Mardi matin, projet de marché, sur lequel j'ai dû revenir, et sous ciel bleu à nuages délicats, dans petite fraîcheur de saison, courses dans mon quartier.
Plaisir de repérer, enfin, un boute-roues pour répondre à la collection de 43 bouto-rodo photographiés par Michel Benoit http://avignon.midiblogs.com/archive/2011/10/29/li-bouto-rodo-43.html, un peu navrée pourtant de sa forme anarchique et sa maladie grande.
Et puis, me suis imaginée, sur les centaines mètres du retour, une petite campagne, bien ancienne, bien dégradée, bien irréelle,
avec un coin de jardin pour lire, goûter, faire ses devoirs ou échanger des paroles rares dans le crépuscule, (prévoir des galettes en tissu fermière)
un âne aux superbes oreilles-ailes, qui veillait sous l'abri d'une voiture, sur une crèche à la rusticité extrême,
et, ses voisins précieux, un coq et une poule parés comme présentoir de bijoux,
dont l'image m'a accompagnée dans mon petit détour, les retrouvailles avec ce que la ville a de plus exquis et le souple sourire de la pierre.
Après, ce n'importe quoi, me suis un peu énervée avec l'assemblée, ai abandonné, ai avancé, lentement, en savourant, dans un recueil de textes de Guy Goffette, réunis sous le titre de « les derniers planteurs de fumée », sept évasions immobiles, harmonie, parole lente et douce, faite pour tous ceux qui sont toujours un peu « amoureux de cartes et d'estampes », cheminant tranquillement à côté de l'agitation du monde, en sympathie avec lui mais sans désir d'y être emporté.
Et c'était :
« Le ciel dans la lucarne est blanc lui aussi, j'y écris le premier mot de ce premier matin en caravane : bonheur, et, fermant les yeux, je l'entends descendre dans ma gorge, ouvrir lentement le chemin de ma respiration. Il y a soudain sur la banquette un corps qui ne m'est plus étranger : le mien. »
ou
« Au fond, les vrais voyages sont immobiles. Immobiles et infinis. Solitaires. Silencieux. Souvent, ils commencent dans une chambre où l'on est enfermé parce qu'il pleut ou parce qu'on est malade, obligé de garder le lit. »
ou
« On s'est assis sur le seuil ou accoudé à sa fenêtre et l'on regarde au fond de soi paisiblement s'écrouler ces grands châteaux qu'une journée qui s'en va avait patiemment, laborieusement échafaudés. »
11 commentaires:
Ces chaises comme venues du passé, aérolithes à quatre pattes, et le lit de feuilles avec notations craquantes...
Ô ! merci pour ces bribes de lecture savoureuses... cela fait grande résonance en moi et j'aime.
Dominique m'a précédé. Vieilles chaises et table qui montrent leur fatigue et leur épuisement. Et puis il y a : « avec ce que la ville a de plus exquis et le souple sourire de la pierre »
"le souple sourire de la pierre"...
propos d'amoureuse
au regard caressant
marquant un temps de plaisir sur chaque chose.
Belle et bonne journée.
voilà qui nous sauve joliment de citadins affirmant qu'ils vont aller "battre" la campagne...
La journée est toujours agréable quand j'en passe un morceau avec brigetoun. ♥
J'aime cette crèche rustique !
Crèche si bellement rustique
Et le régal de Goffette
"Les peupliers du fond hissent la voile de grand vergue"
pour ce voyage immobile
repris cette petite lecture
des galettes en tissu fermière ? je cherche, je cherche
galettes : cousins plats - tissu fermière coton sombre ou noir à semis de petites fleurs, on ne vit pas la saleté
Quelle poésie dans ce billet !
Merci à vous :-)
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