Or doncques, ai cheminé
trop vite, poussée, fouettée, déportée, renvoyée par le vent à
chaque carrefour, regardais ma montre, avais honte d'avoir déserté,
rêvais d'un long ennui dans l'opéra en attendant l'heure, et puis
au coin de la rue Peyrolerie je me suis souvenue que j'avais lu que
la façade était, jusqu'à Noël, illuminée, faisait l'objet d'un
son et lumières sans son, et j'ai louvoyé jusqu'à l'appui du mur
des maisons qui lui font face pour, au coeur d'un petit groupe gelé
et heureux comme des enfants, admirer une partie, celle qui concerne
le temps des papes (je ne sais ce qui suit) et tenter de capter, un gant
coincé entre mes dents entrechoquées – pourtant pour vous suis
pas certaine qu'auriez trouvé ce froid si grand -, les images en perpétuel mouvement,
avant de renoncer et
naviguer en loffant au plus près vers l'opéra...
Ai gardé les moins
tremblées, détruisant les autres avec une bonne partie de celles de
la réunion précédente, au tiède, sur mon strapontin des deuxièmes
galeries (devrais toujours monter là, pour mon budget et surtout
pour l'ambiance à la fois détendue, aimable et concernée par la
musique) en attendant le début du concert.
Concert, dirigé par
Samuel Jean, tout de rondeur aimable et efficace, qui portait comme
titre la voix du romantisme,
que j'ai écouté avec grand plaisir, qui fut découvertes pour moi,
sauf la dernière oeuvre, puisque c'est une musique que dédaignais,
qui correspondait peut-être à ma descente en sénilité, ou au
travail que fait en moi lentement l'acclimatation au goût des
avignonnais qui m'a déjà habituée à chercher du plaisir dans les
opéras de Donizetti (vraiment) Puccini (passablement) Massenet,
Gounod ou Bellini (un peu moins), ou à ma fatigue grande et à mon
désir d'être «bien», concert pour lequel n'ai guère de mots à
ma disposition dans mon état léthargique, concert qui comprenait
- la musique de Fauré pour les représentations en Angleterre de Pelléas et Mélisande de Maeterlink, délicate comme une chanson dans un paysage où traînent des écharpes de brume
- le concerto pour harpe et orchestre d'Henriette Renié – entrée tout dret, tout souriant, tout sûr de son talent mais aussi de son charme de «belle gueule» du soliste Emmanuel Ceysson – une musique sans brusquerie dans les contrastes, avec un grand souci du charme, mais aussi une belle fermeté classique, et chez Brigetoun une certaine admiration et une non moins certaine tendance à l'indifférence attentive
et,
après l'entracte
- la plus belle découverte pour moi avec la fantaisie pour harpe et orchestre de Théodore Dubois, compositeur totalement inconnu de moi (aveu), qui connut semble-t-il un beau succès en son temps (prix de Rome en 1861, mort en 1924) ce qui n'est pas forcément toujours une tare même pour cette époque. Même si je fais la grimace en lisant ce que je trouve sur lui, même s'il représentait l'art officiel, même si en effet il était hostile à la musique moderne, même si son départ en 1905 du Conservatoire qu'il dirigeait depuis 1896 coïncide avec le dernier échec de Ravel au prix de Rome, ce qui a sans doute pesé sur le souvenir qu'il a laissé, il a pu, borné ou non, composer de belles choses et j'ai aimé cette oeuvre, dès l'ouverture par le cor qui passe le relais à la harpe, la simplicité et la force du charme qui s'en dégage (ou cela correspondait peut-être à mon état)
- et puis le grand plaisir d'une très bonne exécution de la symphonie n°2 de Saint-Saens que j'aime et qui je crois a fortement joué sur le souvenir agréable que j'ai eu de cette soirée.
Je n'ai pas trouvé de
vidéo de la fantaisie de Dubois
pour Emmanuel Ceysson
d'assez nombreuses, dont celle-ci (une fantaisie de Marcel Granjany
sur un thème de Haydn) qui date d'un peu plus d'un an
un an
auparavant, à Munich, l'andante du conerto de Reinhold Glière
et le premier
des bis qu'il nous a offert, une châtelaine en sa tour de
Fauré, romantissiste
et
j'ai trouvé sur son site, ce samedi après midi en préparant ceci, cloîtrée dans une ville ventée, une photo où il surjoue, avec un gros peu de sincérité qui
requiert un sourire indulgent de grand-mère, le «beau gosse», et surtout un enregistrement
d'un passage de la fantaisie de Dubois (15 minutes en actionnant la
flèche) http://www.emmanuelceysson.com/fr/repertoire/concerto
12 commentaires:
Tant qu'ils n'ont pas encore utilisé la façade du palais des Papes comme support publicitaire, il y a de l'espoir !
Dubois, connais pas (Ceysson, non plus)...
ben moi non plus mais heureusement surprise (ou ça correspondait à mon état du moment)
La harpe me transporte toujours et le "beau gosse" charmant comme les illuminations réussies
Bravo pour tes images qui se complètent
une découverte aussi (mais je dois faire effort, la harpe n'est pas ma tasse de thé) (ce qui est logique, car boire d thé dans une harpe n'est pas commode) (ça doit dégouliner partout, je pense :-))
oh Christine, merci pour ce rire (et moi aussi normalement ce n'est pas ma tasse de thé)
ce rire qui me lance dans le jour (après que sois allée lire la suite des obliques sur http://christinejeanney.net/
L'interprète porte sur son visage la beauté de la musique qu'il joue.La musique illumine celui qui la porte.
Merci pou les photos de cette façade joliment illuminée.
Mais, il a un air d'Elvis, on dirait !
moins la gomina de la mèche, tout de même
je ne suis pas fan de ces projections de façades ...spectacle de façade c'est le cas de le dire
Si ces projections sont éphémères je veux bien. Elles pourraient permettre un certain rehaussement du patrimoine architectural en attirant des regards jusque là indifférents. Pourquoi pas, n'est-ce pas?
surtout c'est en accord avec les chalets et le désir de nous le bon peuple de rêver, fût-ce à bon compte, au choeur de l'hiver (qu'importe le bon goût)
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