souvenir de liquide, alors elle a frotté légèrement les veines qui sourdaient de la pierre et en a recueilli un peu de rose pour ses joues, et ses yeux se sont mis à briller.
Et nous sommes reparties, sa marche devenue souple, tant qu'elle devait faire effort pour ne pas me dépasser, et sommes arrivées à une fontaine. Je lui ai offert de l'eau, qu'elle a bue dans mes vieilles mains, puis elle m'a imitée, accompagnant son geste d'une roucoulade souriante.
Alors j'ai cueilli les roses attardées qui épuisaient un arbre, à coté, et les lui ai données. Elle s'est inclinée en les prenant, et cela faisait une petite tache qui approfondissait, ensoleillait l'or de sa robe, et puis elle a disparu.
Suis restée un instant béante, suis revenue vers notre monde, et en y prenant pied j'ai réalisé qu'elle était sans doute sensée représenter une vierge. Suis repartie, en allongeant le pas, vers Carrefour.
Pardon.
26 commentaires:
Tôt levé, tard couchée, Brigetoun.
Je l'ai aimée avec toi cette jolie compagne de tes déambulations.
chère Brigitte, quelle expérience mystique...
Excellent !
Des deux, laquelle est la double de l'autre ?
Mais Brigetoun, même en vous rendant au magasin dont je n'ai pas envie de citer le nom, je suis certaine que cette sainte Vierge a continué à vous suivre pour que vous veillez autant sur elle qu'elle continuera à veiller sur vous ! Comment pourrait-il en être autrement, maintenant qu'une vraie rencontre a eu lieu entre vous deux ?
ben la Sainte Vierge c'est pas trop dans mon registre
Brigetoun, ce n'est pas le mien non plus, mais on peut toujours faire semblant d'y croire, comme quand on était petits et que nous savions que le père Noël n'existait pas, mais que quand même dans le doute, s'il existait quand même, il ne fallait pas qu'il croit qu'on le renie. Alors la vierge Marie, même si on y croit pas, on peut tout aussi bien imaginer que c'est une fée et elles par contre, les fées, elles existent réellement !
Magnifique déambulation même si la chute est dure !
La première photo est formidable, j'en aime les teintes cuivrées, l'enfilade ensoleillé du tableau et la sculpture est une merveille. Beau billet, merci.
Déambulation à quelques centimètres au-dessus du sol...
C'était certainement un fantôme...
Mais le fantôme de la Vierge, c'est vachement rare !
Je ne crois pas connaître cette fontaine (et qui coule en plus).
Où est-elle ?
Une source de jouvence.
De voyager - léger, léger - sur un petit nuage, on fait des découvertes...
la fontaine : Grignan (les trois dernières photos, les autres c'est mon proche quartier
c'est beau et ensorcelant je vous suivais dans l'ombre . il y a sûrement un paradis de l'imaginaire
pour les damnés de la terre
(pardon aussi c'érait pour la rime)
Ta princesse battait le pavé on dirait
On rêve agréablement en lisant ton texte, mais on est réveillés en sursaut...par la chute. Bonne journée.
chère Brigitte, vous avez une sensibilité remarquable et tellement poétique alors c'est comme une métaphore visuelle.
aussi si j'ai bien compris vous avez bu l'alcool hier soir, et votre santé n'est pas bonne-l'alcool c'est stressant sur le corps.
Ma santé n'est pas trop bonne et quand le H1N1 est arrivé à ma ville j'ai décidé de ne pas avoir la vaccination mais j'ai cessé de boir l'alcool et bien sur je me sens plus fort.
au lieu de l'alcool prenez un cappucino la prochaine fois et pensez à moi s'il vous plait parce que je ne peut pas vous rencontrer à Avignon.
C'est trop loin du Canada.
Je vous rencontre seulement dans un reve de la poésie remarquable parceque vous etes remarquable.
bises
merci du conseil, mais un thé m'a suffi
ah bravo vous êtes fort de l'esprit quand vous êtes entouré par les boissons d'alcool de prendre le thé!
mais peut être vous êtes comme moi il faut seulement regarder le boisson d'alcool est voila nous sommes là. ha ha
allez ne reste plus maintenant que tu t'essaies en poterie dans la réalisation des Vierges, saintes ou non...
Parfois une image vous pousuit juste entrevue au détour d'une rue
pourquoi ne pas la garder encore un peu ......
joli conte
je suis d'accord avec Micheline, c'est un paradis de l'imagination.
Regarde Brigitte tous les personnes religieuses qui ont vu les apparitions de la vierge,-je suis comme vous je ne crois pas en ce monde mais c'est le pouvoir de l'imagination c'est un autre chemin de la poésie.
et merci pour avoir partagé c'était magnifique et calmant.
mais j'ai beaucoup de respect pour la religion comme j'ai dit sur la dernière poste je fais les méditations belle au cathédral mais enfin c'est juste un outil un rêve mais chacun à ses propres idées.....
Je suis bien d'accord avec toi, Jordæn.
Joli conte !
Mais il ne faut pas se fier aux habits d'or de cette mère, pied nus, qui tend la main dans la vitrine.
C'est une malheureuse qui demande la charité pour nourrir son enfant.
Bonne soirée, Brigitte
Jordaen, moi aussi, respect (et connaissance, élevée que j'ai été par des bonnes soeurs, et intéressée par l'histoire de l'église en ma jeunesse), à cause de l'importance que cela avait pour ma mère, profondément pieuse et non bigote, et que cela a pour mes soeurs - mais je ne suis pas religieuse du tout. Et m'agace la prétention des religions à être seules représentantes de la spiritualité et de la morale (alors que c'est souvent une solution de facilité)
oui.
Jolie princesse comme évanescente, séparée par la vitre du rêve céleste...
Les autres photos nous font aussi voyager comme sur un nuage tout doux.
Enregistrer un commentaire