ciel variable et chaleur
sans extrême virulence, je ne suis sortie que pour aller aux
silos/poubelles des remparts
J'ai amené au centre de
l'antre le grand sac plein de repassage à faire, l'ai regardé avec
respect
et puis, parce qu'hier mon
recul devant le #5 fantôme de soi écrivain de
l'atelier d'été de François Bon
http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article4463
(persuadée que j'étais que le discours sur une écriture m'était
totalement étranger – aux temps lointains de ma scolarité, quand
nous avions, au bac ou dans un autre examen, à choisir entre
plusieurs sujets, je mettais d'emblée résolument de côté ce que
nous appelions «explication de texte» et j'avoue que, raison de mon
inculture, les critiques, - hors quelques unes qui prennent appui sur
un texte, le décortiquent intelligemment mais sans jargon froid et
pesant et l'enrichissent d'une écriture personnelle, comme parmi
d'autres les textes d'Arnaud Maïsetti sur le théâtre - me font
fuir... et d'autre part je me sentais bien mal placée pour deviner
le besoin, la nécessité qui pousse quelqu'un à écrire, sauf pour
soi-même), mon recul, donc, m'agaçant, me culpabilisant, j'avais
repris les six premières lignes tapées il y a quelques jours, et
continué un moment avant de me heurter à la discrétion obstinée
de mon écrivain qui refusait de venir autrement qu'en plan
lointain... et donc me suis installée, j'ai tenté de finir (en
freinant parce que cela devenait trop long, même si les brillantes
contributions... heureusement
pour moi, déjà paralysée et intimidée par les premières, je
n'avais pas lu les dernières, notamment les 12 et 13
http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article4464
) mon humble présentation de mon fier et humble bonhomme et
l'envoyer.
Sur
ce j'ai rangé le sac d'à-repasser, lavé le sol, vaqué un peu, lu
un peu davantage, écouté la vidéo d'une réunion de la commission
des affaires économiques... et voilà qu'après ce trop long
n'importe quoi, j'en viens à poser ici, l'article présentant mon
écrivain.
En cette période de
rentrée, me reste un petit goût de lecture vagabonde, une envie de
rester encore en marge du rite dont je crains qu'il teinte
d'obligation le plaisir de vous parler de ma découverte de tel ou
tel des livres dont on parle, et je vous renvoie, pour le moment, aux
articles de mes amis de la revue (je ne manquerai pas, d'ailleurs,
dans les prochains jours de recevoir, à la radio, Jean Pierre X que
Jacques Lefebvre étudie si bien dans ce même numéro)
Pendant que vous hésitez,
pleins d'espoir et accablés un peu (c'est du moins ce que l'on dit
rituellement) devant la masse de livres qui se pressent dans la
rentrée littéraire, même limitée à l'écume reprise dans les
journaux et revues, vous pourriez faire un bref - ou moins bref, à
vous et à l'occasion d'en décider - détour en vous intéressant à
ce que publient des petites éditions, le plus souvent régionales,
comme, discrète entre toutes mais qui se fait lentement son chemin,
la rive du loup (une petite
anecdote que je tiens de Serge Urlier, le fondateur, ce nom résulte
d'une faute de frappe négligée, il avait pensé le rêve
du loup).
Serge
Urlier est un vieil ami, et un voisin de cette maison d'enfance où
je passe mes vacances... et comme toujours il était ici, il y a
quatre ou cinq jours, pour une partie, soi-disant, de pêche, même
s'il y a bien longtemps que nul n'a rien pêché dans le gros torrent
roucoulant derrière les chênes, en bas de la prairie. Et comme pour
narguer les livres, à lire, redoutés, lus, aimés, dédaignés,
annotés qui m'entouraient, il est arrivé avec Un livre, un des deux
qu'il publie ces jours-ci.
Et
c'est les pieds dans l'eau, les yeux flottant avec une distraction de
plus en plus grande, avant d'abandonner, pris par ce qu'il me disait,
le simple effort de faire semblant de s'intéresser à la pêche,
qu'il m'a parlé de celui qu'il voulait me faire découvrir.
