commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

dimanche, octobre 06, 2019

Un hommage

Matin le ciel bleu pur s'adoucissait de faibles griffures blanches, et Brigetoun malgré cette gentillesse a senti au bout d'une centaine de pas environ son corps se décider aux caprices, et de vertige en vertige, de brusques paniques en sourire forcé,
s'accrochant fraternellement à la lubie d'un arbre qui vieillit en désordre fantasque,
à la tendresse d'une vierge de deux pigeons et de l'ombre,
et même au funiculi funicula de quelques musiciens si touchants de tenter l'animation d'une place presque vide, pensait au soir, au Chêne noir, à la lecture de passages de la Divine Comédie en l'honneur de la semaine italienne par Gérard Gelas et Serge Barbuscia sur des musiques de Julien Gelas https://www.chenenoir.fr/event/la-divine-comedie/ et croyais descendre avec Dante et Virgile vers le deuxième cercle, celui des violents « Cosi prendemmo via giù per lo scarco/ di quelle pierre, che spesso movienssi... Ainsi nous descendîmes par cet amas de pierres, qui souvent remuaient sous mes pieds par l'effet de la charge inhabituelle...
 
Mais en fait, après que avoir regagné avec petite charge et un pas qui se raffermissait mon antre, après un peu de ménage et une trop longue et lourde fièvre, me sentant si absurdement lasse que mes bras semblaient (du moins je l'imaginais ainsi) avoir échangé os pour eau, ai renoncé à me changer et m'en aller dans une petite foule de mes contemporains écouter ces deux belles voix et me suis dit qu'en fait je n'étais digne que du Vestibule, peut-être pas des esprits neutres
   Là pleurs, soupirs et hautes plaintes
résonnaient dans l'air sans étoiles,
ce qui me fit pleurer pour commencer.
   Diverses langues, et horribles jargons,
mots de douleur, accents de rage,
voix fortes, rauques, bruits de mains avec elles,
voci alte e filoche, e suon di man con elle
   faisaient un fracas tournoyant
toujours, dans cet air éternellement sombre,
comme le sable où souffle un tourbillon.
.
   Et lui à moi : «Cet état misérable
est celui des méchantes âmes humaines
qui vécurent sans infamie et sans louange.
   Ceux-ci n'ont pas espoir de mort
et leur vie aveugle est si basse
que tout autre sort leur fait envie.
   Le monde ne laisse pas de renommée pour eux,
miséricorde et justice les méprisent :
ne parlons pas d'eux mais regarde et passe.
Mais assurément que me rangeais avec la foule des suivants (dont l'ombre de Célestin V qui, consacré pape en 1294 renonça quelques mois plus tard, à moins que ce ne soit l'ombre de Pilate, d'Esaü ou de Julien l'Apostat – lui je l'aime bien – que désigne celui che fece per viltade il gran rifiuto qui fit par lâcheté le grand refus)
que j'étais digne de figurer au nombre de la secte des mauvais qui déplaisent à Dieu comme à ses ennemis. Mais même la punition qui est la leur : être, nus, soumis à un essaim de mouches ou moustiques, n'a pas suffit à me propulser hors de mon cocon endormi et n'étant pas davantage capable d'ajouter une dixième ligne à la première hypothèse pour le #9 de l'atelier de François Bon, ni d'inventorier les frusques d'hiver (ai commencé à ranger une partie de l'été) j'ai pris le Paradis ce qui est fort beau mais tout de même beaucoup moins tonique que l'Enfer. (Je n'ai pas le Purgatoire)

8 commentaires:

Dominique Hasselmann a dit…

Diantre ! Ces lectures vous emmènent dans des labyrinthes ouvrant de multiples portes cachées...
Le ciel vous accompagne par sa présence fidèle.

Brigetoun a dit…

Dominique, merci... pourvu que ça dure (le ciel)

Anonyme a dit…

Vestibule...jaime ce mot et qu'il comporte d'attente désespoir et de regret Bravo pour la participation partagée AA

Brigetoun a dit…

sauf que, justement, je n"ai pas participé

jeandler a dit…

" être, nus, soumis à un essaim de mouches ou moustiques...", un écorché à la Richier.

Claudine a dit…

Je ne suis pas la seule à lire ces lignes avec le son de votre voix en tête, gravé comme sur un vinyl

Brigetoun a dit…

Pierre, c'est le vestibule, ce ne sont que mes frères lâches les punitions futures sont bien pires

Brigetoun a dit…

merci Claudine (euh affronter Dante, je crois que c'était plus dans les possibilités des deux acteurs, avec leur âge leur autorité leur talent leur italianité que ne suis pas allée entendre (l'envie du petit animal de se cacher)