M'en suis allée dans le
jeune matin déjà tiède, dans les rues désertes sous la lumière
attendre un tantinet
longuement
avant de prendre livraison
de ma nouvelle bouche, et de commencer l'apprentissage : me faire à
mon sourire un peu trop blanc, un peu trop agressif (je n'ai pas jugé
utile, à mon âge, de chercher un artiste et me suis contenté d'une
mutuelle, de soins aimables, efficaces, sans nombreux essayages et
philosophie sur l'harmonie de mon pauvre vieux visage), retour
presque dansant parce que l'été était sur la ville pour un ou
plusieurs jours, en morigénant ma bouche qui renâclait à accepter
sa nouvelle parure
(les selfies sont redoutables pour la peau des vieillards, mais tant pis)
tenté d'acclimater mon
sourire, de lui rendre un peu de son charme irrésistible (euh)... me reste à rapprendre à parler, mordre, manger et fumer...
(désolée.. mais c'était vraiment l'événement phare de cette
journée, et l'horizon de ce mois et de mon budget)
Une bonne partie de
l'après-midi contre le mur de la cour, en ayant délicieusement
chaud, en renouant avec mes souvenirs de Fictions du corps de
François Bon avec les beaux lavis de Philippe Cognée.
Et puis départ le soir
vers le théâtre du Chêne noir pour le spectacle que m'étais
offert parmi ceux des Nuits Flamencas (bien d'autres qui me tentent...
au moins ceux en entrée libre et puis peut-être, si je suis sage,
m'en offrir un ou deux autres, on verra) : le récital de Rocio
Marquez (de Huelva) accompagnée par la guitare de Miguel-Angel
Cortez et les percussions d'Augustin Diassera.
J'étais pleine d'espoir,
me demandant si j'apprécierai – dans le cas contraire n'en aurait
retenu blâme ni pour elle ni pour moi, juste regretté cette non
rencontre – la qualité de son chant, consacré par des prix de
plusieurs festivals (en 2008, au Festival internaccional del Cante de
la Minas à la Union : la Lampara minera (sais pas ce que c'est, mais
ça semble important) et quatre autres grands prix ce qui est
exceptionnel, réussi une seule fois avant elle, par Miguel Poveda),
par sa nomination aux Latin Grammy Awards de Los Angeles en 2015...
etc..
Des cheveux blonds sur une
épaule, un long fuseau rouge à grand décolleté bénitier, un
sourire piquant, une immobilité calme se tendant peu à peu pour que
jaillisse le chant et cette voix très claire et souple, capable
d'une puissance venue des profondeurs...
Un programme d'airs divers
dont serais bien incapable de citer un titre, un torrent avec des
bifurcations.
Un coup d'oeil dans le
foyer à quelques unes des projections de photos de Vanesa Gilles
(une exposition que j'avais aimé, l'année dernière, au Centre
Européen de Poésie)
Et m'en suis revenue
bercée par le souvenir de ce que j'avais écouté.
De ce que j'ai entendu, de
ce que j'ai lu pour m'aider à préciser ma sensation : chanteuse non
gitane mais experte dans tous les modes du chant andalou, chantant
des airs traditionnels, des chants de ses prédécesseurs ou de sa
composition, ayant appris en écoutant les plus grands mais
novatrice... un flamenco enraciné mais personnel et contemporain, un
chant intense mais une voix claire, un chant modulé mais sobre,
l'impression d'une beauté directe et dépouillée.
Pour donner une idée de
la cantaora, trois des vidéos regardées/écoutées dans l'après
midi pour conforter mon envie de l'entendre..
4 commentaires:
La musique peut donc faire sourire ou rire (Satie), elle s'apprécie aussi avec la bouche...
la musique s'apprécie avec tout
Toujours eu du mal avec cette musique!!!! Ne sais pas épidermique ....
je crois que rien n'est plus personnel que la musique
pas mal de musiques célébrées que je n'aime guère (n'ose pas les mentionner, me contente de les éviter)
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