Printemps qui s'en vient,
petites poussées de verdure anarchiques
Ciel froid balayé par le
vent qui pousse ma porte fenêtre malgré la protection de ma
provision de patates, qui donnait ce matin aux passants, même s'il
avait perdu de sa force, mais non de sa froidure insidieuse, sourire
crispé, bouche fermée pour éviter de l'avaler, tête penchée pour
l'empêcher autant que possible de pénétrer les orbites, épaules
remontées, bras serrés contre le corps, et leur faisaient faire,
sauf aux jeunes à la marche trop rapide pour lui, de brusques écarts
qui parsemaient les pavés,
le sol de ma cour (même eu droit à trois bouts de branche) de
débris végétaux
L'idée de l'intuition
vers laquelle avancer pour l'atelier de François Bon, sur le
tiers.livre (quand Modiano mène l'enquête
http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article4742)
tente de se préciser mais se limite actuellement à des petites
images floues vers lesquelles ne me sens aucune nécessité de
cheminer.
Je reprends ma
contribution, trop longue, au premier des deux ateliers proposés cet
hiver, pour accompagner la nouvelle parution chez publie.net de son
livre comment écrire au quotidien
https://www.publie.net/livre/comment-ecrire-au-quotidien-pierre-menard/
(je me dis que devrais en
tenter, mettons une fois par semaine, pour mon bien, sans passer à
l'acte) par Pierre Ménard, sur son site http://liminaire.fr
(site qui a été endommagé, et qui est actuellement en assez rapide
et patiente reconstitution, les ateliers d'écriture figurant ce
matin n'étant encore que ceux de 2010 je crois – lui adresse,
faute de mieux, mes voeux impuissants et admiratifs, la dite
contribution y viendra en son temps), atelier en deux parties, texte,
puis photo
J'étais
restée bloquée par la partie photograpique, ne me sentant pas le
droit d'afficher photos de proches ou d'inconnus pour répondre à
réaliser une série de photographies sur le thème du portrait, de
la mémoire et de l’identité. Et
puis j'ai vu que, dans les exemples proposés, il y avait des photos
de visages absents, remplacés par la silhouette blanche de la face,
ou masqués, par des étoiles je crois, alors j'ai espéré que les
sujets ne verraient pas le résultat de mon montage, ou trouveraient
leur image assez imprécise, et j'ai posé ci-dessus le résultat.
Pour
le choix d'une série de photos à décrire en une ligne et la
description détaillée de trois d'entre elles en
essayant de faire passer le regard et les mots du visible au visuel
(je regrette que vous ne puissiez pour le moment lire l'ensemble du
billet de Pierre Ménard, mais je vais être déjà assez longue)
j'avais pris comme base des fêtes amicales et familiales et les
photos resteront secrètes – à vous, si avez le courage de lire
cette longue tartine, de les imaginer.
devant une
rade, deux jeunes femmes se faisant face, un bras tendu, autres
personnes
un jardin, un
couple discutant sur la gauche, un photographe derrière son appareil
un jardin, un
homme parlant, une auditrice de profil, un crâne s'intercalant
devant un
escalier bois, en buste, deux hommes à gauche, une fumeuse, deux
femmes
au dessus de
la mer un groupe habillé pour une fête, une mariée, sans doute, à
droite
un mur au
fond, une petite foule discutant, bustes d'un et d'une photographe
discutant
un salon,
femme assise dans un fauteuil, quatre personnes debout derrière, des
verres
photos
retenues
sur un fond
de feuillage vert mêlant des feuilles sur toute la partie haute et
une branche de conifère qui se glisse dessous à gauche, un coin
d'une réception, un petit bout d'une table de bois portant un objet
orange, une échelle derrière, jambes de la table et de l'échelle
ayant exactement la même inclinaison, une buche bizarrement plantée
en biais sur la petite surface d'herbe visible à droite, voisine du
bout d'une remorque de bois peinte en blanc ; la surface de l'image
est presque entièrement occupée par les bustes, jusqu'à la taille,
de deux personnages, un homme à gauche, trois quart face, chemisette
bleue dont le dernier bouton est ouvert, tête – le crâne est
chauve, encadré de gris finissant en petites pattes blanches au
niveau des oreilles – tête un peu rejetée en arrière comme pour
faire porter la voix, alors que ce n'est sans doute pas le cas
puisqu'il n'a qu'une auditrice, - une habitude sans doute – yeux
plissés comme pour mieux voir, bouche qui sourit du plaisir de
parler. Il tient un verre à pied contenant un fond de rosé. La
femme est vue de profil, une masse de cheveux ondulés, un peu
défaits par la fête, mais très soigneusement coupés pour créer
un effet mousseux sans excès, un nez très saillant et très droit,
plein d'assurance, une bouche qui s'arrondit pour une réponse, un
long cou, un bras nu, joliment charnu traverse la robe légèrement
évasée, d'une jaune franc et mat, pour rejoindre l'autre main sur
un objet cylindrique, sans doute un paquet enveloppé de tissu blanc
froncé en corolle par un galon de passementerie également blanc à
l'extrémité visible. Elle porte un collier de deux rangs de très
grosses perles noires soutenant un gland de soie rouge. Leur
proximité marie familiarité et cérémonie.
