Sur la ville ce matin,
lumière franche, et chaleur aimable, sans excès, dans la ville des
shorts, des débardeurs, des chemises, de plus ou moins belle tenue, et quelques robes fraîches.
Profiter du soleil jusqu'à
ce que le dernier rayon déserte la cour et puis tenter de
m'appliquer, de tenir compte des indications de tous les liens
figurant dans la sixième proposition, juste avant, tout juste, de
François Bon pour l'atelier d'été
http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article4213 (allez lire, il n'y a pour le moment que cinq contributions, et qui le méritent). Bien entendu me suis lancée trop vite dans le premier, l'oubliant en
cours de route, submergée par un flot un peu flasque, revenant pour
tenter d'introduire la dernière des consignes... et pour cette
piètre chose j'avais mis tant de temps que ne pouvais plus en juger,
alors tant pis l'ai envoyée, et tant pis la reproduis ici
Une table, triangulaire
pour tenir moins de place sur la terrasse du glacier, un verre d'eau
et une coupe où commence à fondre une glace à la poire - il
suffisait de quelques cuillères pour ré-inventer l'enfance à
partir d'un nom, du souvenir d'un pâtissier sans doute disparu –
et au delà de la rainure qui marque la limite autorisée pour la
terrasse, la large surface de ciment où de semblables rainures, mais
non rectilignes cette fois, dessinent l'image d'un opus-incertum
avant la bande qui file, tout droit, le long du quai, découpée en
rectangles, pour une marche-jeu un peu plus risquée que celle que
l'on s'amuse à faire au bord d'un trottoir, et brusquement ce qui
s'impose, le bleu strié de la mer, le jeu des nuances, la lumière
qui décolore cet incessant plissé en s'éloignant vers le feston
bleu-vert-gris, très lointain, de Saint-Mandrier avançant pour
fermer la rade. Cet horizon qui coupe l'angle créé par les deux
obliques partant de part et d'autre de cette petite zone de mer libre
devant les tables. A droite, en plan moyen, un ponton – l'eau se
fait transparence noire au contact de sa coque blanche, à laquelle
pour l'instant aucun bateau n'est accosté, où s'alignent à
touche-touche des pneus de caoutchouc sombre – et en détournant
très légèrement les yeux même sans tourner la tête – ce que
l'on ne fait pas, ne sachant d'où viendra ce que l'on attend - la
pancarte blanche qui annonce en trois lignes la visite de la rade
et du port militaire - la ligne
centrale, plus courte, et du,
figure dans un cartouche rouge aux lettres blanches – mention qui
est reproduite sur le panneau servant de rambarde à la passerelle
d'accès qu'ont franchie deux personnes accoudées maintenant à la
cahute blanche et rouge de délivrance des billets, derrière
laquelle apparaissent le museau et la poupe d'une vedette blanche et
rouge attendant le prochain départ – l'oblique ainsi amorcée
rejointe, avec un petit décrochement, par celle de l’alignement,
en un ordre apparent né d'une confusion d'horizontales et de fines
verticales, des bateaux du club nautique auquel on accède par le
terre-plein de la Préfecture Maritime, mélange de tons où domine
le blanc avec quelques traits noirs pour les plus fines coques, ligne
horizontale surmontée d'une juxtaposition de plusieurs rangées des
mats des voiliers dormant le long des pontons - et à travers les
plus éloignés apparaissent une grue et des taches grises qui sont
les premiers bateaux du port militaire promis,
affleurement de leur présence, des darses Vauban et Castigneau, du
quai des sous-marins, de l'arsenal, invisibles depuis ce quai en
vacance, avant la silhouette minuscule d'un fortin, une jetée
réduite à un trait sur l'eau, une bouée qui semble minuscule, la
limite de la darse vieille. A gauche s'allonge le quai parcouru par
des promeneurs qui viennent traverser le champ visuel sans retenir
l'attention, quai borné, au delà d'une petite esplanade entre lui
et l'avenue, par la ligne de fuite des façades régulières des
immeubles reconstruits dans les années 50, à la place de la
bigarure détruite, surmontant les bannes des boutiques, cafés,
restaurants, ligne de fuite qui se casse sur les très lointaines
bâtisses de toutes hauteurs, cette borne de la darse avant le port
de commerce et le Mourillon, derrière la gare maritime invisible,
masquée, comme les pointus et voiliers plus proches, par les
panneaux au bord du quai, au premier plan, sur lesquels semble
marcher le bronze de Monsieur de Cuverville, bras tendu vers la mer
d'où il est sensé provenir, panneaux annonçant le petit train que
Toulon s'est offert comme une banale petite ville touristique et
celui d'une autre compagnie de vedettes, desservant celle-ci Saint
Mandrier dont le ponton, blanc et bleu avance à droite depuis le
premier plan moyen et cache presque complètement l'ouverture,
là-bas, vers la petite rade, ponton vers lequel vient mourir la
courbe d'approche d'une vedette sur laquelle se fixent maintenant,
discrètement, les yeux. Sur tout cela un soleil ardent qu'adoucit la
présence de l'eau, dans une symphonie un peu plate où se mélangent
le bruit des voitures lancées sur l'avenue, les murmures civilisés
et sans importance des tables voisines, quelques phrases, qui ne
méritent pas d'être comprises, échangées entre les passants, des
voix plus sonores, des pétarades de mobylettes, un cri ou un rire,
un claquement d'ailes, rien qui déchire le bruissement de l'air, de
la petite brise au bord de l'endormissement, et depuis cette table,
la plus proche de l'eau, en petite note courant sous ce brouhaha, on
croit entendre le faible ressac le long du quai, en accord avec la
vague odeur de remugle de l'eau, celle de peinture des pontons et
baraques.. ce mélange en partie réel en partie imaginaire
qu'installe l'idée de port. Et derrière la terrasse, les tablées
rêveuses, gourmandes, où l'on s'ennuie, où l'on voudrait que ce
calme s'étire sans fin, il y a la barre d'immeubles du quai, les
quelques vieilles maisons rescapées des bombardements et toute la
ville qui s’étale entre les premières pentes du Faron et le port,
écrasé sous le soleil, remuant lentement comme un corps qui se
retourne dans sa sieste, dans la chaleur de ce début d'après-midi
d'été.
4 commentaires:
Merci pour ce partage ...
" il suffisait de quelques cuillères pour ré-inventer l'enfance
"l'idée de port" : larguer ensuite les amarres.
merci à vous deux d'avoir trouvé un commentaire à faire :))
Salutaire plongeon d'un quotidien pour un retour prochain
Belles descriptions
Enregistrer un commentaire