J'ai
passé deux heures à chercher des livres, des poèmes, que dans ma
pagaille je n'ai pas trouvés. Parce que j'aime notre arbre, ô
méditerranéens. Alors, un peu n'importe quoi, trouvé en tournant
en rond dimanche matin :
«Il
est un arbre dont je n'entends pas dire qu'ai germé son pareil, soit
en terre d'Asie, soit dans la grande île dorienne de Pélops ; arbre
invaincu, arbre qui renaît de lui-même, terreur des lances de
l'ennemi ; il croît surtout dans ce pays : c'est l'olivier aux
feuilles pâles, nourricier des enfants. Les chefs ennemis, jeunes ou
vieux, ne le détruiront jamais, car l'oeil toujours ouvert de Zeus
Morios veille sur lui et Athéna aux yeux brillants.»
Sophocle
– «Oedipe à Colonne»
«C'est
moi qui fit la besogne et personne d'autre. Un olivier touffu aux
feuilles étendues avait poussé, dans l'enceinte de la cour. Il
était en pleine croissance, dans sa première vigueur, gros comme
une colonne. Autour de l'olivier, je construisis la chambre, jusqu'à
ce que j'eusse terminé, utilisant des pierres bien jointes ; et
par-dessus je fis un bon toit. Je mis en place une porte de solide
assemblage, étroitement ajustée. Ensuite je tranchais la chevelure
de l'olivier aux feuilles étendues. Je taillais la souche, en
partant de la racine, je la polis tout autour, à l'aide d'un outil
de bronze, avec soin, en homme de savoir, et la dressai au cordeau,
la travaillant en forme de pied de lit. Je perçai toutes les pièces
avec une tarière ; je pris la souche comme base et façonnai le
cadre du lit, jusqu'à ce que j'eusse terminé, utilisant l'or,
l'argent, l'ivoire, pour le décor. J'étendis dessus une courroie de
cuir de boeuf, brillante de pourpre..»
Homère
- «l'Odyssée»
«À
Delphes, sur la terrasse de l'hôtel,
je
fus un cheval aimant et je chante encore
la
barque aux flancs légers qui m'a fait retrouver
la
saveur antique, la saveur
primitive.
À l'ombre des oliviers
la
terre s'est ouverte au ciel, à la lumière des eaux..»
Casimiro
de Brito – traduction Michelle Giudicelli
«Et
mon père est en bas
Il
porte un olivier vieux de mille ans
Qui
n’est ni d’Orient, ni d’Occident
Il
se repose peut-être des conquérants
Se
penche légèrement sur moi
Et
me cueille des iris»
Mahmoud
Darwich «pourquoi as-tu laissé le cheval à sa solitude ?»
«On
remplissait à la pelle de bois les couffes de sparterie semblables à
des bérets d'un mètre de diamètre avec la pulpe ruisselante dans
laquelle la meule tournait. Ces bérets étaient empilés les uns
sur les autres sous le plateau de la presse. Il y avait cinq ou six
de ces presses. Huit hommes nus armés de longues barres de bois
plantaient ces barres dans les trous du moyeu et, tirant de toutes
leurs forces, exprimaient l'huile....
Déjà,
l'huile était comme de l'or. Chaque fois que l'équipe bandait ses
reins, tirait sur la barre, tout le presse s'illuminait d'huile comme
si on avait allumé une grosse lampe dans les couffes de sparterie.
Elle glissait dans des canalisations de bois jusqu'à la grande cuve
d'eau fumante que chauffait le brasier. Là, elle s'y dépouillait,
elle y perdit ses humeurs. Quatre hommes, exactement comme des
diables et qui paraissaient même être en métal luisant tant ils
étaient barbouillés d'huile, armés de grandes louches cueillaient
la «vierge» qui état montée
à la surface de l'eau.»
