dans
les rues d'Avignon, cheminer en goûtant l'amorce de printemps, la
lumière éblouissante sur la place de l'horloge,
la
tendresse du ciel, l'impression d'avoir vraiment un peu trop chaud
avec la petite parka grande ouverte,
refaire
provisions et chercher des nourritures qui ne me fassent pas courir
risque de ratage, et respectent un poco ma paresse, pour le passage
dans l'antre, lundi, de gentils toulonnais qui font ce détour avant
d'aller au palais
rester
un moment dans cette douceur, ... regarder vaguement le ballet des
représentants des candidats - en saluer une - les musiciens, les
acheteurs, les flâneurs, les gens attablés aux terrasses, les
touristes (et pardon demandé à la très charmante dont j'ai capté
l'image sans le vouloir)
et
partir avec belle charge... dans l'après midi sieste, thé, essayer
de voir comment installer six personnes dans le cadre de ma solitude,
compter verres etc... écouter France Musique en promenant, avec soin, l'aspirateur, et la serpillère... et basta, un peu de
repassage et tenter de forcer Jasmin à me dire la suite de
l'histoire du duc d'Ormond et de la marquise. Reprendre, en
attendant, le début tel qu'il est paru chez les cosaques des
frontières http://lecosaquesdesfrontieres.com
Petites
histoires avignonnaises – le duc d'Ormond – 2 – la marquise
Donc
le duc d'Ormond, remercié par le nouveau pouvoir après la mort de
la reine Anne d'Angleterre, le couronnement de Georges, l'électeur
de Hanovre, et le retour des wighs, avait rejoint la cour jacobite au
moment où la mort de Louis XIV et l'arrivée du Régent changeait
l'attitude de la France à l'égard de cette dernière et, après
l'échec de l'aventureux débarquement en Ecosse, en 1716, quand le
chevalier de Saint Georges ou le roi Jacques dû choisir de
s'installer à Avignon, il l'y précéda pour préparer son
installation.
Avignon
est une Ville remplie de gens de Condition. Le Roi Jacques n'y fut
pas plutôt arrivé qu'il eut une Cour assez nombreuse tant des gens
du Pays que des Anglais qui l'avaient suivi… Bientôt les plus
distingués de cette Ville s'empressèrent à lui témoigner par
toutes forces de divertissements, la joie qu'ils ressentaient de sa
présence.
Ce
fut dans ce Pays que je commençai à me consoler, dans les plaisirs
de l'Amour, de la cruelle ingratitude de ma Patrie. Parmi toutes les
Dames qui s'empressaient à faire leur Cour au Roi je jetai les yeux
sur la Marquise de V…
ooOoo
Cette
marquise de V qui était certainement jeune, belle et touchante, j'ai
cherché à savoir qui elle était, en longue balade pour le plaisir
des noms et des mots dans l'«Histoire héroïque et universelle de
la noblesse de Provence», publiée chez la veuve Girard, rue Saint
Didier à Avignon (sur Gallica), balade distrayante et sans espoir,
d'autant que je n'ai trouvé que le tome 1. Ma foi cela n'a guère
d'importance, d'autant que rien ne dit que le Duc, ou celui qui a
rédigé en son nom ces mémoires, n'a
pas triché sur l'initiale, ou confondu deux noms, puisqu'à
la fin de sa vie il y eu bien une marquise de V., avignonnaise, mais
qui n'était pas la même.
Pour
mettre de la distance entre le texte du Duc et moi, me libérer de
ses phrases, je me suis adressée à un de ses laquais, disons Jasmin
- puisqu'il intervient sous ce nom dans
le récit fait par le Duc - dont je choisis de penser qu'il était
témoin aiguisé, et peut-être, parfois, un peu le confident de son
maître,
«Oh
oui je me souviens de la marquise de V.... Elle était parmi les plus
charmantes des dames de la noblesse de votre ville en ce temps, et un
léger voile de tristesse, un peu de retenue dans sa gaité, la
faisait remarquer. Elle était séparée, depuis peu de temps je
crois, de son mari, et le duc, n'ayant plus à intervenir entre les
rois et les camps, s'est empressé de tenter un rapprochement. Il en
avait fait publiquement le pari. Pour le mari, que l'on voyait peu,
je ne sais s'il avait déjà entrepris de le convaincre ce jour où,
un après-midi, comme le vice-légat avait ouvert les jardins auprès
de la Mirande à une petite société, dont elle était, le duc s'est
légèrement écarté avec la marquise de V., jusqu'à s'isoler. Je
restais à portée d'appel, et je les ai vu s'entretenir longuement,
elle assise sur un banc, tête penchée avec une tristesse touchante,
lui, debout, penché respectueusement vers elle, l'écoutant avec
attention, et quand ils sont revenus vers les autres dames et
gentilshommes, Monsieur d'Ormond avait l'air fort attendri.
