Pendant que le vent se
lance sur les plaines du nord, fouette les Alpes et dégringole sur
le Roussillon, le mistral vexé s'absente, presque, et n'y avait ce
matin que le bruit des masses et de la scie attaquant la pierre pour
peupler ma cour, flottant depuis le toit terrasse de la maison qui me
sépare des remparts. Me suis ruée pour voir, agacée à l'idée
qu'il me faudrait à nouveau, comme hier après midi, attendre qu'ils
aient fini leur petit bombardement (ne sortez pas c'est dangereux)
pour nettoyer, descendre, jeter... et me suis trouvée face à deux
grandes plaques métalliques coincées pour faire bouclier, bénis
soient-ils, plaques qui se sont retirées, en même temps que le
silence s'installait, le temps de ma douche.
En écoutant l'émission
bricolée par le personnel de Radio-France
http://www.sonsdechaquejour.com/la-bas-ils-y-sont-a-la-radio/
(lien trouvé par l'intermédiaire d'Eric Schulthess) me revenait le
souvenir - suis d'humeur vieille nostalgique, ah de mon temps vous
savez...- le France Culture qui sous-tendait mon travail autrefois,
bruit de fond sur lequel se tissait mon attention aux problèmes
prosaïques, parfois sordides, de la gérance des immeubles, avec des
moments où la mécanique de ma tâche me permettait de laisser les
sons, les voix prendre toute la place, le France Culture d'avant le
ministère de Toubon, quand ils pouvaient se permettre de pousser
très loin le dédain des théories sur la durée d'attention des
auditeurs et ne pas se soucier prioritairement de s'appliquer à
piquer l'intérêt des éventuels nouveaux auditeurs, parce que les
jeunes de maintenant... - ce mépris attentionné. -, et je cherchais
en vain dans ma mémoire, jusqu'à me décider à consulter
Wikipedia, le nom de ce débat quotidien, à l'heure du déjeuner ce
qui me permettait de l'écouter en croquant des feuilles de romaine
et dessinant sur mon écran, débat que j'écoutais avec le plaisir
d'apprendre, d'éveiller mon pauvre esprit ignorant, et l'ai trouvé
– plaisir que les moins de quarante ans ne peuvent pas connaître..
Je me souviens donc du
Panorama, entre 1968
et 1988, et de la multitude des voix que j'y découvrais, de la
vivacité des échanges, du plaisir souvent de ne pas comprendre de
quoi ils parlaient
http://fr.wikipedia.org/wiki/Panorama_(émission_radiophonique)
Je me souviens des
Décraqués qui, un temps, venaient à la suite et étaient
une courte version quotidienne des Papous dans la tête
Je me souviens, bien sûr,
de Yann Paranthoën, quand la radio était musique et poème, de
Lulu, des poseurs d'ardoises, de l'effrai, de questions
pour Lesconil etc..
Je me souviens de Thomas
Baumgarter et de ses Passagers de la nuit
et bien sûr des Nuits
Magnétiques d'Alain Veinstein, de Laure Adler, de Colette
Felous, et puis plus tard toujours des entretiens nocturnes d'Alain
Veinstein, et du deuil qui ne se fait pas depuis que l'émission a
été supprimée, quand le soin et le silence intelligent attiraient
la parole de l'invité, hors de tout formatage.
Je me souviens que les
Nuits magnétiques firent place à Surpris par la nuit
et que ce fut toujours le même bonheur d'écouter pendant que se
détendaient les muscles, que les soucis reculaient, attendant le
réveil.
Je me souviens de Poésie
interrompue de Claude Royet
Journoud.
Je me souviens
surtout de la rêverie qui s'appuyait sur quelques mots saisis au
passage dans Les vivants et les dieux de
Claude Mettra.
Je
me souviens des Matins de France Culture qui
mettaient à notre emploi du temps selon les jours de la semaine la
littérature, la science.., l'histoire avec les lundis de
l'histoire avec Jacques Le
Goff.. en prenant son temps.
