partir un peu après dix
heures vers le confluent, ou presque
cheminer dans la chaleur
naissante le long de la rue Joseph Vernet
cueillir en passant, pour
jouer avec et fixer mon attention hors de ma rumination, la dernière fleur du chèvrefeuille
au coin de Saint Charles
et saluer les couleurs qui
viennent à la bignone
et la fin du gros oeuvre
de l'extension de la collection Lambert – reste l'aménagement des
salles et l'accrochage (plus beaucoup de temps pour ouvrir avec le
festival)
rouler de cité en cité
et descendre devant la
clinique qui allie le Rhône et la Durance proches
suivre la procédure,
et attendre longuement, en
feuilletant les braises de
Sandor Marai, et retrouvant la légère antipathie qui naissait peu à
peu en moi en suivant la confession/accusation/interrogation de
Henri, ou le général, ou le fils de l'officier de la Garde (qui
sont un seul et même personnage) - parce que le récit étant fait
en grande partie par lui, à travers la belle confiance qu'il a en
l'amitié et l'amour transparait sa naïve certitude qu'elle lui est
due, lui qui a tant de succès, qui correspond si parfaitement à sa
place dans la société, et que cela empoisonne l'empathie que l'on
pourrait avoir pour les trahisons, les désilusions qu'il subit, même
s'il croit chercher en quoi il les a mérités -, attendre donc
les images qui vont me permettre de prouver, lors d'un dernier
rendez-vous que, bon mes poumons ne sont pas ravissants, mais ne
changent pas, et de me consacrer, tranquillement, sans énervement
perturbant, au réglage très défaillant de carcasse auquel les
médecins ne peuvent plus rien, qui m'appartient (pas douée en ce
moment)
Repartir, en m'amusant des conversations entre le chauffeur et les habitués (très paternel avec les ados, le chauffeur, et joli petit jeu entre eux)
retrouver les rues
d'Avignon qui se peuplent de plus en plus, croiser des silhouettes
qui disent vacances...
bricoler un repas rapide
et m'installer, idiotement - comme une touriste alors que nous entrons dans la saison des volets entrouverts -, dans la
belle réverbération de la cour, un peu après deux heures et demi,
devant mon assiette.... me replier rapidement dans l'antre, toute
ensuquée, et dès la dernière bouchée, sombrer délicieusement en
profonde sieste.
Inaugurer une jupe un peu
trop courte pour mon âge, en damas où s’élancent des oiseaux, et
m'en aller vers l'opéra, vers le spectacle lauréat de l'Armel Opera
Competition and Festival en liaison avec Arte, pour 2014, le braci
ou les braises,
opéra en un acte de Marco Tutino sur le livret qu'il a tiré du roman du même
nom (raison pour laquelle je l'avais pêché dans ma bibliothèque)
monté par l'Orchestre Symphonique de Szeged
Un
peu intriguée j'avais cherché mardi et trouvé ce lien
http://www.evsfx.fr/2014/08/creation-mondiale-de-l-opera-de-marco-tutino-le-braci.html
vers la création à Budapest de ce spectacle (même distribution,
mêmes interprètes que ce à quoi j'assistais)
Adaptation du célèbre
roman hongrois de Sàndor Màrai Les braises, cet opéra raconte les
retrouvailles en 1940 de deux vieux amis d’enfance inséparables
qui se sont connus à l’école militaire de Vienne : Henrik (fils
de prince hongrois) et Konrad (issu d’une famille de petits
bourgeois polonais). Ils ont aimé la même femme, Kristina, mais
c’est Henrik qu’elle a épousé. Konrad a disparu pour les
tropiques et les colonies du jour au lendemain, après une partie de
chasse qui a failli tourner au meurtre et, quarante ans plus tard,
les deux hommes se revoient une dernière fois pour évoquer le passé
et reparler de Kristina, morte depuis des années. Henrik
connaîtra-t-il enfin la vérité sur ses suppositions de tentative
de meurtre par Konrad et d’infidélité de sa femme ?…
et je
me demandais un peu quelle serait l'importance du rôle de Konrad,
chanté par Jean-Philippe Biojout (dans le roman il est à la fois
très présent et quasiment muet, ses réactions se devinant surtout
dans les inflexions du discours d'Henri, avec la distorsion probable
venant de l'égotisme de ce dernier, qui s'interroge tout autant sur
lui même que sur Konrad et Kristina et sa relation à eux)
J'ai
découvert, mercredi après-midi, n'écoutant que les dix premières
minutes, juste le temps de trouver la musique au moins intéressante,
une vidéo reprenant l'intégralité de la création, sur le compte
YouTube de Jean-Philippe Biojout
une
salle presque aux trois quart vide, les avignonnais semblent manquer
de curiosité, ou la douceur des soirées ne leur donne pas envie de
s'enfermer dans une salle.
L'habile
façon qu'a le livret, qu'a la mise en scène de tisser ensemble le
passé et cette rencontre des deux vieux – vêtus de blanc,
maquillés de pâleur, comme le décor sous la lumière froide qui
s'applique aux moments de leur rencontre – au présent, un présent d'outre-temps comme la gouvernante le dit à la fin – est
blafard, tissus blancs et boiseries bleu-gris délavées, alors que
la lumière se réchauffe quand s'y mêlent les personnages –
visage de chair et vêtement colorés – rajeunis, les deux hommes
et Christine qui n'apparaît que dans ce temps recréé, ainsi que
les figurants.
Un
rééquilibrage des personnages puisque le récit d'Henri étant
remplacé par sa représentation, seule reste son interrogation, sans
que sa présomption n'apparaisse autrement que lorsqu'il s'en accuse,
alors que Konrad perdant un peu de l'épaisseur que lui donne son
silence relatif dans le roman, tend à mériter le qualificatif de
lâche que lui donnent Henri et Christine.
Une
musique qui donne plus de place à l'orchestre qu'aux voix, que j'ai
aimée (à part quelques effets qui font un peu trop penser à une
bande pour un film ou la télévision);
Et
le petit public qui était un peu pénible au début – des
chuchotements, des changements de place, puisqu'on avait largement le
choix, sans grande discrétion, quelques écrans allumés – s'est
assez rapidement concentré, captivé, avant des applaudissements qui
tentaient d'annuler le vide.
8 commentaires:
Les "braises" sont également en représentation annoncée (sur le plan météo) pour les jours à venir...
Le Festival fait bien de se mettre déjà dans le bain !
bien failli devenir braise dans ma cour/four - apprendre à ne plus y stationner entre midi et trois heures
Ah, la rue Joseph Vernet, nous finissons par la connaître à force de vous lire.
Cela ne peut durer .. braise comme froidure juste un peu trop
une des rues importantes (sur les anciennes fortifications) et un de mes trajets obligé, dans le calme en plus
Arlette, réapprendre l'ombre… et les soirs sont tellement délicieux
(Je me sens concerné par le sens interdit...)
pour le franchir il est nécessaire d'avoir un produit qu'on vous branche en vous faisant aller et venir dans un petit tunnel
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