Giono
«Arcadie, Arcadie»
«Dominant
le port et la ville de Tingris telle une vigie, une petite maison
solitaire bâtie sur la corniche. Assis dans le patio à ciel ouvert,
les jambes allongées sous une table basse et ronde, le général
Tariq Bnou Ziyyad prenait son petit déjeuner dans un concert
d'oiseaux saluant le lever du soleil. Sa galette d'orge, il la
mastiquait soigneusement, lentement, comme s'il avait tout le temps,
sans presque faire bouger ses mâchoires. Chaque bouchée était
suivie d'une gorgée de petit lait, puis d'une olive violette. Sur la
table s'entassaient un à un les noyaux, à mesure que les chefs des
commandos s'inclinaient l'un après l'autre devant lui et faisaient
leurs rapports.»
Driss
Chraibi
«Naissance
à l'aube»
Tout
cela, pardonnez-moi, si vous avez lu, parce que j'aime cet arbre,
donc, et ses légendes, mais surtout pour lui faire un peu honte à
lui, le fol de ma cour, lui apprendre ce que doit être un olivier
qui se respecte, qui étale ses branches, au dessus d'un tronc
puissant, qui se creusera, se ravinera avec les ans, comme celui
plusieurs fois centenaire qui ouvre la série d'images, accroché à
une terrasse au dessus de la plaine d'Ollioules, un arbre aux
merveilleuses petites feuilles qui dédaignent le vert, se contentent
d'un gris que le soleil argente quand le vent les retrousse.
Il
s'est haussé du col, m'a rappelé que j'étais son soigneur, m'a
demandé si, moi, je savais en parler comme, par exemple Homère (là
il prenait un risque parce que l'olivier de l'Odyssée, du moins
celui là, subit un sort honorifique mais passablement cruel – mais
il n'avait pas tort, cette longue tartine ayant pour but de trop
m'occuper pour que je songe que je suis incapable d'écrire le texte
que voulais, même sans imaginer un instant que je pourrais égaler
cela).
Mais il est le seul en situation.
15 commentaires:
Vous vous en doutez bien. Je partage ce grand intérêt pour ces géants de la nature, l'arbre. J'aurais voulu écrire un si bel hommage et j'ai parcouru à plus d'une reprise cette rubrique toute en séduction. D'Homère à Giono, l'éventail est riche et les liens rigoureusement choisis.
pas vraiment un géant l'olivier, même très vieux - un nain par rapport aux arbres même de notre coin, mais un arbre qui nous est spécifique
Celui sur mon balcon n'a pas été "emballé", comme l'année dernière, pendant les jours de froid (- 7°C maxi), il faut que je pense à aller voir dans quel état il est (enrhumé ?).
Merci pour ce bouquet de citations !
Symbole de la longévité, l'olivier, et de l'espérance.
Quelques uns sont mes amis depuis la plus petite enfance...
merci aux dévoués -
Magnifique olivier multi-centenaire, une merveille.
Connaissez-vous les trois oliviers qui sont à côté du pont du Gard ?
L'un d'eux a 1104 ans.
celui-ci aurait plus de deux cents ans
On l'a souvent prié qu'il nous fiche la paix
Moi aussi, j'aime. Il n'y en a pas chez moi !
Bien évidemment, chère amie, il fallait interpréter le mot géant dans un sens poétique. Quelle que soit la hauteur d'un arbre, se cache en lui un géant de la nature et de son environnement. La taille d'un bonsaî en témjoigne.
je sais bien Pierre, mais d'instinct j'ai pensé à vos photos d'arbre, parce que, chez vous, il y a des géants à tous les sens du mot
Et justement l'olivier est un arbre à notre échelle
je n'ignore pas que c'est criminel
mais un olivier a été déporté de Provence pour m'être offert par surprise en Condroz
le malheureux passe un hiver calamiteux
chaque jour, je lui parle par entière sympathie
mais que pèsent ces mots face aux nostalgies et aux frimas ???
Je le vois grandir sur ma terrasse mon olivier, avec l'œil gauche par la grande porte fenêtre et en plein soleil,ce jour même, alors que je vous écris...
Olivier sculpture plus il est vieux et noueux plus il est beau
"Arbre à ma mesure"... si vrai
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