commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

samedi, décembre 01, 2012

Vrai ou faux souvenir, pour jour d'absence à soi


C'était, dans le salon des grands-parents un grand-oncle qui me trouvait une ressemblance avec la femme morose en robe puce et petit chignon, visage ovale classiquement penché dans l'ovale découpé au centre du lourd cadre rectangulaire de bois doré. C'était ma mère dans la petite lettre-legs, ou le club des soeurs et le frère , je ne sais plus, me l'attribuant. C'était l'aimer par une sympathie mélancolique, avec un peu d'ennui et un petit recul devant son insignifiance comparée aux photos radieuses de sa fille ou belle-fille, mon arrière grand-mère, et le charme et l'assurance de la généalogie de femmes qui me précédait. C'était, un mois après le second deuil, le rendez-vous avec une entreprise de déménagement conseillée par le garde-meuble où j'avais retenu un petit emplacement, pour libérer l'appartement, et avoir temps et énergie de tenter de faire place dans mon petit taudis. C'était embarquer avec les déménageurs dans le camion où ils avaient chargé le tableau, un petit carton contenant quelques assiettes à dessert aux roses pâles doucement ridicules que j'avais offertes à ma mère, deux dessins d'un ancêtre dont j'aime la mini révolte et le talent, une grande bibliothèque et la jolie petite table volante aux longs pieds, belle copie du début 19ème d'un type Louis XVI, qui m'était vieille amie. C'était la gentillesse bavarde des deux bonshommes, le long périple fait avec eux pour des livraisons avant d'arriver devant le grand hangar de ciment. C'était être à coté de moi, à côté du monde, hors de toute réalité, dans une lassitude neutre. C'était signer des papiers en leur laissant le soin de ranger mon dépôt. C'était fermer devant eux le verrou, après un coup d'oeil rapide buttant sur le chêne noir de la bibliothèque. C'était revenir avec eux un peu plus d'un mois plus tard pour le transfert final. C'était le choc incrédule en constatant l'absence du cadre et de la table. C'était comprendre qu'un diable avait sans doute été soigneusement laissé hors de ma vue. C'était leur tranquille déni et mon incapacité à sentir autre chose que ma culpabilité. C'était le tenancier des lieux me disant que son assurance ne paierait rien puisque c'était à moi de vérifier la présence des meubles et objets lors de la fermeture, et puis me moquer de l'argent. C'était ne pas avoir le choix, monter dans le camion où le reste avait été chargé, remercier les deux bonshommes du mal qu'ils s'étaient donné pour hisser la bibliothèque par mon petit escalier. C'était prévenir les soeurs. C'était leur réprobation et leur pardon. C'était me refuser tout pardon, et regretter ce visage bien plus que je n'aurais aimé le trouver tous les jours sur le chemin de mon regard.

Ce fut un petit matin de grondement de l'air derrière les volets bleus, ce fut l'idée du froid plus que sa réalité, ce furent quelques pas à peu près lucides sur internet, une accalmie, les volets ouverts, un petit frisson, une lumière qui pensait venir et le balancement lent du roseau, se rendormir.
Ce fut se réveiller à nouveau, fort tard, renoncer aux halles, un petit tour utile dans le quartier, se rabattre sur imitations de ce que voulais et revenir, yeux pleurant en grande humidité pour la première fois de l'année, le ciel pur sans violence, les branches mouvantes, secouées de brusque frénésie parfois, ce fut l'antre, une remontée rapide de ce qui s'était posé sur twitter, ce fut une journée un peu à côté de soi, lucide, assez, mais non engagée dans cette lucidité, sauf éclairs d'acquiescement à ce que lisais, ce fut un essai d'élagage de mon vase sans forme ni idée, ce fut reprendre un vrai ou faux souvenir qui s'était risqué sur un ancien convoi des glossolales, http://leconvoidesglossolales.blogspot.fr/ et que j'hésitais jusque là à rendre évident.

5 commentaires:

Pierre Chantelois a dit…

Un oubli qui rend malheureux parce que la pérennité du souvenir est compromise. Beau texte sur une image devenue fugitive parce que rangée loin derrière les souvenirs. Et retour du bleu azur qui écarte ces nuages qui assombrissent la vie.

Dominique Hasselmann a dit…

Mais le verrou, c'est aussi un tableau...

Brigetoun a dit…

a grand mère avait quelques dizaines d'années de moins

jeandler a dit…

L'esprit égaré
le tableau évanouit
on ne sait renaît
ses traits dessinés
à l'estompe du souvenir.

arlette a dit…

C'est bien souvent ce que nous n'avons plus qui devient si précieux et irremplaçable