Honte parce que le ciel était bleu, nous étions lundi jour où la plupart des travailleurs reprennent, âme légère ou épaules sous le joug, le travail (cheminant ou s'asseyant devant leur écran), mais, sous le prétexte que dans le bleu passaient, rapides, de grands nuages blancs, sous le prétexte que les feuilles du vieux rosiers dansaient, sous le prétexte du froid qui filtrait par la porte-fenêtre ou s'engouffrait avec les petites plumes de tilleul lorsque je l'ouvrai, sous le prétexte aussi que je me murmurai «j'ai mal», ai pratiqué la «saint-lundi» et ne suis pas sortie.
Lavage cheveux, ménage, recul devant le projet de ranger l'hiver et commencer à repasser le printemps (ou les vêtures assorties), déjeuner avec l'Alexandre Dumas de 1830, écouté l'interview sur Equinoxe Tv de Maximilienne Ngo Mbe https://fr.wikipedia.org/wiki/Maximilienne_Ngo_Mbe lauréate 2021 du prix international de la femme de courage, à propos de l'état du Cameroun,
et puis j'ai repris ce livre dont l'existence ne m'était que petit regret, que j'avais considéré, de confiance, comme non-intéressant pour moi en 1963, lors de sa parution, dont je savais vaguement qu'il existait pendant toutes mes années de lectures anarchiques (qui comportaient par chance tout de même Sarraute, Simon, Michon et surtout des correspondances ou textes du dix-huitième siècle) où je refusais de m'intéresser à un livre (hors policiers) pour autre raison que l'écriture, livre dont j'ai découvert l'importance pour tant de gens depuis qu'internet me relie à des lecteurs, qui m'était devenu un remords tournant quelque part dans un coin de mon crâne parmi tant d'autres et que j'ai trouvé dans le paquet-cadeau de livres, «L'usage du monde» de Nicolas Bouvier (oui, j'avoue) que j'ai ouvert un peu après onze heures hier et dont l'écriture, justement, le ton etc... me furent découverte prenante (et les dessins de Thierry Vernet avec leurs belle épaisseur des traits noirs y contribuaient).... que j'ai abandonné, provisoirement, ce soir, vers six heures sur un paragraphe que je trouve proche d'une certaine perfection (citation un peu longue, vol pour lequel je demande indulgence)
«... Cela plaisait pourtant. Au bout d'un chapitre, le pharmacien essuyait ses lunettes, murmurait : «j'aime Perrault... c'est si doux» et sur cet aveu, piquait dans son cahier, rouge comme une pivoine. Pendant que Carabosse ou Carabas, syllabe par syllabe, livraient prestiges et secrets, la nuit descendait sur la ville, puis la laine de la neige sur les rues noires. Mes vitres se couvraient de nuages de givre et les premiers chiens parias commençaient à hurler...»
6 commentaires:
Un livre qui fait évidemment voyager.......................................................................................................:-)
c'est un peu ce qui me retenait à l'époque d'aller y voir, mais il ne se borne pas à ça
J'avais lu L'usage du monde il y longtemps et au fil des années il s'est inscrit comme un de ces livres que j'aime feuilleter cycliquement comme Sur la route ou Racleurs d'océans d'A Conti. Une question qui me taraude: l'idée que nous serions passés d'une écriture du voyage à une pléthore d'écrivains voyageurs. Dans un monde où il n'y a plus grand chose à découvrir, je trouve que certains d'entre eux, voyageant pour produire des livres, y voient une opportunité de faire le tour de leur nombril. Tendance très XIX ième siècle à pleurer les mondes perdus tout en nous abreuvant de plates considérations écologiques contemporaines. Mais je peux me tromper...
Claudine C-C
peut-être... et puis a joué aussi ma sotte (mais à laquelle j'ai longtemps tenu, et dont je ne suis pas vraiment débarrassée) réaction du "pas comme tous" qui a joué longtemps (mais moins) contre la lecture de Proust ou Duras et qui joue toujours contre Simenon (mon goût également pour ce dernier, j'ouvre et referme presque aussitôt ses livres)
Un récit sublime, trivial et poétique, une belle entente en dessins et texte. J'aime.
https://www.rts.ch/play/tv/a-livre-ouvert/video/lusage-du-monde?urn=urn:rts:video:3467006
j'ai mis le temps pour vérifier que j'y étais bien
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