temps doux, et clair bleu
sur la cour, ce matin de dimanche... réveil tardif, entrer dans le
jour à pas très lent, faire projets en les laissant dans un flou
gracieux, se laver les cheveux et un peu de ménage acrobatique pour
réveiller carcasse, et un salut, faute de mieux, aux trois
minuscules boutons que m'offre le tout petit et très humble rosier
qui revendique ce nom et ce rôle à côté des cadavres des beaux
rosiers.
La rose règne encore dans
la ville, des boutiques proposent des objets en rapport parfois aussi
lointain que les deux grands bassins près de la gare dont les eaux
rougies doivent, je le découvre, évoquer la fleur, ou des glaces à
la rose, du thé à la rose, des ateliers de roses en papier, des
produits de beauté à se bricoler avec des roses, des sablés à la
rose, du rosé, etc... qui me laissent froides, mais je décide, puisque
je n'ai pas eu envie de sortir samedi pour la nuit des musées,
d'aller dans l'après-midi au Musée Lapidaire écouter les étudiants
du Conservatoire lire, dans le livre X (à la fin du livre X plutôt)
des Métamorphoses d'Ovide «la mort d'Adonis et la naissance de la
rose rouge» disait le programme, puis d'aller voir deux ou trois des
fontaines ornées de fleurs disait le même programme
Seulement comme j'étais
si bien dans la tendresse de la cour, à côté de mes petiotes
choses qui pourraient être l'idée d'une approximation d'évocation
de roses, comme l'heure de la lecture approchait sans que j'ai envie
de sortir, comme des nuages passaient... j'ai pris la traduction des
Métamorphoses par Marie Cosnay, posé sur le bois dégradé le beau
livre bleu (mon seul reproche, il est un peu trop beau et grand pour
une lecture désinvolte) et j'ai constaté ainsi que la rose rouge
(m'avait d'ailleurs intriguée, mais sans plus) était une imposture,
ou plus gentiment une approximation, qui a dû nécessiter que la fin
du texte soit supprimée.. qui dit
… Un
jour, les chiens qui ont suivi des traces sûres tirent de sa
cachette
un
porc, et, quand il est prêt à sortir de la forêt,
le
jeune fils de Cinyras le perce d'un coup oblique.
Tout
de suite le sanglier furieux secoue de son groin courbé
l'épieu
teint de son sang. Le garçon tremble, cherche un lieu sûr.
La
bête le suit, sous l'aine enfonce ses dents,
l'abat
presque mort sur le sable roux.
Portée
par un char léger, la déesse de Cythère, par les airs,
n'est
pas arrivée à Chypre sur les ailes des cygnes
qu'elle
reconnaît le long gémissement du mourant ; vers lui
elle
ramène ses oiseaux blancs. Lorsque, du haut du ciel, elle voit
le
corps sans âme jeté dans le sang,
elle
saute, abîme son sein et ses cheveux,
frappe
sa poitrine de la paume de ses mains qui ne méritent pas ça,
….
Le
sang est changé en fleur...
….
Elle
arrose le sang d'un nectar parfumé. Dès qu'il est touché,
il
gonfle comme si des bulles translucides
surgissaient
de la boue brune, on attend à peine
une
heure, une fleur de même couleur naît.
Les
grenades, qui cachent sous l'écorce souple leur grain,
ont
la même. Leur temps est bref.
Voilà
qui irait bien à la rose. Mais il y a la dernière phrase
La
fleur mal accrochée, fragile, d'une grande légèreté
le vent, qui lui donne
son nom, la secoue. Et là je
m'interrogeais sur ce vent au nom de rose, mais il s'agit d'une
fragile anémone (et le vent a nom anemos)
Et
pendant que je lisais un peu avant, un peu après (pour la mort
d'Orphée qui ouvre le livre XI, les nuages, qui s'étaient rejoints,
se sont heurtés bruyamment en un orage... le dernier jour des roses
avignonnaises sera arrosé.
7 commentaires:
Avec tous ceux qui sont montés au ciel, le ciel n'a pas bleui d'un centimètre cube
Les roses arrosées et l'esprit cuit au soleil
heureusement la cuisson n'est pas trop forte encore… sera bientôt intenable la cour
Rouge le sang de l'amourrrrr toujours
rouge foncé de l'anémone (sourire)
Le tragique des fleurs, sans parler des roses, c'est qu'elles meurent aussi.
dans le climat de ma cour ce ne sont pas seulement les fleurs mais leurs plantes-mère qui meurent
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