Un peu
un hasard, deux ou trois micro-nouvelles ou descriptions de paysages
réinventés rencontrées dans des revues ou journaux locaux, et puis
la visite d'une ancienne très chère amie, en rupture de vie
parisienne, venue s'installer auprès de son père, un peu pour
veiller sur lui, surtout comme un refuge, le temps de digérer des
échecs... et au détour de leur conversation légèrement distraite,
pour le plaisir, l'arrivée – sans doute, il ne se faisait pas
d'illusion, le but, pas tout à fait unique, de cette rencontre –
de cet ermite entre grande maison confite dans le passé, jardin
délaissé et d'une masse de cahiers, carnets, dossiers de feuilles
volantes, reste d'une vie hors littérature, mais dans le besoin de
jouer avec les mots, de fixer des idées, de travestir des moments,
au gré des déplacements de celui qui avait été, juste,
petitement, comme il le disait, représentant ou vendeur de matériaux
en terre cuite, plus ou moins raffinés... elle avait parlé de sa
plongée dans ce fatras, puisque temps en avait, avec l'autorisation
réticente et l'inquiétude muette de son père, qui se refusait à
se considérer comme écrivain, avec une sincérité relative comme
le prouvaient les quelques parutions et l'humilité fausse avec
laquelle il prétendait être polygraphe comme Rétif... et puis
finalement «j'ai voulu le provoquer, lui mettre un défi, j'ai
attrapé dans sa bibliothèque - il a beaucoup lu pour quelqu'un qui
se situait hors du milieu littéraire et ne lisait aucune critique,
au hasard... enfin pas tout à fait, quand le hasard le mettait en
présence de la médiocrité, il délaissait le livre, il y en a des
piles dans un cagibis – le livre de Stevenson sur l'âne et les
Cévennes et lui ai proposé de revivre une de ses propres
errances... il a beaucoup marché au début de sa retraite, dans nos
collines ou petites montagnes... il a grommelé et puis finalement,
au bout d'une trentaine de jours où il était un peu absent, à sa
table, ou vaguement distrait, sauf remarques qui montraient qu'il ne
l'était pas tant, il est arrivé avec une très grosse pile de
feuilles qui ne répondaient pas exactement à ce schéma mais qui
inventaient un trajet sur les pas de Stevenson de nos jours – grâce
je pense à quelques souvenirs, re-créations, et consultation de
Google Street New – mais avec, il ne pouvait et ne voulait s'en
empêcher, d'innombrables détours, poésie en prose, philosophie,
réflexions sur l'évolution même presque imperceptible du paysage,
permanence sous les changements qui semblent évidents de la société
même dans ces coins reculés, et petites histoires sur tel ou tel
rencontrés là, dans son imagination, petites histoires qui se
dilataient parfois sur une dizaine de pages...» et, bien sûr, elle
a ouvert la besace posée à côté d'elle et en a extrait –
j'étais entre inquiétude et agacement, avec tout de même un furtif
intérêt – une chemise très gonflée qu'elle a posée devant moi.
J'ai bafouillé et elle a dit très vite qu'elle n'attendait rien,
bien sûr, qu'elle pensait que j'avais autre choses à faire, mais
que si j'avais un petit moment elle aimerais savoir si elle pouvait
tenter d'encourager son père à sortir de son auto-dédain, à se
consacrer vraiment à ce qui, visiblement, était important pour lui,
ou si elle devait l'inciter à s'intéresser sérieusement à l'état
des arbres légués par leurs ancêtres ou à sa propre menaçante
décrépitude.
Deux
ou trois jours après son passage, j'ai ouvert le dossier, j'ai lu
quelques pages, en picorant, et, tu verra par toi même, j'ai été
accroché par un ton, une écriture, sans doute une digestion, mais
très personnelle et devenue traces souriantes, de ses lectures, et
puis un ton, un regard sans originalité tonitruante, mais tu en
jugera, cela sort tout de même de tous ces écrits anonymes ou
cachés, enfin moi je trouve... j'ai repris ma lecture dans l'ordre
et j'ai aimé la construction, pas si anarchique que cela, de
l'ensemble. Je leur ai rendu visite - assez incroyable cette maison,
entre pagaille et confort étrange, comme une coquille qui
s'ouvrirait, se ferait moins farouche depuis qu'elle est là - j'ai
suggéré quelques coupures, quelques corrections... il était comme
un enfant ravi, étonné, qui refusait d'y croire, mais en même
temps assez sourcilleux, défendant âprement des passages que je
pensais sans intérêt... enfin cela a donné ce bouquin.
Je
crains qu'il passe tout à fait inaperçu, trop discret, trop hors
sentiers balisés et de plus édité par moi... bon tu sais bien que
les livres que je sors restent, malgré que j'en ai, assez
confidentiels. Je prépare un recueil de nouvelles à partir de
trucs, comme il dit, qu'il a exhumé de ce qui est en effet un masse
assez incroyable de cahiers, paperasses, preuve qu'il leur accordait
une certaine importance – il dit pourtant qu'il en a jeté, fruits
d'une époque qu'il préfère oublier, et ce disant il semble un peu
le regretter... des phrases absurdement violentes, auxquelles il a
trouvé quelques années après, se relisant, un caractère un peu
artificiel. Et puis, il a entrepris quelque chose, il le dit en
souriant de bonheur, mais avec une petit tremblement sous-jacent,
sans préciser davantage.
Ma
foi, après le départ de mon ami, entre deux lectures importantes,
je l'ai pris cette errance en Cévennes – quelle erreur ce
titre stupide et qui ne dit rien de ce qu'il couvre – et je vous en
parle, avant d'en venir, promis, dans les prochaines semaines aux
livres dont on parle, parce que j'aimerais vraiment qu'il ne passe
pas inaperçu. Je verrai bien un petit club de lecteurs aimants se
constituer.
9 commentaires:
J'aime beaucoup votre contribution, qui suscite certains regrets pour certain auteur trop modeste
oh oui ! s'il s'agit de celui auquel je pense
"Ciel variable" je suis d'accord, mais "chaleur sans extrême virulence" je ne suis pas d'accord du tout : je ne suis qu'une flaque !
Vous pourrez aller le rencontrer, les Cévennes, vous connaissez...
Caroline tout est dans l'"extrême", on a connu et on risque de connaître aujourd'hui bien pire
Dominique, les ai surtout traversées... et puis ne voudrais pas le déranger
Une idée me traverse l'esprit quand chaque matin ou dans la journée je lis ou réponds sur internet aux interventions de l'un ou l'autre, c'est un peu comme dans un autre temps le moment privilégié de nos ancêtres qui "allaient faire leurs correspondances" Un régal presque une façon de vivre indispensable
tu m'évoques ma mère ... et quand je lis ses lettres suis admirative
Ai gardé aussi certaines lettres de ma grand mère en particulier , des pages ciselées dignes d'écrivains sans oser parler de Madame de Sevigne
Désolée ma tablette refuse la bonne écriture( Sevigne)
Enregistrer un commentaire