Au fond, en
partie haute, dans un lointain rendu flou par la lumière, une ville
et une petite montagne, un bras de mer frissonnante, sans doute une
rade, qui vient buter sur une rambarde noire et une table, le dessus
en raccourci portant plusieurs rangées de verres et une carafe,
juponnée de blanc. A droite le quart d'un dos masculin, complet
gris, chemise blanche, cheveux gris avec un début de calvitie et un
fragment d'un visage masculin également, bronzé de rouge, lunettes
; on ne voit rien d'autre, il est masqué par le dos précédent et
par l'épaule de l'une des deux jeunes femmes qui sont le sujet
principal. Elle est vue de trois quart face. Belle silhouette jeune,
mince sans excès, d'autant plus mince que l'attitude de départ
était certainement contrôlée et le ventre soigneusement rentré,
dans sa robe en tricot de coton drapé souplement sur le corps
qu'elle gaine, un décolleté large bordé d'un revers qui couvre le
buste et le haut de l'épaule, plusieurs rangs de perles dorées en
collerette montant sur le cou assez long. Un visage long et très
régulier, une bouche ouverte dans l'attention, des joues qui ont
encore un peu d'arrondi enfantin et des cheveux châtain doré
souples, retenu par un serre tête simple et tombant sur les épaules.
Ses deux bras sont repliés vers elle comme en attente, l'un tient un
verre à pied vide, incliné. Face à elle, de trois quart dos une
jeune femme un peu plus âgée, un peu plus épanouie, vêtue d'une
robe de gros tissu soyeux, bleu sourd assez pâle, avec des grosses
fleurs stylisées brunes et d'un bleu légèrement plus foncé,
l'ensemble donnant un peu l'impression d'un brocard, buste serré sur
une jupe évasée, une ceinture de même tissu plongeant légèrement
pour se boutonner à l'arrière et un décolleté en v, bordé d'un
revers qui s'ouvre assez profondément dans le dos. C'est cet
ensemble robe, peau du dos et du haut du bras que l'on voit surtout,
baignés qu'ils sont de lumière, l'avant bras, qui tient par le bord
un verre également vide, et le visage restent dans une ombre douce.
Elle a des cheveux courts, d'un brun légèrement roux, une petite
bouche fermée, un nez fin, le tout orienté, avec la passivité
neutre que donne l'attention, vers quelque chose qu'on ne voit pas,
vers ce que désigne le doigt d'une main, à laquelle est suspendue
un verre de vin blanc ou de champagne, au bout du bras d'une
troisième femme, presque totalement invisible - on voit juste
dépasser des mèches d'un brin doré et un mince fragment d'une
hanche en robe noire derrière la femme de gauche - mais qui, malgré
cela, est à ce moment la principale puisque c'est elle qui parle et
désigne.
