Suis devant Paumée, me
réveillant d'une sieste lourde, après la caresse du soleil qui
traversait l'air encore frais, venait se briser sur cette sacrée
toux profonde qui me semble venue du coeur, petite douleur, légère
angoisse qui me fait éteindre immédiatement le cigare allumé
mécaniquement, suis donc devant Paumée, quelques photos et un non
désir... (photo à six heures du soir, en l'absence du soleil,
qui avait poursuivi sa route)
Alors juste pour marquer
jours, bribes sans importance, sans signification, juste l'ordinaire
d'une vie tranquillement végétative
comme le camion que l'on
déchargeait vendredi matin (pourquoi diable l'ai-je photographié?)
comme les enfants qui
s'essayaient au handicap, aux handicaps, sur la place
la ville donne, et j'aime
ça, beaucoup d'importance au sport pour handicapés
une jolie ambiance, une
façon simple de familiariser les enfants, de gommer les différences,
et cette constatation comme chaque fois : les aveugles étaient
évoqués, mais pas les sourds, et bien entendu était totalement
absent le handicap mental, celui qui fait peur.
Grommellement navré
devant ce mot «handicapé» qui couvre tout et n'importe quoi, qui
permet de préconiser vertueusement la scolarisation de tous (serait
presque drôle) et de se croire quitte avec des plans inclinés (bien
entendu indispensables – ce n'est pas ce que veux dire)
Pour suivre les petites
notations, (qui me semblent, d'un éternuement à l'autre, vouloir se
décider à se faire torrent de mots) ai retiré du sac où ils
aidaient les piètres tomates de Carrefour à prendre un peu de
souplesse, les livres achetés sans trop réfléchir budget, parce
que peine un peu sur les contributions à propos de Benjamin, parce
que j'ai lu, à moitié, le numéro deux des Cahiers Claude Simon (il
faudrait que je parle de ma découverte très très tardive de cette
revue) choisi pour le plaisir des contributeurs à ce qui pourrait
être un tombeau pour Simon, parce que j'avais envie, l'ayant entendu
l'évoquer, de la phrase urbaine de
Jean-Christophe Bailly
page
70 :... Que l'on arrive par la porte d'Orléans, par la
porte d'Auteuil ou par la porte Dorée, ce qui se déclare aussitôt,
c'est un style, et qui tranche parfois abruptement avec la banlieue
que l'on vient de quitter. La sensation de franchir une passe et
l'effet de muraille invisible de la double ceinture sont tels que
c'est comme si quelque chose du statut de la ville médiévale
s'était malgré tout maintenu, quelle qu'ait été par ailleurs la
force de la poussée centrifuge.
parce
qu'en le cherchant (il était à villes) suis tombée sur leçons
de solfège et de piano de Pascal Quignard
page 7
(sa beauté s'énonce brièvement) … Les oeuvres de Des Forêts
et de Gracq ne sont pas si éloignées qu'il semble. C'est le même
monde. C'est la même beauté de la langue, la même perfection du
style, le même univers romantique, la même passion de l'opéra.
sur
Sylvain Tesson et Dans les forêts de Sibérie
page
71 (pas de 70 et le 71 en est, je le sens en carcasse, très proche)
Anniversaire de mon père. J'imagine leur dîner, là-bas, près
de Guise. Comme chaque année, la famille s'est retrouvée dans ces
écuries du XVIIIe siècle transformées en restaurant. Les cousins
belges, la bière, le vin, la viande et la lumière tombée des
voûtes en briques...
et
puis (vérifier si je retrouve un peu de ce très fort goût que j'ai
eu pour lui en des temps anciens, mais ses livres faisaient partie du
magma entassé dans la cave dont me suis débarrassée en quittant
Paris) Rétif de La Bretonne et La Dernière Aventure d'un homme
de quarante-cinq ans (ne connaissais que les passages
correspondants dans Monsieur Nicolas lu en très faible
partie)
page
71 (même raison, sur la page 70 est une gravure : rencontre entre
une belle et un protecteur éventuel) Hélas ! quand on a passé
l'âge d'être aimable, l'amour n'est plus un plaisir, c'est un
tourment. Temps heureux de ma jeunesse où mon âme ouverte à
l'espoir trouvait un charme jusque dans ses peines !
Broutille,
encore, de ces jours, la saleté de l'argenterie devenue assez
insupportable pour que passe une bonne demie-heure, ou plus,
acharnée, à la «ravoir» n'abandonnant, exaspérée qu'après les
ciselures du plateau de cuivre imparfaitement débarrassées de leur
oxyde noir, comme depuis toujours... depuis que m'y attache.. et puis, pendant deux fois plus de temps, nettoyage maniaque, régulier, répété, des
mains pour que ne subsiste plus trace noirâtre, plus aucun souvenir
de cette affreuse odeur... (j'aime bien regarder cette photo pour
mesurer le travail fait)
Petites
lectures, sieste – l'ai dit – nada... un nada démesuré ma foi,
pardon..
mais
rien pour les deux textes auxquels je songe.
Et la
pluie, fine et douce, est arrivée quand suis sortie pour arroser..
lui ai souri.
6 commentaires:
Beau petit train-train d'une tousseuse ensuquée. J'ai grand plaisir à parcourir cette chronique de l'ordinaire traitée extraordinairement, depuis mon petit café Internet sis au nord de Montréal.
Ah oui, "ravoir" de l'argenterie : vous avez "réu" ce verbe...
Jean-Christophe Bailly : j'ai vécu un temps près de la porte Dorée (avenue du général Michel-Bizot), à l'époque du musée des Arts océaniens. Il y avait bien cette barrière invisible.
Quant au camion de livraison de boissons, comment ne pas admirer toujours l'ingéniosité de l'ouverture latérale ?
"Ravoir". Ravi de retrouver ce mot "de grand-mère" (pardon) souvent entendu dans mon enfance. Le Littré m'autorise à l'utiliser pronominalement pour penser que je commence très lentement à me ravoir. J'en suis bien aise et envoie mon sourire à votre adresse.
Ravoir. À conjuguer à tous les temps. Un verbe de ma grand-mère, de parfait français. Ravi de l'avoir réu ce matin en lisant cette note.
Tant de chose à "ravoir" sourire sur ce mot-souvenir
Et pour une "ensuquée" quel courage d'astiquer ainsi ( bonne idée , la photo )
Passée au large de ton Pont !! dans un froid de loup à rendre jaloux Tesson dans ses forêts
Pourquoi tu tousses ? comme disait Fernand Raynaud
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