Dans l'avant petit-jour, ai
fait place pour les santons, et comme toujours les bonnes femmes
regroupées ont appelé la mater qui vieille sur l'ordinateur.
Et après douche,
friction, grattage crâne et bas du dos, ai entrepris le rite crèche.
En sortant mon petit
peuple, en tentant de les photographier par groupes, les ancêtres ou
approchant d'abord, les jeunes et du mitan de vie ensuite, en les
massacrant aussi - étaient pudiques - avais vague envie de chercher des vieillards
littéraires dans ma mémoire.
Et pour les hommes est
venu, tout de suite, Nestor, mais finalement, en reprenant l'Iliade
et l'Odyssée j'ai découvert que sa drue sagesse qu'aime tant se
manifestait surtout dans ses discours, admonestations, accueils, et
qu'il y avait peu d'indications sur son apparence. Juste, ou presque,
ceci, au début de l'Iliade
… devant eux se leva
Nestor au doux parler, le clair orateur des Pyliens, dont la langue
laissait couler une voix plus douce que le miel. Il avait vu deux
générations déjà disparues d'hommes mortels, qui étaient nés
avant ce temps et avaient été nourris avec lui dans Pylos toute
divine. Il régnait parmi ceux de la troisième...
(traduction Louis Bardollet)
Pour les femmes, celle-ci,
qu'ai toujours aimée, malgré tout, dans les Géorgiques de
Claude Simon
Et une fois par mois,
la vieille dame (la vieille veuve toujours habillée de noir, au
visage de bougie, perpétuellement éplorée, perpétuellement
larmoyante, aux corsages ténébreux fermés sous les vieux tendons,
les flasques replis de vielle peau, par le même camée ovale où se
détachait sur un fond parme comme une blancheur de linceul ou
d'ossements la draperie flottante, ectoplasmique et mousseuse de
quelque tambourinaire pompéienne et qu'elle semblait porter par une
sorte de fidélité comme une relique profane transmise de génération
en génération depuis peut-être avant l'Empire, suspendant
paradoxalement en place de la traditionnelle croix de grenats aux
cous flétris de successives aïeules l'équivoque et éolienne
évocation d'hétaïres ou de danseuses aux corps à peine voilés et
gravés en taille douce…)
S'imposaient ensuite
Baudelaire, les tableaux parisiens dans les Fleurs du mal
et...
Il n’était pas
voûté, mais cassé, son échine
Faisant avec sa jambe
un parfait angle droit,
Si bien que son bâton,
parachevant sa mine,
Lui donnait la tournure
et le pas maladroit
D’un quadrupède
infirme ou d’un juif à trois pattes.
Dans la neige et la
boue il allait s’empêtrant,
Comme s’il écrasait
des morts sous ses savates,
Hostile à l’univers
plutôt qu’indifférent.
(les sept vieillards)
ou, venant juste à la
suite
Ces monstres disloqués
furent jadis des femmes,
Éponine ou Laïs !
Monstres brisés, bossus
Ou tordus, aimons-les !
ce sont encor des âmes.
Sous des jupons troués
et sous de froids tissus
Ils rampent, flagellés
par les bises iniques,
Frémissant au fracas
roulant des omnibus,
Et serrant sur leur
flanc, ainsi que des reliques,
Un petit sac brodé de
fleurs ou de rébus
(les petites vieilles)
s'imposaient, et en outre
étaient faciles à trouver puisque publiés par publie.net
http://librairie.publie.net/fr/ebook/9782814501508
Il y a aussi, bien sûr,
évidents, le vieil homme et la mer et Miss Havisham dans les
grandes espérances de Dickens.. mais j'avais la flemme de les
chercher, le billet s'allongeait par trop.. vous laisse le soin de
choisir vos petits vieux et petites vieilles, et quand s'est présenté
à ma mémoire, venu je ne sais comment, pas encore vétuste, encore
moins vénérable, mais légèrement chenu, Casagrande en son château
de Quelle, j'ai pris l'Iris de Suse de
Giono au début.. même si je savais qu'il intervenait bien plus tard
dans le récit, et suis tombée, quand Tringlot monte de Toulon vers
la montagne, sur un passage qui tant me plaisait que j'ai entrepris
de le recopier pour http://brigetoun.wordpress.com
et que j'en suis restée là.
Si
m'avez suivie, soufflez, c'est fini.
9 commentaires:
MERCI !!!
Et bon Noël à vous chère Brigitte :-)
et grand merci à vous
pour ces voeux, votre passage et vos billets lumineux
quels beaux santons ainsi que les textes qui les accompagnent, c'est un monde parallèle que vous nous ouvrez. Belle journée à vous Brigitte.
merci - pour vous et les vôtres aussi
C'est très beau
Beau et bon Noël à vous
En fait, vous avez fait une sorte de film d'animation...
Joyeux Noël en compagnie de ce "petit peuple" tout pacifique !
grand merci à vous
suis femme à côté des traditions et donc amoureuse d'elles (un peu, quand choisis)
c'est vraiment très chouette à contempler tout ce petit peuple !!
Et vos explications jointes ;-)
Je pense à la l'opération dépoussiérage :-)
Bon Noël Brigetoun :-)
Flore
Des santons très honorés de ta plume.
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