Mais d'abord ce jeudi
matin.. constat que, tant pis, c'était un peu prévu, le billet
d'hier ne plait guère.. me dire tant pis (et penser que le constat
vient en partie de mon humeur un rien maussade, suis dans un de ces
jours où carcasse est d'une paresse contre laquelle lutter)
m'en aller dans beaux
restes de mistral (mais nous n'avons pas ici d'incendie menaçant –
je réalise qu'il y en a eu étonnamment peu de grande importance
cette année autour de la mare nostrum, ou j'étais honteusement
distraite) et sous ciel bleu légèrement jaspé
pour un petit marché dans
les halles où manquent des étals, où manque un tantinet le choix,
où manquent, délicieusement à mes yeux, les clients – une sieste
comme un trou profond, une petite plongée dans Novarina et revenir à
internet pour trouver le commentaire et le lien de Christine Jeanney
sur le billet d'hier... contrairement à ma première réaction,
lire tout de suite, en tentant de réagir – Adel Abdessemeb, à
part les thèmes, même si sont assez consensuels et non pas
choquants comme indiqué, et un plaisir du trait, de l'humour
grinçant souvent, n'est pas dans ce que j'ai vu hier ce qui m'a le
plus retenu.. dire pourtant que le côté lisse, presque industriel,
gigantesque objet en pastique, est assez adéquat pour représenter
la violence infligé avec froideur aux peuples, même si la douleur,
elle, est échevelée - le premier billet, l'article du Monde de
2012 et les notes qui suivent... y rêver un peu et puis ouvrir la
série de photos restantes, décider de me limiter à Andres Serrano
(en déplorant que mes photos soient si mauvaises), et donc, en hors
d'oeuvre
à Adel Abdessemeb
puisque, en bas de l'escalier, ce sont deux de ses oeuvres qui, dans
la grande galerie donnant sur la cour, introduisent à la violence
infligée qui est le sujet de Serrano, un christ dessiné à grands
traits vivants dont la tête souffrante est faite de métal tordu, et
une colombe-porte-arme.
rester un peu en suspens,
dans le à-quoi-bon, d'autant que mes photos me semblent
spécialement navrantes, et puis poser la très décourageante –
pas facile, faut dire , dans la lumière soigneusement pauvre de
cette salle intérieure – capture des trois grandes photos de
prisonniers encagoulés et les premières tentatives de capter les
gravures de Goya (33, dont beaucoup que je ne connaissais pas, venues
du Musée d’Oldenburg en Allemagne - «
Pourquoi peignez-vous de telles horreurs ? » avait demandé son
domestique à Goya. « Pour demander éternellement aux hommes de ne
pas être des barbares », lui avait-il répondu)
qui accompagnent la série, intitulée Torture,
à propos de laquelle je me borne à copier, comme je viens de le
faire pour Goya, une partie de la présentation qu'en fait Eric
Mézil, le directeur de la Collection Lambert
Andres Serrano présente
sa dernière série sur laquelle il a commencé à travailler en 2005
à la demande du New York Times Magazine. Grâce à sa rencontre avec
l’organisation a/political dont le siège est situé à Londres et
les ateliers de production à Maubourguet, à l’ouest de Toulouse,
l’artiste a reçu tout le soutien logistique pour produire les
oeuvres qui, comme toujours avec Andres Serrano, sont au coeur de
l’actualité internationale.
…..
Torture d’Andres
Serrano débute par les guerres de religion d’un autre temps
obscurantiste, celui de l’Inquisition du Moyen Âge qui a sévi
jusqu’à l’aube du Siècle des Lumières (à
vrai dire, cela se limite aux instruments photographiés dans la
première des salles qui vont suivre). L’artiste s’est
ensuite engagé dans une cartographie photographique des lieux
symboliques de la torture au XXe siècle : ceux des camps de la mort
qui servaient l’idéologie nazie où six millions de Juifs furent
déportés et tués ; ceux de la Guerre froide avec les prisons et
les bureaux d’interrogatoire de la Stasi où la torture est
machiavélique et psychologique ; ceux qui rappellent les pires
moments en Irlande du Nord où après le fameux Bloody Sunday,
certains prisonniers furent isolés du monde par une cagoule portée
en permanence.
Ce questionnement
photographique replace en filigrane l’humain au centre de cette
démarche de l’artiste qui nous renvoie aux heures sombres de
l’Espagne, du Pays Cathare, de l’Allemagne, de la Pologne, puis
de l’Irlande et enfin de l’Orient et du fameux Axe du Mal, projet
qui a justifié l’action de George W. Bush après les attentats du
11 septembre.
Et
pour le reste, vais me limiter à quelques images de chacune des
salles, comme ici, donc, la dureté cruelle de l'invention humaine et
du métal opposé aux chairs.
La
salle suivante, consacrée aux camps de concentration,
s'ouvre
sur la dérision de l'interdiction de fumer à Dachau...
Puis
venait la banalité glaçante des locaux de la Stasi…
Pour
la suite, n'ai rien noté, en suis restée à l'horreur et à cette
gêne, toujours, ce malaise, éprouvé en ne pouvant freiner le
plaisir esthétique né de ces images mises en scène, parfois, en
reproduisant, des photos que je me refusais à voir quand elles
faisaient la fierté des bourreaux, sans la médiocrité de leur
vision.
Juste
noté que cette femme, la seule dans ces salles, est une prisonnière
au Soudan.
Et puis, cette vidéo,
découverte aux heures d'insomnie du petit matin, qui montre
l'élaboration des photos réalisées pour le New York Time inspirées
par celles des soldats américains en Irak,
et de celles
qui ont suivi, avec le soutien de a/political … et toute
l'ambiguïté qui est sans doute ce qui donne force à son oeuvre.
3 commentaires:
On peut être aussi "torturé" par des photos : jusqu'où peut aller l'artiste, that is the question !
là il partait sécurisé, puisque c'était une commande
Mais silence ne veut pas dire abstinence de la lecture de votre blog. Seulement un droit parfois à la paresse où au trop plein d'occupations. Sujet difficile et qui interpelle que celui que vous nous proposez aujourd'hui. Dans le petit film, Andres Serrano explique le danger ou l'ambiguïté de l'esthétisme pour mieux dénoncer l'horreur de la barbarie, de la torture et comble de la bestialité humaine : l'humiliation (ces corps contraints à des poses indécentes ). Propos non consensuels auxquels il me semble j'adhère à condition de ne pas en faire une exclusivité.
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