Réveil - réaliser que le
mois de décembre va vers sa fin bousculée en décidant de la date
d'un mini-voyage à Toulon – penser vases communicants – penser
premières lignes jetées et les mots pour un ciel de pierre bleue –
vaquer, dans la difficulté de penser lumière et voir que le ciel
est d'un blanc mollement terne au dessus de la cour.
Enfiler parka, empoigner
sac de linge et sortir.
L'escalier semblait
s'enfoncer plus que jamais et je me suis, comme toujours, arrêtée
un instant pour commander fermeté à mes jambes tremblantes dans
l'appréhension d'une chute me précipitant en désordre vers la
porte.
Et m'en suis allée, sous
un ciel absent, dans une douceur molle, dans une quiétude souriante
avec absence, un peu sereine, un peu autre part, multipliant les
petites étourderies sans conséquence, dans la ville où seules
tranchaient les lumières, brouillées par mon avancée, des petits
sapins ostensiblement faux, alors que le mat dressé au centre de la
place de l'horloge noyait dans l'indécis ses branches de guirlandes
en leur version diurne.
Journée floue, digérer,
lire avec distance pendant que la nuit nous venait vers midi, que la
pluie prenait un air d'éternité, et puis s'asseoir près des poètes
dans un panier près du sol, et cueillir quelques pluies, autres,
toutes autres que notre humidité calme sur les pierres, les tuiles
et les dalles.
quelques
plumes éparpillées
au pied
d'une barrière de paille
c'est l'eau
rendue aux roseaux neufs
par
l'entêtement de la pluie (Jaccottet)
Et le nuage,
grandissant, descendait
Vers les
grèves, si bien qu'un de ses bords
Allait
toucher les monts, l'autre la mer.
Toute chose
enfin prise dans l'aveugle obscurité,
On entendait
déjà frémir la pluie
Et ce bruit
augmentait avec l'approche du nuage. (Léopardi
– traduction Philippe Jaccottet)
Écoute un
peu tomber la pluie. Ces mots gouttent sur la vitre. Ils ne cachent
pas, ne montrent pas, ils brouillent un peu le paysage. Ils répètent
nos yeux pleins de larmes. La pluie qui nous coule au-dedans.
L'averse douce et très intime, par où le regard s'ouvre puis se
referme à la lumière. (Jean-Michel
Maulpoix)
Tombe,mais
douce pluie, sur le visage,
Éteins,
mais lentement, le très pauvre chaleil (Yves
Bonnefoy)
Il faut
aimer l'eau qui s'écroule
et submerge
le sol
l'emprisonnant
dans une gaine liquide
Les plantes
pourrissent lentement dans ce désert de nacre
froides
parois qui embrassent leurs rameaux
et ceux-ci
se colorent de reflets d'incendies et de sacres corrompus par cette
langue très mobile
dont la
moiteur augmente le nombre que j'ignore
mesure des
avatars des choses et de leurs longues vicissitudes (Michel
Leiris)
S'ils ont
besoin d'eau, ils ne laissent pas un nuage en l'air sans en tirer de
la pluie. Je l'ai vu faire plus d'une fois. N'y aurait-il même aucun
nuage en vue, pourvu qu'il existe une suffisante humidité dans
l'atmosphère, ils vous font bien vite apparaître un petit nuage, tr!s
clair d'abord, presque transparent, qui devient ensuite moins clair,
puis moins clair encore, puis blanc, puis d'un blanc lourd et
rondelet, enfin gris, et vous le feront alors dégorger son eau sur
le pré ou sur le verger qu'ils tenaient à arroser (Henri
Michaux)
Quant
à ces deux là, qui n'étaient pas, à ma connaissance poètes, mais que j'avais rencontrés avant de redescendre vers l'antre, ils étaient trop discrets, ou j'étais trop occupée
par mes projets pour saisir ce qu'ils se disaient peut-être.
12 commentaires:
Merveille de vous suivre sous cette pluie et d'écouter votre voix se mêler aux leurs, en regardant les pierres luisantes.
très beau, Brigitte (ainsi que vos choix de textes)
Conciliabule entre deux gouttes de pluie...
Bien vu !ainsi que les gâteaux de pierres!! style croquants
Attention tout glisse sur les pavés luisants, même et surtout pour les poètes
Pluie jolie, temps plus flou que les photos, votre promenade est fluide...
Que c'est beau (et les petites pierres, houla :-))
les sols avignonnais sont très pointus ou trop lisses - la marche est une occupation qui ne se fait pas oublier
Une rampe ! Il faut absolument faire placer une rampe !
pas assez large - ce qui permet d'ailleurs (et ne m'en prive pas) de s'appuyer aux murs
Il a plu à Avignon. Et les photos me semblent le bien illustrer. Et cette sélection de poèmes variés fait de cette rubrique à nouveau un rendez-vous qui élève l'esprit.
Une corde de rappel : monter descendre à défaut d'une nacelle.
Sol glissant par temps de pluie. Décidemment, la ville n'est pas facile.
pauvres de nous !
enfin il a une qualité cet escalier - il est court
deux vélos en conversation...fier l'un deux s’apprête à faire la roue
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