cardigan de gros coton sur
la chemise de nuit, jambes frissonnantes, me sentais vieille et
seule, suis sortie saluer les trois boutons de rose pieds nus sur les
dalles froides sous un ciel d'opale
et puis j'ai souri avec
espoir un peu suspicieux au jour..
je vais maintenant, plus
encore que ces derniers temps, égoïstement (me privant
provisoirement aussi) n'être qu'à sens unique sur internet, et amis
qui passeraient ici ne vous lirai plus.. compte vous retrouver
ensuite
ai sucé avec conviction
une pastille anti-rhume-des-foins (les pollens sont vraiment cette
année pleins d'une insistante malveillance), dopé carcasse et m'en
suis allée vers le théâtre des Halles, dans les rues avec oeil flottant avec indifférence sur les affiches, sauf ces deux discrètement
anonymes contre le ciel absent
et arrivée chez Timar
avec les premiers rayons de soleil, pris trois billet dont un pour le
temps suspendu de Thuram aujourd'hui
à onze heures, et deux pour des spectacles dans les jours à
venir
attente
dans le calme du jardin,
ai
cru un moment que je serai seule spectatrice (ai plaisanté un moment
avec Dominik Bernard, je crois, l'acteur qui m'a ouvert la porte, me
disant, et l'étant, intimidée par ce rôle de public à moi toute
seule), mais peu à peu nous sommes arrivés, pour ce premier
spectacle de l'été, à une dizaine (et comme la chapelle est
minuscule cela faisait presque un bon gros public)
une
mise en scène et scénographie de Timar d'après Véronique Kanor,
jouée par Dominik Bernard et Ricky Tribord
C’est la figure du
footballeur Lilian Thuram qui sert de fil conducteur à cette pièce
pour questionner et explorer notre rapport à la célébrité, à
l’image et aux médias. À travers le regard de deux hommes,
celui d’une star de foot et celui d’un illustre inconnu, un
« looser », se posent des questions existentielles :
« Qui suis-je ? » et « Qui es-tu vraiment ? ».
N’est-on « quelqu’un » que par le prisme de la
célébrité forgée par les médias ? La pièce, construite comme un
thriller, tient en haleine, avec du rythme, du suspens, des
rebondissements…
Dominik
Bernard est Eugène, qui a enlevé Lilian Thuram (Ricky Tribord,
pendant un long moment ficelé, bâillonné sur un fauteuil), sous
prétexte de l'enrôler comme associé, porte parole de sa vérité :
nous sommes dans des cases où nous mettent les décisions, les
désirs des autres, notre moi n'est pas le vrai.. voix chaude ou
aigue, un jeu qui déraille volontairement, en équilibre sur la
folie...
Un
beau spectacle, aimé, vraiment, malgré la carcasse qui se
réveillait comme la veille (aimerais sortir de ce cycle..) et dont
je tentais de calmer le désir de fuite.
Retour,
un peu flageolant et tétanique au début, puis de plus en plus ferme,
dans les rues qui commencent lentement à s'animer (mais avec
beaucoup moins de monde que d'habitude, cela va peut être venir) –
cuisine un peu longuette, déjeuner, roupillon avec calmant en
pensant à l'épreuve Aubanel
court
sieston, se changer (envie de jupe et de manches très courtes, tant
pis pour les bras flasques de la vieillarde), départ pas très
flambante, en belle mais non excessive chaleur
regretter
un peu ce bleu tournant à l'incandescence, et entreprendre la longue
attente sur la rampe d'Aubanel, dans les premiers, à l'abri, meubler
pour ne pas laisser le malaise habituel s'installer avec photos,
quelques mots sans intérêt échangés, et quelques pages de sur
l'image qui manque à nos jours de Quignard
s'installer
devant, près de la sortie, découvrir que les deux heures - ce que je
croyais avoir lu - étaient en fait deux heures et demi, et apprendre
par un tee-shirt rouge que c'est devenu deux heures 45, faire rapide
calcul et constater que devrai partir un peu avant la fin pour
prendre billet du soir chez moi, arroser, me refaire, à l'allure
d'un express, un esprit vide...
aimer
le grand plateau, les éléments de décor, l'amorce de symétrie..
c'était
The Humans d'Alexandre Singh, sa première pièce, commande de
Witte de With, centre d'art contemporain à Rotterdam, qui a été
jouée à Rotterdam et New York
sur
le programme
Une île, surgie du
néant, est gouvernée par deux puissances : l'une, apollinienne,
incarnée par le sculpteur Charles Ray, l'autre, dionysiaque, par N.
le lapin Nesquik®. Les enfants respectifs de ces deux esprits,
Tophole et Pantalingua, entravent – sans toutefois l'empêcher –
l'avènement de l'humanité. The Humans oscille entre cosmogonie
antique et farce grotesque. Dans le sillage du théâtre
d'Aristophane, modèle pour Alexandre Singh, l'auteur metteur en
scène entremêle les motifs et les références : clins d'oeil à
Shakespeare, Mozart ou Woody Allen, à la philosophie de Nietzsche et
à la culture télévisuelle... Il recourt à toutes les techniques
de la scène pour cette oeuvre totale ; musique grégorienne, danse
baroque, postures antiques dialoguent et transcendent courants et
styles. Nous assistons à une fable initiatique, proche des histoires
de Pinocchio ou du robot Wall-E®, où les statues, tout juste
animées, font l'épreuve de l'absurde et du tragique liés à leur
nouvelle condition humain
et
j'avais noté dans un entretien, sur le site du festival, comme la
photo ci-dessous, ces phrases de Singh
J’appréhende
la création théâtrale un peu comme Pierre et le Loup, avec un
instrument pour chaque personnage ou chaque ligne dramatique. Cela
est sans doute lié à ma passion pour l’opéra. La dichotomie
sur laquelle est fondée The Humans est celle qui structure aussi
des œuvres comme La Flûte enchantée ou La Tempête. Il s’agit
de jouer sur les oppositions masculin/féminin,
rationnel/irrationnel, connaissance/folie, pour faire naître une
forme inattendue.
