ouvrir la porte sur un
ciel de gros champignons blancs et gris entre lesquels se risque une
lumière gaiment bleue, et s'en aller dans la ville
sortir de chez le
teinturier, mule à la charge mal répartie, jambes se prenant dans
sac de draps qui se bagarre avec sac-porte-cadeau-à-poster et le
manteau et les pantalons glissant dans leur plastique sur mon bras,
l'autre sac, le principal, le riche, chutant de mon épaule chaque
fois que je tente remise en ordre et chapeau ayant des idées
d'indépendance... penser layette, un peu découragée par trajet en
ces conditions et trouver sur mon chemin une petite vache
dégingandée, absurdement laide et charmante qui servira de premier
salut...
passer à la poste –
plaisanter et devoir recommencer les paperasses parce que suis en
plein numéro petite vieille fofolle
arriver sur la place, se
repaître du feuillage qui mousse roux dans la lumière, penser ocre,
penser canadienne, jurer, repartir vers la poste, récupérer
l'oubliée ainsi que les pantalons... regagner l'antre
NE PLUS RIEN
FAIRE ou presque ou que du pas utile...
et me borner à reprendre
la dernière étape du voyage fictif aux Pays Bas pour les cosaques
http://lescosaquesdesfrontieres.com
Ce serait –
10 – couchée au bord de l'eau
Ce serait lassitude.
Ce serait, comme pour tout
amoureux des villes, une soudaine envie d'absence, de retraite, un
rêve de campagne irréelle, calme et douce.
Ce serait à Amsterdam.
Ce serait, m'asseoir
précautionneusement, lissant mon manteau sous moi, jambes allongées
rigidement, pieds dressés, sur l'herbe qui m'attirait, là, au bout
de ma marche dans la ville, de ma flânerie un peu vide dans les
allées du Vondelpark, vers la fin de celle qui borde souplement le
petit lac.
Ce serait la douceur du
tapis vert, ses reflets jaunes, ce serait tâter la terre dans une de
ses brèches, ou usures, à côté de moi, ce serait jouer avec trois
minuscules cailloux en regardant l'eau sombre, ce seraient les
plantes y trempant leur tronc, leurs branches, en face de moi, ce
serait ignorer, de moins en moins crispée, les enfants, les vélos,
qui passent dans mon dos.
Ce serait regarder le
ciel, son bleu doux, tenter de saisir le mouvement imperceptible des
fins nuages.
Ce serait basculer, ce
serait, à plat-dos, perdre mes yeux jusqu'à les fermer, dans la
lumière fine de l'après-midi qui s'en va finir.
Ce serait un soupir de
souvenir qui monte, indistinct, des images passées sans doute.
Ce serait me réveiller et
sentir que je pleure, me redresser, voir une petite bouille ronde,
deux yeux ronds, une bouche ronde, une peau rose.
Ce serait lui sourire,
secouer un peu la tête – ce seraient les sourcils, les joues qui
se plissent, hésitant à la peur.
Ce serait faire une
grimace, ce serait recevoir un sourire timide.
Ce serait la voix d'une
mère, ce serait espérer que les larmes stupides, venues d'un je ne
sais où, je ne veux pas le chercher, ne sont pas visibles.
Ce serait dire que mais
non, il ne dérange pas la dame (en réponse à une phrase que je
croirais deviner, avec l'espoir que le sens de ces mots
incompréhensibles passe dans ma voix) ... me lever aussi dignement
que le peux, rapprendre aux jambes le mouvement, aussi net et dégagé
que le pourrais, souhaiter une bonne fin d'après-midi, ne pas
comprendre ce que dit la petite voix, m'éloigner.
6 commentaires:
Les voyages fictifs sont parfois exempts de toute déception...
sauf si on en décide ainsi … ce qui ne compte pas
et ce sont aussi les moins fatigants
De la pure poésie Chère " vieille Dame QUI NE VEUT PLUS RIEN FAIRE"
ouille ! merci
...ce sera voir les rues se faire enguirlander
avec la discrétion de bon ton de mon quartier
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