Avignon avait quelques
orteils dans le festival ce matin, un début de décor, un peu plus de gens aux terrasses et dans les rues, modérément, quelques spectacles à 10
heures, un peu davantage à 11 heures dont, chez Alain Timar, au
théâtre des Halles, trois spectacles parmi lesquels avait été
attirée par celui qui se donne dans la grande salle (Chapitre)..
Les rues étaient
tranquilles, un peu plus animées cependant que d'ordinaire, et
s'éveillait modérément le jardin de Sainte Claire, où me suis
installée avec le Canard, mais sans lire plus qu'un articulet, trop
occupée à tenter d'humer le début d'ambiance et surtout à
comprendre ce que j'avais bien pu faire à mon appareil... pas
vraiment compris mais l'ordre est revenu – en attendant de voir,
dans une salle qui n'était encore pleine qu'aux deux tiers,
F(l)ammes, texte et mise en scène d'Ahmed Madani, interprété
(élaboré aussi avec elles) par un groupe d’une dizaine de
jeunes femmes nées de parents immigrés pour explorer ensemble leurs
identités multiples, leur sensibilité, leur désir de prendre la
parole, de jouer, danser, rire, creuser en elles, se raconter. Les
médias n’en parlent que rarement tant leur discrétion, voire leur
disparition des espaces publics est patente...(texte
de la présentation sur
http://www.theatredeshalles.com/pieces/4878/)
et c'est tonique, un tout petit peu trop long sur la fin, à peine,
elles sont plus ou moins attachantes, différentes et proches comme
le sommes tous, peu ou prou, c'est fin, ironique, colérique, on y
trouve de la culture et de la cuisine, des pères et surtout des
mères, de futures mères aussi
A la
fin du beau texte d'Ahmed Madani sur le petit programme de salle leur
spontanéité, leur faconde, leur énergie, leur imprévisibilité,
leur liberté et leur justesse n'ont pas cessé de m'étonner et de
me démontrer que l'art n'est pas une affaire de coeur et de
sensibilité. Pour rêver le monde et garder leurs coeurs purs, ces
F(l)ammes avancent telles des poètes, un pied dans la boue, un oeil
sur les étoiles et un poignard à la main.
La bande annonce
retour aussi
rapide que le permettait un petit coup de faiblesse – ai jugé
qu'il venait d'une faim assez inattendue à laquelle me suis
empressée de remédier (enfin le temps de préparer pitance) avant
un petit sieston... ce trop long début de billet, un thé,
et puis suis
repartie un peu après dix sept heures, dans les rues qui commencent
à se peupler, pour n'avoir pas trop de dos, d'épaules, entre moi
et la parade... et bien sûr comme d'habitude c'était presque une
petite heure avant le début de la parade et un rien trop tard pour
pouvoir m'appuyer quelque part...
ai fait comme pouvais, me suis
agacée des dos laids, forcément laids qui s'interposaient entre moi
et mon sujet... ai regretté qu'il n'y ait cette année aucun élément
spectaculaire comme la locomotive d'une année, le dragon en ballons
d'une autre, et me suis bien amusée, stoppé un peu avant la fin
parce que mes jambes pleuraient et suis rentrée à dix neuf heures,
avec l'idée de tenter de faire une vidéo pour garder trace de cette
avalanche, ai commencé tri, essayé de récupérer un peu de
son..(que j'ai bazardé), l'ai préparé à la va-comme-Brigetoun et
l'ai laissé se mettre en place sur YouTube pendant que j'écoutais du
grec ancien à travers le japonais...
Puisque,
patates et morue cuites, ai enfilé une nouvelle robe, pris un
veston, mon vieux petit appareil, et m'en suis allée, sous un ciel
où les nuages s'installaient, vers le premier (et finalement presque
mon seul) spectacle dans la cour d'honneur, avec la petite vibration
de la montée de nos marches locales,
une place au douzième rang
près des rambardes, au loin des circulations - j'enrageais mais j'ai
eu droit à une voisine juste un peu plus âgée que moi, pleine de
malice et d'intelligence, qui a noyée mon appréhension et m'a aidé
à attendre les quarante et quelques minutes de l'installation des
disciplinés puis des retardataires –
pour trouver un
lac de minime profondeur, et les belles images de l'Antigone montée
par Satoshi Miyagi.
