Comme je m'étais trompée
et que, étourdie que je suis, j'avais pris deux billets pour deux
spectacles différents hier, que j'ai choisi Pommerat parce que c'était la
dernière (et que le billet était nettement plus cher) mais que je
tenais peut-être encore davantage, ou du moins autant, à voir le
second, qui se jouait encore samedi et dimanche, ai racheté à
l'heure du petit déjeuner un billet pour le théâtre des halles ce
samedi, afin d'assister à la dernière création d'Alain Timàr, les
carnets d'un acteur avec
Charles Conzalès. Comme j'avais petites courses à faire le matin
mais que, une fois lavée, huilée, crémée, massée, médicamentée,
frictionnée, vêtue, carcasse a décidé petite colère, ai
reconsidéré l'urgence, ai grimacé, me suis assise, ai regardé une
série de très très courtes vidéos sur le site du théâtre
http://www.theatredeshalles.com/pieces/coulisses-de-creation/
les coulisses de la création, deux entretiens
avec Eric Gil technicien et régisseur plateau et Richard Rozenbaum
régisseur général (une phrase), Charles Gonzalès parlant du
théâtre et duspectacle pour dire que plaisir et Alain Timar disant
«pas de message, pas de leçon dans ce spectacle mais l'histoire
d'un personnage, en l'occurrence Charles... on a voulu Charles et
moi-même vraiment entraîner le spectateur dans le vécu d ce
personnage à travers ses fantasmes, à travers ses rêves, à
travers ses peurs
et
ainsi mise en sympathie ai vécu ma journée, en essayant de ne pas
être trop lente et maladroite dans les petites activités
domestiques..
avant
de m'en suis aller le soir pour être, comme convenu, à la
billetterie une demi-heure avant le spectacle
(avec
le livre de Jim Harrison en cours de lecture dans mon sac), spectacle
adapté et mis en scène par Alain Timar, ainsi présenté sur le
site du théâtre
(une
photo provenant de la page Facebook du théâtre)
inspiré de Les carnets
du sous-sol et Le rêve d’un homme ridicule de Fédor Dostoïevski,
extraits de textes de William Shakespeare et d’après les Psaumes
(Livre I, 1 à 41) et le Qohelet (Livre 1 à 5)
Fédor est un acteur
dans la force de l’âge. Fou de Shakespeare, il en fréquente
assidument les pièces et les personnages. Il peut se mettre à les
jouer là devant vous ou devant la salle vide, avec une singulière
sensibilité et une intelligence hors du commun. Les autres, avec
ironie, l’ont surnommé Will, en écho à William. Mais ils n’ont
pas su ou pas voulu reconnaître son talent. Fédor a trouvé un
petit travail comme homme à tout faire dans un théâtre… afin de
gagner sa vie.
La représentation va
commencer, le public n’est pas encore entré dans la salle. Fédor
balaie le plateau, range les costumes et les accessoires. Il se met à
songer. Il erre dans le théâtre. Poussé par un désir
irrépressible, il se faufile, franchit le rideau rouge et les mots,
malgré lui, surgissent de sa bouche. Il s’exprime enfin, donne
corps et voix à son imaginaire en convoquant tous ces fantômes qui
le hantent…
Il fallait pour aborder
Dostoïevski, Shakespeare et Saïd un acteur de la stature et de la
qualité de Charles Gonzalès. Ce
qui bien entendu me mettait en appétit sans trop bien savoir de
quoi.