Ce
soir là, me parlant ou se souvenant à haute-voix, pour mieux se
persuader, avant le souper, il redoutait, sincèrement ou non, que
toute réconciliation s'avère impossible, le marquis étant un
animal de rudes moeurs
- C'est l'effet de ces mariages que fomentent les familles. Elle avait quinze ans et ne l'avait vu que trois fois avant que cela soit consommé.. et pourtant elle dit qu'elle l'a aimé – c'est vrai que je l'ai trouvé fort beau lorsqu'on me l'a montré – et qu'elle a été heureuse pendant trois ans, et lui a donné deux fils. Mais après la mort de son père, alors qu'elle en portait encore le deuil, il s'est senti libre de se montrer tel qu'il était, il est devenu indifférent, brusque, il la laissait seule, et puis, un triste jour, il a installé chez eux une créature, une jeune femme à qui, à regret, elle reconnaît un certain charme comme ne peuvent en avoir les dames de sa condition, une couturière à ce que j'ai cru comprendre. La marquise a montré sa douleur et sa surprise, il s'est mis en colère et lui a dit que cette femme était son amie bien avant leur mariage, et qu'il n'avait cessé de l'aimer et la voir. Elle a protesté, il la menacée, elle s'est enfermée dans sa chambre pour pleurer.... J'ai tenté de lui dire qu'elle avait toutes les raisons de se plaindre de lui, mais que le pardon était.. mais elle s'est écrié que je ne savais pas tout, qu'il avait fait bien pire, que parce que, ne pouvant supporter cette humiliation, mais encore amoureuse, elle plaidait, le suppliait – oh la faiblesse à laquelle sont réduites les femmes – il l'a injuriée et battue. C'est ce qui l'a poussée à le quitter, à retourner chez sa mère. Que je devais bien voir qu'il ne saurait être question d'une réconciliation, que le marquis ne le voudrait pas, que d'ailleurs elle le méprise maintenant autant qu'elle l'avait aimé... Et elle m'attendrissait, je l'admirais, je crois que je le lui ai laissé voir, car elle m'a dit que rares étaient les âmes comme la mienne, et qu'elle était bien malheureuse que son mari ne me ressemble pas.
Dans
les jours qui suivirent, chaque fois qu'ils se rencontraient, leur
entente se montrait un peu plus. Et - ma foi je ne suis plus tenu à
la discrétion - j'accompagnais le duc certains soirs pour des
rencontres qui duraient fort longtemps.
C'est
le genre de secret qui ne le reste pas, cela se sut, cela parvint au
mari, qui se piqua de regarder sa femme et d'en tomber amoureux.
Comme
il ne savait comment la reconquérir, il prit le parti de s'adresser
tout simplement au duc, feignant de ne pas savoir ce qui le liait à
sa femme, et de le prier de s'entremettre.
Le
duc était honnête homme, il en parla, la marquise rit, et refusa de
le changer contre tous les maris du monde.
Il
répondit donc au mari qu'elle ne voulait rien entendre, et que le
mieux était de laisser faire le temps."
Et
ce qu'il en advint, Jasmin et moi, nous vous le raconterons une autre
fois.
5 commentaires:
On vous suit dans le jour, dans le temps, dans vos histoires, et que j'aime vos images des étals des marchands, de la nourriture, des marchés, je les regarde autrement grâce à vous !
c'est que je ne cesse de m'ébahir de me retrouver faisant marché avec attention et un poco de cuisine - il m'aura fallu les 3/4 d'une vie pour y arriver
Oui, soleil depuis deux jours... on a l'impression d'avoir changé de saison, comme le montrent vos photos !
et, après petite hésitation aux premières heures, cela semble continuer... tant mieux pour mes petits toulonnais ! un peu de vent, j'espère qu'il ne va pas amener crasse
Tu n'as pas ton pareil pour photographier joliment , platanes sur fond de ciel bleu et étals au marché.
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