Je
me souviens de ce trésor qu'était la voix des métiers
d'Emmanuel Davidenkoff.
Je
me souviens de Jean-Christophe Averty et de ses Cinglés du
music-hall.
Je me souviens de Lucien
Attoun mais surtout pour Avignon, les Pénitents Blancs, de Jean de
Beer, de Michel Cazenave, de Gilles Lapouge, de Bertrand Jérôme..
d'autres mais dont je ne peux dire je me souviens puisqu'ils n'ont
pas quitté la chaîne.
Je me souviens enfin, et
peut être surtout, de ces après-midi du samedi, seule dans mon
bureau et sans doute dans l'immeuble, et des trois heures du Bon
Plaisir qui pouvaient être
enchantement, amusement, agacement non sans intérêt, découverte,
selon l'invité et ses amis.
15 commentaires:
J'écoutais les "Passagers de la nuit" avec une petite radio dissimulée sous mon oreiller... Et les Papous dans la tête, sont une plaisir jubilatoire autour de la langue française , et tant d!autres !
Merci de nous les rappeler :-)
...quand donc ces médias ont-ils cessé de nous apporter la connaissance pour ne plus que nous distraire et soustraire à toute réflexion... impression que j'ai d'une intention sous-jacente d'abrutissement du public tendant à créer la civilisation du "greg-ère"
Ce France Culture là, et toutes ses nuits, où l'on se sentait devenir intelligent : le gâchis au nom de la rentabilité et de la démagogie.
Heureusement, l'ex-président de l'INA, qui laissera une trace de palissandre dans l'Histoire, a dû en faire conserver quelques joyaux...
trouvé un lien sur Wikipedia pour les dits joyaux mais faut 1) s'inscrire 2) se déplacer pour soir accès
et j'ai jeté les cassettes (à un moment on s'en échangeait, ce que d'ailleurs je n'ai jamais fait, mais j'enregistrais, comme les postants de maintenant)
Une fantastique balade dans "memory lane"... ça a existé donc c'est encore possible...on veut y croire.
Merci à vous.
Bonjour,
Jolis souvenirs. Quelques dates mériteraient d'être "précisées" ;-)
Écoutez cette très belle histoire de cassettes époque Pierre Descargues
http://radiofanch.blogspot.fr/2012/03/pierre-descargues-les-cassettes-une_05.html
Merci à Eric Schulthess d'avoir eu l'œil
;-)
Que si que si !!! et je prenais des notes... ai retrouvé un gros classeur
Fañch merci pour le lien
Arlette plus organisée que moi
Moi tout pareil,
peut-être ajouterais-je
Jean Lebrun,
un seul invité dans la plage du matin, et parfois déjà Emmanuel Laurentin, et on en sortait ressourcé avant de partir travailler
Vos souvenirs à toutes sont tendres et émouvants. Je suis "preneur" des infos d'Arlette. Et vous invite d'ores et déjà à nous rencontrer fin janvier 2016 au festival Longueur d'Ondes à Brest. J'y anime "La République des auditeurs" et aimerais compter sur votre mémoire.
C'est parti ;-)
On ne parle sur France Culture: dommage; on ne parle plus sur France Musique : tant mieux. Mais Radio France est dans une ornière et tout le monde s'en fout.
j'écoute avec ravissement la voix de Monsieur Escartelle et émotion son histoire
mais pour Brest c'est pas parti du tout
suis animal sédentaire, très
et n'avais déjà qu'une mémoire à gros trous à trente ans, alors comme j'en ai presque 73...
Pierre pas tout le monde, peux te dire que sur tweeter on en parle
Merci Brigitte,
La première auditrice de "La République des auditeurs" avait aussi votre âge et nous a parlé de Yann Paranthoën et des ondes courtes ;-)
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