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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

lundi, février 01, 2010

Madame Guichard brodait dans son salon, dans la pauvre lumière qui entrait par la fenêtre, filtrée par l'étroitesse de la rue, quand sa servante est venue l'appeler « Madame, Monsieur vous demande de venir dans la chambre jaune, le Monsieur d'Annonay est fou, il va faire des saletés et ils sont tous excités, ils vous attendent ». « Ne soyez pas sotte, ma fille, Monsieur de Mongolfier est un savant ». Elle s'est précipitée dans l'escalier, avec un semblant de digne retenue, son étroite robe de mousseline ondulant le long de ses jambes. Les trois hommes se sont retournés – son mari « venez ma chère, nous vous attendions » – l'ainé de ses correspondants, se redressant après avoir allumé un tas de papier dans une grand bassine (et elle a eu un moment d'inquiétude pour la marqueterie de la table), un curieux sac de taffetas blanc en main : « je crois que, cette fois, j'ai trouvé » - et elle a ouvert de grands yeux, pendant qu'ils s'exclamaient, se tapaient sur l'épaule, en voyant cette chose s'élever lentement, et flotter dans le rayon de soleil qui pénétrait par la porte fenêtre. Puis elle est redescendue commander le dîner, veiller au couvert, laissant leur ami noter de sa grande belle écriture, cette « expérience » qui semblait lui donner une fierté exaltée. Et le soir son mari, très fier de la renommée qui devait, selon lui, en rejaillir sur eux et leur maison, soliloquait en se déshabillant, cherchant par quel signe commémorer ce qu'il appelait cet événement. Elle a souri, amusée et heureuse de leur découvrir ce reste de juvénilité, et s'est enfoncée dans son oreiller et le sommeil.

image de rien, image de Brigetoun, en ce dimanche passé, en plus chaleureux - son humeur neutre, pleine de vide, comme son crâne, sans guère envie d'un éveil, d'une idée ou de quoi que ce soit – juste un peu de lecture, bonne et belle, mais en cours.

Et puis, comme je suis incapable de mieux, et parce que, tels qu'ils sont, ils correspondent à un minimum de soin, plus ou moins, je continue à reprendre ici, comme en famille, des bidules semés sur autres blogs et à eux dédiés, comme Madame Guichard, ci-dessus, venant du convoi des glossolales http://leconvoidesglossolales.blogspot.com

comme ces lignes de j'ai aimé http://jaiaime.blogspot.com

J'ai aimé redescendre du pays des grands toits mansardés en ardoise, qui m'étaient chers, pourtant, avec leur géométrie et l'animation qu'y mettent la douceur des noues, vers nos terres de tuiles. Avec des exigences, incurablement esthètes et légèrement snobs, qui me font gommer, sans les voir, les tuiles mécaniques, oublier le charme des tuiles en écailles vernissées qui veulent la lumière douce de la Bourgogne, tolérer difficilement les tuiles trop uniformément roses et neuves, désirer le camaïeu des vieux toits, le jeu des tons grisés, verdis, de la tendresse un peu fanée du rose fatigué, mourant, se dégradant jusqu'au blanc, et le moutonnement de leur surface protectrice, et que m'importent leur rareté ou leur prix puisque toit je n'ai point, et qu'ils sont là pour le plaisir des passants.

ou http://leslignesdumonde.wordpress.com/2009/10/02/de-vase-en-vase-par-brigitte-celerier/

Pour me servir de flux de vase en vase, sont venus des nuages – ai posé mes yeux en eux – me suis installée, et suis arrivée.
Je regarde, et me sens un peu déplacée.
Pour moi qui ne bouge pas, ou plus, qui n’ai jamais beaucoup bougé.
J’aimais les points – me poser à un endroit sur une carte, dans une ville, y rester le temps de me rendre familiers des coins de rue, des ouvertures sur des paysages de pierres, ou annexés aux pierres – l’arrivée au bord du Tage, et le banc où je m’assieds pour lire et rêver, avec dans mon dos la présence de l’immensité de la place, et puis la ville, les rues où j’ai marché et les gens côtoyés doucement sans que je leur appartienne, sans que je pénètre leur vie – une fenêtre qui me donnait, chaque fois que j’entrais dans la chambre, ou le matin après un grand geste pour repousser les lourds rideaux, les jardins de la Villa Borghèse, avec les bruits de la ville, doucement – une enfilade de briques un peu tristes dans un coin de l’East-end – l’eau d’un canal, à Bruges, un arbre qui se penche, et un clocher derrière une rangée de maisons .. Y rester, presque demeurer, pour que la ville, des tableaux, un marché (la soupe de poisson mangée debout sous une voute près du marché de Florence, ou les deux grandes halles en bas des ramblas, ou la verduria tassée au bord du canal dans une symphonie d’odeurs), une salle de concert, m’aient acceptée comme un tout petit élément étranger glissant à la surface, que nous nous soyons devenus bienveillants.
Mais, c’est vrai, j’aimais bien aussi, parfois, le mouvement qui m’y avait amenée : l’agacement cotonneux de l’autocar interminablement vers Calais et l’absurdité des ferrys – le train de nuit (et surtout pas les attentes sans fin dans les aéroports quand je pouvais l’éviter) vers Rome, ou Florence quand la ville était encore aimable, que l’on y voyait encore des italiens, ou la bien aimée Sienne sur ses collines – ou les ports marchands d’Alger et de Sète, dans le goût et l’odeur de la mer, avec le bas fond de la ville comme arrière plan.
Mes paysages sont de pierres, anciens, et pas très lointains – mais voilà qu’eux et moi nous avons posé un gros pavé dans le flux des lignes du monde.

Alors, pour la forme, et avec un chouya de sincérité, pardon de mon avarice paresseuse ou paresse avaricieuse

8 commentaires:

MATHILDE PRIMAVERA a dit…

Ta photo du nuage est épatante !

jeandler a dit…

J'aime cette fière et juvénile élévation.

Michel Benoit a dit…

Beau !!!

micheline a dit…

ah si je pouvais, comme Madame Guichard , broder dans la pénombre et le soir..., amusée et heureuse ...., m'enfoncer dans mon oreiller et le sommeil..
mais elle n'est pas de mon monde, ou plutôt je ne suis pas de la sage noblesse du sien..

Brigetoun a dit…

je ne sis si elle a existé mais Monsieur Guichard oui, et c'est dans cette maison, près de chez moi, que l'aîné des Mongolfier a fait l'expérience menant à la mongolfière (raison de la décoration des balcons)

Scriblogueur a dit…

Je me retrouve bien dans la voyageuse immobile.

JEA a dit…

tandis que vous écrivez aux nuages, une sombre montgolfière s'élève de votre première photo...

Gérard a dit…

J'ai une paresse paresseuse subitement