….Je ne me suis en
effet pas privé de jouer avec des références: commedia
dell’arte, Woody Allen, théâtre grec, Molière, Mozart,
Shakespeare, kabuki, etc. Ce spectacle est un peu comme un gâteau
préparé avec tout ce que j’adore. Il est aussi intrinsèquement
lié aux inspirations de la pièce, telles que le théâtre
d’Aristophane qui est un art du trop: trop de blagues – souvent
très vulgaires – trop de masques, trop de danse, trop de chants.
J’aime passionnément ce théâtre fantasmagorique et excessif.
Je revendique ce maximalisme visuel, narratif, musical et
linguistique. Et même si ce n’est pas un théâtre très
intellectuel, les niveaux de langage sont multiples et riches.
J’imagine que c’est lié à mon tempérament: je me pose moins
souvent la question «pourquoi faire cela?» que «pourquoi ne pas le
faire?».
Photo
provenant du site du festival
Et
ma foi il y a tout ça, plus ou moins, plutôt plus que moins, et une
Brigetoun perplexe. Ai eu des moments de plaisir, devant l'esthétisme
extrême, le métier de la troupe, la façon dont toutes les
références aux musiques antérieures deviennent comédie musicale un peu Broadway,
l'union de philosophie et de scatologie, les costumes (les culottes
bouffantes en lin grège de Tophole, comme celles d'un Henri II
baroudeur en vacances, avec de grandes poches pratiques sur le
bouffant... etc...) et j'ai fortement baillé par moment... jouait
aussi le statisme de la salle, moi y compris, qui recevait avec un
calme appliqué et un rien morne les saillies de la jeune
intellectuelle prolixe (à vrai dire difficiles à suivre pour qui
n'était pas très américain-langue-maternelle, et traduites sur des
panneaux de chaque côté de la scène, au prix d'une gymnastique
incessante des yeux) – des départs dès la première heure, me
suis trouvée sans voisins, ayant attrapé sans doute un peu de leur
ennui (c'est très contagieux) et tant pis pour toutes les notes
prises, j'en reste là... juste perplexe, un peu navrée de ce qui me
semble une inadéquation entre spectacle et nous le public de cet
après midi
retour
aussi rapide que possible, noté ceci pendant cuisson patates, pris
petit veston pour l'éventuelle fraîcheur de la nuit, arrosé, et
suis repartie, en attente grande, ne sais trop pourquoi,
le
long de Joseph Vernet, des Lices... qui s'animent sans que ce soit
encore la foule.. vers le Lycée Saint Joseph, l'attente,
la
cour, et coup
fatal d'Alain
Platel, sur une idée de Serge
Kakudji (contre-ténor) et Paul Kerstens, une musique de Fabrizio
Cassol et Rodriguez Vangama à partir du répertoire baroque, avec le
soutien du théâtre KVS de Bruxelles...
parce qu'Alain Platel,
parce que le mélange de musiques, parce que les musiciens congolais,
le long travail en commun, la qualité grande et l'évidence, parce
qu'Alain Platel dit J’ai aujourd’hui la
conviction que l’on peut se rebeller, faire preuve de subversion,
non pas en racontant l’objet de sa rébellion mais en rendant
compte d’une joie de vivre qui résiste à la misère et qui
semble nous faire défaut ici, en Europe.
photos du site du
festival
parce
la joie devant le rideau de douilles (une idée du décorateur - Ce
décor a bien entendu une connotation politique mais je ne souhaite
pas en faire un message dit
Platel), l'allégresse de la musique.. la voix puissante de Serge
Kakudji, les moments où les autres écoutent simplement et où
Monteverdi monte avec le lamento d'Eurydice, les moments où ils
soutiennent, où les musiques se mélangent, la danse époustouflante
d'un des joueurs de likembe, les deux chanteurs/danseurs Bule
Mpanya et Russell Tshiebua prenant en charge le charme, la malice,
la joie mais aussi la douleur et l'abandon de soi...
public enthousiaste et les
vingt minutes supplémentaires par rapport aux prévisions passant
sans que l'on s'en aperçoive
retour à travers des
restes de vitalité. Molière en soutien.
8 commentaires:
Paumée fait des caprices avec caractères - tant pis, trop fatiguée - restera ainsi
Un grand merci pour vos partages, quel plaisir de vous suivre, je n'avais jamais vu le Festival d'aussi près !
Merci beaucoup c'est comme si j'y étais et cela fait tant de bien d'y être ... et croiser Molière en soutien que du bonheur ...
Cela semble bien parti...
On vous suit avec plaisir !...
tente ce matin de dompter carcasse (parce que vraiment pénible hier, elle est la pire intermittente)
Un peu triste Venise, non ?
ô non de très bons moments tout de même !
Tu commences fort!!! avec talent pour dénicher le bon spectacle
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