Ne les ai pas mis, étaient
bien blonds, ou délicatement veinés, étaient pris dans le
charme du cuivre voisin, étaient naturels - oh tant -, mais chaque
millimètre de la peau de mes plantes de pied, chaque nerf, chaque
orteil était protestation angoissée.
Ne les ai pas mis,
d'ailleurs n'avais pas de raison majeure de sortir, malgré l'appel
de la lumière naissante sur la cour
suis restée, pieds parés
de noir délicat, me suis installée, me suis oubliée, avec plaisir
et sagesse (enfin presque), me suis embarquée, ai repris, après la ballade sur le
Bosphore,
http://brigetoun.blogspot.fr/2013/04/voulais-petites-notes-egrenees-verbiage.html,
un voyage au pays des lettres, images et musique d'Istamboul, ai
refait aussi le voyage distillé en terres si lointaines, si
légendaires, que, malgré leur âpreté, leur nom m'a toujours
invitée.
Alors, d'abord
Istanboul, avec le deuxième tome de Meydan la place
http://www.publie.net/fr/ebook/9782814597273
qui inclue, cette fois, des photos comme celle d'Erinç Salor
(j'espère que le rapt ci-dessus me sera pardonné), les chansons de
Şirin Soysal (écouter et lire traduction)
Plongeons dans les
nuits fraîches, dans les soirées folles
Et au bout de celles-ci
enlaçons-nous
En réalité, je suis
comme vous
Même si un peu timide
En fait ma seule
différence
Je suis étrangère
et de
Miray Kurtuluş et Tan Tunçağ (Mira)
Les eaux s’élèvent
Les vagues en moi se
déploient
Ils ont enterré un
morceau de moi dans le sable
Avant même qu’il
puisse vivre, ils l’ont tué
les
sons étant à retrouver (par un lien dans le livre, ou directement,
sur le blog ouvert en complément de ces anthologies
http://www.meydanlaplace.net
Il y a
aussi, peut-être surtout, les nouvelles et romans que vous laisse le
soin de découvrir, qui m'ont fait croire, un peu, que j'avais
contact avec la Turquie, dans sa diversité, sa proximité..
comme
chez soi de Seray Şahiner – la découverte de la vie libre
par les jeunes filles – la collocation, l'appartement qui garde air
estudiantin, et puis Sibel qui attend
Elle termine de se
vernir les ongles, secoue les mains en l’air et les observe avec
contentement. Oui, non seulement elle était une femme indépendante,
mais en plus elle savait profiter des plaisirs de la vie. Et elle ne
se contentait pas de s’occuper d’elle mais savait même se vernir
les ongles d’une couleur aussi ambitieuse que le rouge quand il le
fallait. Elle souffle sur ses ongles pour que son vernis sèche sans
que la couleur ne s’abime et
son discours intérieur.
comme,
de Mehmet Murat Somer, la rencontre, lors de funérailles, au temps
de la maturité avancée, de deux ex-garçons, des souvenirs qui
s'éveillent en Fethi
Leurs visages se font
face… Il ne voit rien d’autre que le menton serré de Hamdi, ses
lèvres tendues et ses yeux incendiaires. Il s’étonne de voir de
si près les pores de sa peau et les gouttes de sueur s’accumuler
sur son visage et son cou... et
la suite... l'importance que
cela a eu dans sa vie, son interrogation sur le souvenir qu'en a, ou
non, Hamdi
comme
le roman de deux jeunes filles de
Perihan Mağden
Behiye n’arrive plus
à pleurer depuis l’âge de sept ans et demi. Elle a pleuré pour
la dernière fois à l’âge de sept ans et demi — elle se
souvient de ce jour — pour sa mère, parce qu’elle avait pitié
de sa mère, parce qu’elle avait honte de sa mère, parce qu’elle
avait en même temps pitié et honte de sa mère elle avait pleuré
toutes les larmes de son corps. C’est depuis ce jour-là qu’elle
n’aime pas sa mère. Elle n’aime personne. Elle ne sait pas
pleurer convenablement. Pas de tout son corps.
comme
les textes de Barış Bıçakçı … Un philosophe qui
avait passé sa vie en Allemagne, aux confins de la Forêt-Noire,
dans une ville traversée par des fleuves, avec des ponts de pierre
et des bâtiments aux toits pointus, qui s’était adossé à des
arbres centenaires, qui avait caressé des velours anciens et bu des
vins millésimés dans des coupes d’argent noirci, avait déclaré
que l’homme était le temps incarné...et
Aslı Tohumcu (écouter sa voix) que j'omets par manque de place,
par choix hautement aléatoire, résultant de l'ordre de mon picorage
au hasard...
comme
la poésie de Karin Karakaşlı
Tu portes toujours sur
ton dos les âmes passées
Dieux et Déesses aussi
étaient comme toi en
vie
Leurs forces, leurs
faiblesses te traversent.
Et
puis, j'ai refait d'un trait, après le plaisir de la découverte
journalière sur http://auxileskerguelen.blogspot.fr/
(j'y ai volé la photo ci-dessus, pardon Laurent je vous demande),
j'ai refait, quelque part dans le dos de Laurent Margantin, son
voyage Aux îles Kerguelen, les bribes, lues au cours de
l'élaboration quotidienne, réunies maintenant en cinq chapitres,
dans l'eBook publié par Numeriklivres http://numeriklire.net/
(qui indique à gauche une liste de site où l'on peut se le procurer
pour la somme mirifique de 1,49 euros) – en une soixantaine de
pages, ce que sont ces îles, l'enfermement en groupe (comme pour une
campagne sur un bateau, ou même une croisière), les jeux de
pouvoir, «C'est mal vu à Kerguelen de rester à l'écart», me
dit David, qui en sait déjà plus que moi sur les mœurs locales
après deux semaines ici. Je lui réponds que c'est partout mal vu de
rester à l'écart. «Oui, mais ici c'est aussi une question de
survie», finit par lâcher David, décidément très sûr de lui..
