Après près d'une heure
passée à s'énerver à l'écoute de la réponse enregistrée de la
billetterie du festival, suivie régulièrement de brusque coupure,
réaliser que, mon billet à rembourser a été acheté à la Fnac et
que je suis en retard pour le concert prévu. Mini galopade, la
distance étant courte, jusqu'à Saint Agricol,
arrivée un peu en
avance d'une Brigetoun en désordre léger qui s'installe, seule dans
le bas côté, près du choeur... l'église étant d'ailleurs fort
peu rempli.
Pourtant un beau moment,
comme souvent dans les manifestations du Cycle de musiques sacrées
annexé au festival, ce concert qui entrait d'ailleurs d'assez loin
(peut-être par les petites interventions de l'orgue, assez planant
au début) dans le domaine du sacré.
Deux longs et très beaux
poèmes de Sony Labou Tansi (ne connaissais pas sa poésie, vais me
mettre en chasse de son édition par le CNRS dans la collection
Planète libre) dits par Céline Chéenne avec ce qu'il fallait
parfois de véhémence, à la limite de l'insulte, ou de réflexion,
accompagnée par Luc Antonini à l'orgue, par Pascal Contet à
l'accordéon (un très beau moment où il donne à son instrument
une violence presque insoutenable. Les titres des poèmes sont assez
peu indicatifs Les Machins et
Le Poème des Elus, et
bien entendu suis incapable de relire les quelques vers épars notés
à la vollée, emportée par l'écoute de ces poèmes splendides de
langue, de rythme, de construction, de colère...
retour
dans une absence de lumière, sous un ciel blafard... cuisine rapide
et
départ dans la lumière et une chaleur forte sans excès, en
galopant, vers la Fnac, bien ennuyée parce que j'avais perdu le reçu
de l'achat du nouvel obturateur, ce qui n'a pas fait de problème (et
en fait je l'ai retrouvé ce soir, rangé soigneusement à un endroit
improbable)... comme j'avais l'air tendu et pressé, mon
remboursement a pris le pas sur les malheureux qui attendaient
d'acheter des billets, jubilais avec toute la confusion d'usage,
et
me suis retrouvé dans la rue avec presque une demie-heure d'avance
sur mon programme, temps consacré à un très bon café dans l'une
des brasseries du cours Jean Jaurès où n'avais jamais eu l'idée de
poser un orteil,
puisque n'avais pas le temps d'assister au dialogue
artistes-spectateurs au cloître, à propos des Parisiens (ce qui aurait eu un
intérêt très distancié puisque j'ai été prise de flemme et que
j'ai donné mon billet)
attente en fuyant le plein soleil pour prendre un bus vers le Gymnase Giéra
(ai fait une fois le trajet à pied avant que les ombres s'installent
commodément sur la route, ne le ferai plus)
et
une attente en nombreuse compagnie à l'ombre de la magnifique rangée
d'arbres puis dans l'entassement du petit hall pour voir (regrettais
fortement de n'avoir trouvé place dans mon emploi du temps que pour
l'un de leur deux spectacles) Memories
of Sarajevo, le
second volet de la trilogie du Birgit Ensemble, Julie Bertin, Jade
Herbulot et les amis issus du Conservatoire qu'elles ont regroupées
autour d'elles) (le troisième dans les
ruines d'Athènes est
le spectacle que ne verrai pas, pas plus que n'ai vu le numéro un
Berliner Mauer : vestiges)
dont on dit et redit le plus grand bien et qui me tentait beaucoup.