N'en savait, outre le fait
que c'était Antigone, Sophocle et le Japon, que ce qu'en disait le
programme … De la Cour d'honneur du Palais
des papes, symbole d'une autorité qui aime à séparer mais aussi
lieu où le mur est une surface qui dompte les égos, le metteur en
scène a souhaité travailler l'eau, les flammes et les ombres pour
célébrer la vraie nature de tous les personnages : double ou
multiple au sein d'une histoire que l'on pourrait qualifier
d'archaïque., que
ce qu'en montrait les photos de Christophe Raynaud de Lage (en ai
retenu deux pour les poser ici), et
cette vidéo, un rien trompeuse (un petit
relent de comique dont je pensais que, bien sûr, il ne se retrouvait
pas dans le spectacle, et provenait, pensais-je, du montage)
désolée Ma
vidéo était venue se poser là à nouveau, à la place de celle du
festival, qui elle ne veut pas venir, vous la trouverez dans la
série de photos sur
http://www.festival-avignon.com/fr/spectacles/2017/antigone
Mais en
réalité, et là je vais rassembler mes bribes de souvenir en
espérant ne rien oublier de ce qui s'est imposé tout de suite, sans
digestion ni réflexion, parce que j'ai laissé sur mon siège le
programme sur lequel j'avais noté, de façon sans doute illisible,
mais à titre de pense-bête, quelques impressions – mais en
réalité, donc, le comique n'est pas tout à fait absent et en
apéritif, après que nous ayons regardé les silhouettes blanches
décrire des trajets solennels dans l'eau pendant que le public
s'installait, nous avons eu un résumé extrêmement sommaire,
jusqu'au comique justement, dit par les acteurs incarnant les
principaux personnages, en un français incompréhensible, et avec
des attitudes à la foi belles et, oui, comiques..
Suivait un prologue muet,
si ce n'est la très belle musique de Hiroko Tanakawa
(les musiciens
alignés au fond de scène accompagnent tout le spectacle), avec des
actions tellement stylisées que me laissais envouter sans chercher à
comprendre, sauf le duel des deux frères et leur mort qui enclenche
la pièce.
Alors que dire, que c'est
très beau, sans tomber dans le pur plaisir esthétique, qu'il y a,
outre la chorégraphie de tous les déplacements et gestes, le moment
où le choeur reprend les mots de Créon, les beaux éclairages qui
projettent en très grand sur le mur les principaux antagonistes, et
font vivre des affrontements, oppositions d'idée et d'attitudes sur
ce mur à partir des gracieuses petites silhouettes blanches
présentes sur scène, parfois très éloignées l'une de l'autre,
qu'il n'y a pas toujours adéquation physique entre le récit et les
attitudes comme lorsque Antigone reste immobile sur son rocher
pendant qu'un garde raconte qu'elle est en train de jeter de la terre
sur son frère, qu'il y a des moments où le dialogue est prononcé
de façon très réaliste, presque plate, et des moments où le
discours se solennise jusqu'au chant – et bien sûr le chant lors
des deux stasimons, qu'ils ont embarqué avec eux le public et créé
un vrai moment de communion,
que l'évacuation fut
longue (ah mes places au premier rang) et que j'ai faim.
9 commentaires:
La cour d'honneur du Palais des Papes, magnifique réceptacle d'une communion humaine quand le spectacle est à la hauteur. Frustration de ne pas y être mais plaisir par procuration de vous lire.
Antigone withe the (japanese) wind...
Le premier spectacle de la Cour d'honneur, vous ne l'avez pas manqué.
"Apéritif" pour un très long repas qui s'annonce !
merci à vous deux mais très tentée d'en rester à des notes personnelles er de ne pas m'imposer en plus les photos, essayer de mette mots et plus encore vidéos...
je fais le désert avec ça alors vaut pas le coup
J'aime bien la video.
Qui veut aller loin, ménage sa monture et ça démarre molto bello.
l'était un peu sur les rotules la monture, et doit se ménager
Pour les Halles, j'ai vu "dans la solitude des champs de cotons" bof bof bof
j'aime bien vous lire, je vous relirai alors. Peut-être nous ferez vous profiter de vos notes à la saison creuse avec un peu de recul?
En tout cas profitez bien du Festival
vu cet hiver, en faisant volontairement abstraction de mes souvenirs (d'ailleurs si anciens que devenus mythes presque vagues) des mises en scène de Chéreau.. et plutôt aimé (sans grand enthousiasme, mais tout de même... et je constate en moi ces temps ci beaucoup de difficultés à m'enthousiasmer..)
Cette Antigone me taquinait voulais savoir ce que tu en pensais toi
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