Jour de presque printemps
– jour de pas grand chose – jour de petite bagarre carcasse sans
virulence – jour où j'ai voulu m'attaquer au tas de lettres confié
par l'assemblée des soeurs.
Ouvert des enveloppes,
cherché quelques dates, attrapé des mots, ai tenté de pêcher en
moi des souvenirs... et puis, toujours, ce petit recul, cette gêne
qui me prend devant l'intimité de mes parents... cela plus un peu de
flemme, peut-être, juste un peu, parce que j'aime bien mettre mon
nez dans de vieux papiers...
ai entassé, en respectant
à peu près la chronologie (pas toujours de date, et là il faut
lire pour identifier l'époque, et constater qu'on ne le peut pas) un
peu moins du quart dans une boite que j'ai refermée avec soin.
(toujours étonnée que ma
mère ai réussi à garder, de port en port, de port en ville, de guerre en marmaille,
tout ce passé)
Mis robe grise, manteau
gris, relevé cheveux (mal, cela n'a pas tenu) et m'en suis allée,
sous un ciel d'une douceur délicate, à l'opéra,
plaisir anticipé au
coeur, persuadée qu'on ne peut totalement gommer la beauté, le
charme, la gaité du Barbier (et
puis se sont mis à plusieurs, pot commun avec l'opéra de Nantes et
celui de Massy)
Et
ce fut une salle pleine à craquer (bon pour une fois je ne
critiquerai pas), une mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia
(avec le décor de Jacques Gabel) qui faisait vivre les chanteurs,
avec malice, qui baignait dans un léger décalage farce, qui ne
gênait jamais la musique et l'action – un décor de palaccio en
construction avec des parpaings, une statue énorme pendue à une
poulie, des fenêtres coulissantes, une table devenue table
d'opération (mais curieusement l'officiant était Bartolo, avec scie
à l'appui, et non le barbier comme cela aurait dû l'être) des
perruques dignes du jardin anglais
et des musiciens en frac, de ravissantes guirlandes de fleur que l'on
accroche au dessus du clavecin.... sans que cela sorte du
contrepoint, ajoutant une petite gaieté de même tonalité que la
musique.
Une
Rosine, Karine Deshayes, un peu ronde (plus jolie dans les deux
premiers actes où elle porte une robe volante à la Watteau d'un
jaune merveilleux) mais aussi bonne actrice que chanteuse, une
distribution de belle qualité (ai spécialement aimé Franck
Leguérinel en Bartolo), et l'orchestre jouant avec bonheur sous la
direction de Roberto Fores-Veses – surtout bien entendu il y avait
Rossini.
Suis
partie toute contente, si contente que j'ai oublié le programme que
j'avais abondamment griffonné pendant l'entracte – de façon un
rien illisible heureusement.
J'avais
trouvé, juste avant de partir, une vidéo de Karine Deshaye, la
Rosine de ce soir, chantant una voce poco fa
et
puis, immortelle, au moins, la version de l'ouverture par les quatre
barbus
Faim
et sommeil.
10 commentaires:
leçon à retenir Brigitte TU DOIS fermer Paumée
FERMER PAUMEE , Pourquoi donc ? surtout pas...S'il te plaît..!
Représentation à guichets fermés.
Un plaisir ce partage comme si nous étions. Merci.
@ brigetoun : Oui, laissez ouvert, comme une séance d'opéra (pas forcément tous les jours)...
non vais continuer Paumée, cahin-caha et tant pis pour sa réception, me suis trop habituée à lui - mais je déserte complètement pour un temps "les réseaux sociaux" suis trop de mauvais poil
Bonne journée à vous tous
Heureuse de lire ici que vous continuez, le manque serait grand pour vos lecteurs. Bonne journée "hors réseau".
Et pourtant avec une fin de soirée en compagnie de Rossini, tout devrait être jubilatoire. Presqu'un opéra du printemps. Les airs fleurissent et le propos est parsemé de quiproquos. Le soleil devrait revenir, les arts devraient leur droit de cité à Avignon, les touristes devraient envahir la ville, et tout devrait revivre pour le plus grand bien de notre morale. Courage.
heureuse également de voir continuer Paumée vaille que vaille; et vive la barbe et les barbus (que je ne connaissais pas, ignare que je suis)
une question d'âge, Christine
Belles et douces écritures des lettres aux rubans rouges comme tes mots et tes incertitudes
A ne pas abandonner au fond d'un coffre
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