m'en suis allée ce matin
dans la ville, me demandant ce qui peut être le sel de ma vie, étant
évident que, pour moi, il ne saurait être qu'humble, fugitif,
habituel et banal sans l'être vraiment…
ma foi, n'en savais rien,
il y avait bien sûr le ciel qui ce matin portait de gros nuages
bonhommes
il y avait bien sûr, la
lumière m'étant rendue, sans violence, le jeu des ombres presque
régulières, ou caressantes et nourries de clarté…
il y avait la densité du
vert, sa jeunesse, son léger bruissement, les oppositions de
feuillages
et quelques fleurs
champêtres ou qui évoquaient, de loin, un coin de jardin
A vrai dire n'étais guère
convaincue.. pensais trop à d'autres choses, et trop à cette
interrogation, sentais seulement que ce m'était accompagnement,
juste ce qu'il fallait pour que par moments mon pas se fasse presque
allègre et que mes idées voltigent.
Alors ma foi, peut-être
le moment où des dalles
éblouissantes cessent d'être une banalité et trouvent moyen de me
frapper après que mes yeux les aient si souvent effleurées avec un
plaisir confortablement distrait
une douceur, un éclat de
tendresse dans les yeux d'une soeur, qui noue un lien sans rapport
avec toute notre histoire
l'espoir, qui arrive
encore à renaître, après s'être régulièrement fracassé, d'être
capable de faire quelque chose qui sorte un peu du médiocre, même
au prix du ridicule, mais pas trop, je m'y suis trop réfugiée
des souvenirs que je
cajole sans trop vouloir les analyser
des souvenirs que j'ai
analysés et détruits depuis trop longtemps et qui reviennent avec
une fraîcheur émouvante – les salue tels quels, me l'accorde pour
un instant
la certitude d'aimer
quelques personnes, sans tenir compte de leurs sentiments, cela n'a
pas d'importance, n'attends pas de réponse
retrouver mon ancienne
naïveté devant un texte, un film, une image, comme si on ne m'avait
pas dit que c'était beau (ou d'ailleurs que ce ne l'était pas)
et même parfois me
retourner sur ma vie improductive, mes petites sottises, ma solitude,
mes improvisations dans le travail où débarquais sans bagage ni
vraiment volonté, et trouver, sans trop d'indulgence, que somme
toute m'en suis pas si mal tirée, ou du moins assez bien pour ne pas
peser lourdement sur autrui
et me souvenir aussi du
soutien simple, assez pour que ma faiblesse se laisse faire sans
refus, avec une reconnaissance tout aussi simple et directe, lorsque
j'étais malade.
C'est peu, ma foi, ça me
suffit, la plupart du temps.
Et au fond, pour être
sincère, j'y ajouterais des souvenirs amers, mais qui sont entrés
dans le tissage général, dans mon moi bancal.
13 commentaires:
sels gemme...et tout ce qui se tient derrière ces mots qui sonnent
Mais oui, Brigitte. La belle naïveté retrouvée.
C.Jung associait Dieu et sel en suggérant qu'il était possible de manger sans sel comme de vivre sans Dieu. A quoi il ajoutait que l'existence de Dieu n'avait pas beaucoup d'importance en elle même mais que si on vivait mieux avec Dieu dans sa vie il était cruel de vouloir s'en passer de même que de se priver de sel si le plat était meilleur ainsi accommodé. La puissance pratique de l'art des cliniciens de l'âme sur les idéologies, c'est qu'il n'impose rien à personne sinon le devoir d'être heureux. A celui qui vous dit qu'il n'a que faire de son malheur et même qu'il refuse d'être heureux, viens le temps où si vous lui donnez tout pour contrer ce drame, il vous perdra avec lui. Mon sel à moi c'est de dire qu'il ne faudrait jamais renverser la salière pour rendre les gens heureux malgré eux, ça porte malheur.
La vie sucrée salée baignée de lumière...
Philosopher tout en marchant; une belle tradition.
une des vertus de la marche
Tu frôles la " Grande Sagesse" Suis admirative
J'adore les nuages " bonhommes" il fallait le dire!!!
Arlette, en fait de grande sagesse, je pense que c'est plutôt pente facile…
et oui il y a des nuages gentils quand sont séparés et très blancs
Même disposition d'esprit... envie de nuages gentils... et de moments de grâce épiphanique...
Garder toujours l'émerveillement en soi (même pour des choses simples, apparemment).
vaut mieux… parce que sans cela il risque d'être rare
Ne connaitrai tu pas ta richesse
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