Alors
il y a Charles Gonzalès, mais pas tout à fait seul
il y a
le ridicule qui faute de mieux se déclare ridicule, joue le ridicule
(connu), qui dit aimer tous les autres mais pas sans hargne
il y a
le fou comme le fou du roi
il y a
celui qui se dit, sous le ridicule, et la voix violoncelle prend une
profondeur douce
il y a
le violoncelle mis au service de Shakespeare
il y a
le texte qui parle du théâtre et de la condition humaine, du monde
aussi
il y a
le rideau rouge en tissu souple et soyeux qui, à un moment tombe,
créant une sculpture rouge au centre de la scène d'où il
s'extirpe, il y a dans une lumière noire (les lumières sont belles
et sont presque un acteur) le tissu qu'on étend, glissant comme une
eau, il y a le tissu rouge en pleine lumière sur lequel il joue pied
nu, et qui s'accorde au texte, et puis qui est tiré, et c'est beau
la façon dont il s'étrangle hors de scène
il y a
un miroir qui avance vers lui et la petite silhouette qui s'y trouve
prise, le miroir qui se retourne et au verso un homme en chapeau est
là, projeté, qui dialogue avec Fédor, qui joue Shakespeare et qui
est, vraiment et selon Fédor, mauvais (en emphase glacée)
il y a
trois miroirs et les trois hommes, semblables, qui sont au verso jouent,
dialoguent, sentencieux avec Fédor
il y
a.... etc et Brigetoun aimerait avoir le texte, et les texte, et puis
la ou les voix de Gonzalès. Bref j'ai plutôt aimé
retour
par la rue du roi René et les monstres tapis dans la nuit sur un sol
bouleversé où se tordre les pieds,
la
surprise de voir que, là, il laissera place à une calade de belle facture
avant
que l'on retombe sur le désert de la place Saint Didier qui, de
nuit, devient magique.
14 commentaires:
Carcasse tracasse...
Merci pour ces partages, on sent que vous déambulez, dans la ville, dans la culture, dans votre tête.
de moins en moins mais par chance encore un peu oui
Promeneuse de la nuit aux rêves démesurés comme les montres au coin des rues singulièrement desertes
Avignon a encore son rythme d'hiver et seule la place de l'horloge vit doucement la nuit
beau rouge
Sans doute un beau spectacle... Pour une fois, le plateau n'est pas encombré par des dizaines de personnages dont on ne sait plus qui est qui...
Mais Avignon se la joue "anniversaire de 68" ?
Claudine, n'est-ce-pas ? et le créateur des lumières a bien du talent
Dominique, je ne sais ce que fut 68 (du moins mai) à Avignon… juillet fut une remise en cause de Vilar, suivie d'un remords je crois d'après ce que 'avais lu à l'époque
J'ai vu la pièce aussi. Pas un grand enthousiasme. Trop de texte foutoir. La lumière oui, magnifique et comme tu l'as remarqué : le rideau rouge. J'ai recueilli des impressions à l'issue du spectacle car je me suis interrogée sur ma capacité à supporter ce verbiage. Mais je me suis aperçue que je n'étais pas seule, de plus beaucoup ont détesté le jeu de l'acteur, ce qui n'es pas mon cas, me disant qu'il a fait une belle performance pour un texte pareil.
Caroline, c'est pour cela que j'aimerais avoir le texte pour en décider (un peu surprise en effet, mais résolument positive - sourire)
"la surprise de voir que, là, il laissera place à une calade de belle facture": encore une rue impraticable pour les personnes en fauteuil roulant? Malheureusement l'esthétique n'est pas toujours en accord avec le confort de tous.
En trente ans de fréquentation d'Avignon avec mon mari en fauteuil roulant (décédé maintenant) nous n'avons jamais pu prendre la rue des Teinturiers. Il faut basculer le fauteuil sur les roues arrière et les soubresauts sont pénibles pour l'intéressé et fatigants pour la personne qui pousse. En plus d'être privés de cette jolie rue,il faut prévoir un itinéraire "de contournement, toujours plus long.
Lavande, je suis entièrement d'accord. Avec des talons, aussi. Le côté pseudo médiéval des calades quand on détruit l'extérieur d'Avignon avec des zones commerciales, je me dis qu'il n'y en a que pour le tourisme, décidément.
pour mes plantes de pied gonflées et douloureuses aussi, mais je ne pensais pas, pardon aux fauteuils, seulement aux vélos et tout ce qui peut m'en débarrasser et retrouver le plaisir de la déambulation insouciante est bienvenu..
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