Spectacle
admirable d'intelligence et de didactisme distancié, point trop
pesant, présenté ainsi sur le site du festival (d'où viennent les deux photos de Christophe Raynaud de Lage)
Le début du siège de
Sarajevo commence en 1992, deux mois après la signature du traité
de Maastricht qui transforme la Communauté européenne en Union
européenne. Ce pacte, sa transformation, ses conséquences ou dégâts
ne laisseront personne indifférent. En regard des décisions et
indécisions des grandes institutions, d'une histoire que peu
maîtrisent, Memories of Sarajevo se veut une fresque historique où
la parole des assiégés résonne. De bibliothèques en archives, de
témoignages et d'imprégnation dans cette ville-cuvette où, des
collines, il est si facile d'abattre, les metteuses en scène Julie
Bertin et Jade Herbulot n'ont eu de cesse de répondre à cette
question «Comment embrasser cette histoire qui n'est pas tout à
fait la nôtre en la transformant en récit ?». Sur scène, une
façade d'immeuble et dans la rue, des habitants. Au-dessus d'eux,
les dirigeants européens et internationaux se réunissent sans
parvenir à trouver une solution.
Alors
pour Brigetoun, d'abord cet étonnement, qui me rappelle chaque fois
mon âge, de réaliser que pour cette génération, ces moments
qu'avons vécu à distance, mais avec une révolte et un désarroi
constant (d'autant que je côtoyais quotidiennement
une serbe, compagne d'un croate - et malheureuse, mais ce n'était pas si simple, de ce qui se passait
et qui faisait la liaison avec une fermeté amicale entre moi et les
gardiennes yougoslaves de toutes origines, ce qui ajoutait une touche
aux informations qui nous parvenaient), relèvent d'une histoire
ancienne, un peu oubliée, qui sert à expliquer en partie l'état de
notre Europe. Et puis une admiration pour la justesse de leur rapide
rappel (mais justement comment rendre vraiment palpable en deux
heures vingt cinq cette émotion, ce qui d'autre part aurait nui,
comme pour nous à l'époque la claire vision de l'incapacité des
dirigeants européens à s'entendre (je l'avais mais secondairement).
Un très beau travail de documentation et mise en vie (une outrance
caricaturale et jubilatoire de la réunion de consécration de l'UE),
une vraie troupe.
Un
beau spectacle qui d'ailleurs, d'après ce que j'entendais et
j'échangeais parfois, surtout avec mes contemporains, en sortant et
cheminant vers la ville dans la tiédeur du début de soirée,
suscite l'intérêt, la discussion, mais peut-être pas un spectacle
aussi admirable qu'on le dit.
Plaisir
du retour à pied, étonnement et plaisir de trouver Carrefour encore ouvert
ce qui m'a permis d'acheter un filet de patates, parce que pas
certaine d'en avoir assez pour tenir jusqu'à jeudi ou mieux
vendredi, et parce que c'était un excellent moyen de m'en tenir à
ma décision de regagner l'antre et de mettre fin à cette journée.
(demain
3 heures 45 dans l'horrible clim d'Aubanel et après-demain 5 heures
45 au Parc des expositions avant les deux bien plus longs spectacles
dans les derniers jours, dont un que j'écourterai, tant pis, pour
profiter de mon billet pour les Carmes)
7 commentaires:
Où est le cloître des Parisiens ???
nulle part (merci de me le signaler) ls n'ont pas encore pris le dessus du Cloître Saint Louis (c'est mon remords pour mon renoncement qui parlait ?) Je corrige
Quand la jeunesse vous sourit, tout va... et vous trouble.
le Birgit ensemble, c'étaient les spectacles que j'aurais vus volontiers, si...
Caroline j'ai l'impression qu'il y a eu rarement autant d'impasses nécessaires que cette année, même si on a la chance de pouvoir encore y consacrer moyens... et fais l'impasse sur BenoitXII, rue Taubira, sur les débats et les expositions et n'irai que très très peu dans le off (vrai que suis pas très résistante en plus... là je peux pas plus et il m'arrive d'avoir des "absences" dans les spectacles
le "Birgit Ensemble" serait un titre ad hoc pour vos aperçus et ressentis du festival d'Avignon.
J'admire votre résistance ("résilience" diraient certains...) et votre ténacité. Mais modérez aussi vos pas !
Doùminique, je fais énormément d'impasses... et me sens un peu coupable
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