Dimanche matin je suis parvenue à me convaincre que ceci n'était pas oeuvre d'art mais tas d'étoffes diverses exigeant mon intervention, et j'ai expédié le repassage en attente avant que trop important soit et pour libérer ma journée.
Mais en fait, me suis rendu compte que mes projets éventuels m'ennuyaient profondément et que seul le désir de «faire quelque chose» aurait pu être motivation.
Ai dormi, ai lu, ai regardé «moi un noir», «la chasse au lion au l'arc», «les maîtres fous» de Rouch, parce que FC en parlait, ai cherché des bouts de films de Chabrol sur YouTube, parce qu'il est mort ce qui ne lui va pas, ai envoyé cinq lignes et demi, au convoi des glossolales, et recopié, ici, deux de mes derniers envois.
Je relis pour la troisième, quatrième, ou ne sais, peut-être cinquième fois, la lettre. Je m'arrache. Je lève les yeux. Au dessus de moi, un lac ou un étang, et des plantes qui se penchent sur lui. Une lumière douce. Un bleu clair, mais très bleu, si bleu que le soleil doit certainement filtrer à travers des arbres pour toucher cette eau calme qui me surplombe. Au centre d'une clairière. Agréable. Un asile secret. Je regarde, je regarde et je laisse tomber la feuille. Je sursaute. Je la ramasse. Je me redresse. Devant moi un lampadaire, une corbeille de fleurs faussement sauvages juste sous la lampe, et le ciel au dessus, qui pâlit avec le soir. Oui, le réel. Dommage. Décidément j'étais assez bouleversée.
J'aimais l'écouter parler, ce qui n'avait lieu que quand nous étions seuls, ou que l'assistance était peu nombreuse et fidèle. L'auditeur au sourire un peu énigmatique se muait alors en discoureur intarissable, qui s'emparait de chaque sujet volant entre nous pour le creuser, avec minutie, profondément, si profondément que cela n'en finissait pas, et une idée en entrainant une autre, il bifurquait, et nous le suivions dans ce dédale qui paraissait aussi évident qu'étourdissant. Je l'écoutais, ayant presque oublié, comme tous, comme lui, ce qui était au départ de cette dissection, et j'attendais avec un espoir chaque fois renouvelé, chaque fois déçu, qu'il parvienne à dénicher la moelle des choses.
10 commentaires:
je regarderai ma pile de repassage autrement maintenant !!
un beau bazar ces tissus, j'aime.
Le froissé est ici plus beau, dans la vie de ses plis, que le repassé (lifté, en quelque sorte).
Comme le platane, le coeur fendu
"d'art-d'art" : faire vite un repas sage qui soit créatif.
Cette première image, ce serait « Sur le lit dans la chambre de l'artiste » par Van Gogh.
ce qu'il reste à faire quand on n'a plus envie de faire: regarder le ciel et écouter quelqu'un d'autre jusqu'à ce que s'éveille une quête nouvelle.
Ainsi je viens.
Encore deux jolis petits textes dont tu as le secret. J'ai cherché vainement à les relier...mais ma fatigue du jour m'empêche d'aller au-delà. Les voyages sur Marvejols me fatigue pas mal...
Voilà comment naissent les oeuvres d'art: un savant négligé de couleurs et de plis ....
Tu m'a l'air chiffonnée aujourd'hui !!! ...bon je repasse demain
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