Dans un coin
d'un grand salon, grandes dalles blanches, murs blancs structurés en
panneaux par des moulures peintes en ce bleu clair des stucs
provençaux, les panneaux ainsi marqués peuplés de tableaux clairs
de tailles diverses accrochés en un désordre réfléchi, une petite
commode en beau bois fruitier, dix-huitième, ou copie de bon
ébéniste du début du siècle suivant, sur la droite, une banquette
recouverte de cotonnade rouge sombre un peu éteint à guirlandes de
plates fleurs blanches sur la gauche, tissu que l'on retrouve en un
boutis jeté sur un canapé moderne blanc dont on ne voit qu'un
fragment à droite, un groupe, dessinant une forme vaguement
géométrique, resserré sur lui-même, peut-être pour complaire au
photographe, alors que l'image, prise d'assez loin – on voit au
premier plan deux petits guéridons modernes, même taille, même
forme ronde, au demeurant très dissemblables (matériau, couleurs)
–, laisse autour d'eux un large espace. Une femme encore jeune, une
cinquantaine qui ne se voit guère, assise sur un fauteuil
restauration, très simple, comme les meubles anciens des pays
scandinaves, d'après ce qu'on en voit, assise bien droite, jambes
fermement jointes, pantalon de grosse toile d'un beige très pale,
chandail gris dont le décolleté en v très large laisse voir un
chemisier sans col blanc dans un piqué légèrement brillant, des
cheveux courts, souples, striés de blanc ; elle a un sourire un peu
crispé par l'attente – il semble que le photographe connaisse mal
son appareil, hésite, et que la pose dure depuis un certain temps,
la main droite (gauche pour nous) maintient deux paquets posés sur
ses genoux, l'autre main est levée, exhibe comme en un geste
d'invite, une flute, de champagne sans doute. Derrière elle, comme
pour l'enclore, la protéger, ou comme un mur de fond lui servant de
décor, quatre personnes dont les tailles variées dessinent un
triangle plongeant sur la gauche. A droite une femme, toison bouclée
presque totalement blanche encadrant un joli visage, encore assez
ferme, où des yeux clairs semblent couler d'une petite tendresse,
tenue rurale-citadine qui est, avec des variantes personnelles, celle
de tous les personnages, un peu penchée en avant comme pour
s'avancer, reprendre le cours de ses occupations, arrêtée
aimablement pour un instant, et sourire très crispé par la durée
de cet instant. Elle tient devant elle, comme un outil oublié, sa
flute de champagne. Une main fait le geste de lui prendre l'épaule,
mais ce n'est qu'ébauché, main qui appartient à l'homme,
légèrement plus grand, crâne un peu dégarni semble-t-il, mais ce
n'est pas certain ; il rejette légèrement la tête en arrière,
menton levé, bouche entre parole et sourire, il doit venir de tancer
ou conseiller la ou le photographe ; les yeux, assez petits et très
noirs sourient. Son autre bras tient l'épaule de la femme épanouie
à sa droite, presque de même taille que son pendant, sourire franc,
visage frontal de femme dynamique, masse confortable sans mollesse,
ce qu'il faut pour accueillir sans doute des petits enfants auxquels
raconter des histoires. Son bras gauche prend le relai de celui de
l'homme pour maintenir dans le groupe la petite bonne femme,
nettement plus petite, celle qui prolonge vers le bas le côté
gauche du triangle, visage plissé, grandes rides encadrant le très
grand sourire à bouche fermée, dominées par des cernes profonds où
se nichent des yeux qui reprennent à gauche la tendresse coulante
déjà perceptible à droite. Elle est un peu recroquevillée, comme
pour s'excuser, et ses mains serrent sur sa poitrine, son ventre, une
flute et un grand paquet plat enveloppé de papier kraft. Une cellule
fraternelle, de sang ou d'élection et longue habitude (ils sont
physiquement très différents) arrêtée un instant dans le
sentiment du lien qui, distendu mais présent, en relie les membres.
9 commentaires:
Bien accroché par votre sens du descriptif (je ne suis pas allé jusqu'à la fin, l'époque rapide pour excuse).
sourire, je vous comprends !
Superbe et relu deux fois Belle idée de ces portraits masqués mais si présents dans ton discours je reste ....pantoise
et moi admirative devant tout courage
Aujourd'hui, grève dans les ateliers... :-)
oui, l'intuition est venue pour le tiers livre, mais suis très très perplexe quant au chemin à suivre vers elle
Faire beaucoup de place à l'Amour
de toute façon dans ma vie l'amour reçu et de plus en plus donné (raréfaction due à des éloignements très anciens) se trouve très au large (sourire)
It's an amazing article in support of all the web people; they will get
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