(et un intello est moins bien vu, moins assimilable qu'un scientifique (?))
les
camaraderies qui se créent, la beauté de la nature, sa rudesse, Là
soufflait un vent glacial, on sentait que la tempête allait bientôt
reprendre, qu'elle ne nous lâcherait pas comme ça. Que c'était son
territoire partout autour. Si plat à perte de vue qu'elle pouvait se
déchaîner à son aise, sans obstacle. Partout c'était un sol
lunaire traversé de petits ruisseaux, des champs de pierre sans
végétation puis des surfaces couvertes de fleurs rouges. Et aussi
de nombreux étangs, et des trous qui puent la vase cachés souvent
par de la broussaille.
les
traces d'occupations abandonnées - Des hommes sont passés par
là, se sont lancés dans de grands projets, et tout cela a tourné
court, sans doute à cause du trop grand isolement et des conditions
de vie trop difficiles.
et
tout de même, ce qui était le but affiché, et réel, la lecture Il
faut un bon endroit pour lire. Kerguelen me paraît en être un,
coupée de tout (même s'il y a la présence du conteur secret), au
prix d'un ascétisme qui se révèle excessif, et la cabane isolée à
Molloy avec les éléphants de mer et les tapis d'azorelle -
À la table, à la lumière d'une bougie, même en pleine journée. Mais fait-il jour ou fait-il nuit, je ne saurais dire. Dans la pénombre du jour, je lis. Dans l'obscurité de la nuit, je lis aussi. Allongé sur le lit à deux pas derrière la table, je continue à lire. Sans livre, les yeux fermés et endormi, je continue à lire. Lecture plus profonde, lecture nouvelle pour moi. Je navigue à l'intérieur de ma cervelle et des phrases continuent à se déployer, multiples, mouvantes, rapides..
quelques
individus un peu hors normes, et les animaux, les animaux touchants
Mais on oublie tout cela quand on voit des bébés éléphants de
mer se frotter contre vos jambes comme des jeunes chiots, en
produisant des espèces de jappement. Ce sont les bonbons : on
les surnomme ainsi parce qu'ils sont la proie des orques qui aiment
les croquer. Ils sont vifs, aiment jouer, plonger dans l'eau
(il y a surtout peut-être la foule de manchots pondant, couvant,
parlant, en masse serrée, la manchotière – et les rennes et...)
Il y a
surtout l'oeil, l'écriture de Laurent Margantin, vivante et
classique (dans la lignée des grands auteurs qu'il aime, fréquente,
traduit le cas échéant), l'humour léger, les traces aussi de plein
de livres, en rapport plus ou moins direct, avec les îles, ou là
simplement parce qu'ils y ont été lus, ou parce que leur souvenir
vient en parlant de ce qu'est la lecture. (bon il dit ça mieux que moi)
un peu comme des biscuits assortis, limités à mes
premières lectures, à l'heure de la confiture de mure et de la
lente découverte de ce nouveau jour à vivre
http://www.tierslivre.net/krnk/spip.php?article1502
du numérique comme de l'inquiétude, dîtes-le 20 fois -
réaction/réflexion de François Bon après un débat à Metz
http://doha75.wordpress.com/2013/04/15/indetermination-de-limage-1
indétermination de l'image 1 - oui le résultat avec nos petits
appareils est parfois aléatoire, mais que les photos parisiennes de
Dominique Hasselmann donnent bien la saveur du printemps !
http://www.auxbordsdesmondes.fr/spip.php?article1386
voyage de classe - quand Isabelle Pariente-Butterlin parle de la
maîtrise de la langue, de la socialisation et la pression du groupe,
et gueule contre démission de l'école (m'immisce peut être un
peu, là)
http://apeineperdue.blogspot.fr/2013/04/terrain-de-jeu-17.html
un des terrains de jeu de d'Emmanuel Delabranche que déguste, avec
lesquels je suis presque toujours en accord, presque
et
http://christinejeanney.net/spip.php?article641
cinquante nuances de portes coulissantes qui, je crois, inaugure une
nouvelle série chez Christine Jeanney
Pour ceux qui, gentiment, passeront
ici, les verront
En attendant pardon demandé pour cette logorrhée
En attendant pardon demandé pour cette logorrhée
5 commentaires:
Des sabots ! On fabrique encore des sabots. Pour la fragilité des pieds, y mettre de la paille ou enfiler des kroumirs. Nuls besoin de se saboter pour lire, heureusement.
Voyage en boucle turque puis "îlien", la photo de mer ouvre l'espace (merci pour le lien aussi).
Les sabots flottent-ils sur l'eau ? Ils ressemblent toujours à des barques, pourtant.
A travers cette magnifique route de parfums et de mots, j'ai retenu cette phrase qui m'a happé soudainement : « Tu portes toujours sur ton dos les âmes passées ». Je suis subjugué
Lu moi aussi ce week-end l'anthologie turque de Meydan 2, et à vrai dire, non, pas lu simplement, mais dévoré, rêvé en lisant, imaginé, voyagé et remercié intérieurement à chaque étape l'initiative et l'intelligence qui ont permis ce cadeau.
Quant aux Kerguelen, je crois qu'une partie de moi y est encore (toujours ?) depuis la lecture sur le blog.
Rien que de voir le mot Istanbul..me donne l'envie d'y retourner une quatrième fois.
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