
Il y aurait ce trou, on se pencherait, et puis on sauterait dedans et on se glisserait derrière le rideau, entre peur légère et attente grande. Derrière... je ne sais pas.... il n'y aurait peut être rien, qu'une boite de poussière, avec une lumière diffuse - alors on choisirait un coin, on se pelotonnerait, on s'endormirait.
Ou bien il y aurait, dans l'ombre ou une lumière sans intérêt, qu'on ne constaterait pas, des mouvements, des colères, ou des violences, que l'on réveillerait, on trébucherait au dessus de trous, on regarderait des affrontements, on n'aurait même pas peur, ou pas trop, ce serait un spectacle, pas vraiment terrible, pas vraiment drôle, sans aucun sens, mais on serait fasciné, on resterait là à assister, à se courber, à éviter, on serait peut être à l'origine de ce tumulte sourd, se dirait-on... on ouvrirait les mains ou on se couvrirait les yeux ou... je ne sais pas.
Ou bien : on entend des pas au dessus de soi, on regarde, on se souvient qu'on est entré sous un plancher, on traverse le rideau, on se retourne, on se hisse, les bras en appui sur les planches, et il y aurait une femme qui bougerait et dirait.

il y aurait de jolis mots pour présenter un texte, et puis une voix claire, précise et ferme qui dirait ce que dit cette femme qui est devant nous, et puis un texte, des mots à gauche :
« la femme dont nous racontons l’histoire sait bien que le théâtre s’effondre
elle sait que sur les charniers poussent les fleurs les plus belles
que les voix plurielles viennent un instant la visiter »
et des mots à droite :
« tu ne sais rien du théâtre
tu ne sais rien de l’instant
tu ne sais rien des fleurs »
alors on resterait là, en veillant à ne pas béer stupidement, et on écouterait ou lirait, laisserait les mots venir, agir, presque sans essayer de comprendre, en sentant et voyant, et la beauté et les senteurs, et le tissu des vies humaines, à travers les guerres, les loups et les souffrances, vaincraient tout
« j’ai vu les haies blanches d’aubépine
j’ai vu les traits du soleil dans les sous-bois
j’ai vu la lumière agrandie dans la clairière
j’ai mis le jus de l’if dans mes veines
et la belle pervenche »
«le père de la mère de ma mère s’appelait edmond
sur le chemin de la vie
choses gens événements ont disparu
il a été tué par la mort je ne sais où
et je lui tisse une écriture
linge presque détruit.. »
…..
« au chaud de la langue défaite
vaille que coûte
ferai mon chant dans la profération du mot »
….
« entre les trépassés et les reliques
à part les morts il y a quelqu’un »
…..
« j’ai vu l’assaut des villes au couteau
j’ai vu les pendus
j’ai vu les foules sur les chemins »
Abyssal Cabaret de Maruse Hache - si par hasard vous passez ici allez donc à http://www.publie.net/fr/ebook/9782814505315/abyssal-cabaret lire la présentation qu'en fait Christine Jeannet, et je vous le souhaite, télécharger texte et mp3.
7 commentaires:
« entre les trépassés et les reliques
à part les morts il y a quelqu’un »
La solitude s'éloigne lorsqu'un ami ou une amie approche
"les fantômes avec les vivants"
les vivants qui sont déjà des fantômes
j'aime laisser "les mots agir", belle force !
" j’ai mis le jus de l’if dans mes veines
et la belle pervenche "
poisons à foison
le grand frisson
z'êtes vraiment dévoués - merci
magnifique la photo de la femme...emballée ..de toi ?
non, bien sûr, j'ai mis un lien
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