ciel que je voyais haut et
blanc au dessus de la cour, un regard torve sur le sac à linge en
matière ingrate et d'un violet désagréable – si, ça existe –
fourni par le blanchisseur, nécessaire parce que les draps et
housses de couette en attente depuis des jours sont trop lourds et
encombrants pour le vieux sac en pachwork bien usé, bien fatigué
mais tant aimé et tant à mon échelle – vitamines en cachet, et
un peu de magnésium...je passe mon bras dans l'anse, le lève parce
que suis trop petite, trébuche parce que ce sacré truc est aussi
large que moi et se met en travers, franchis la porte
la surprise
délicieuse de découvrir que le blanc du ciel n'était que voile
léger qui se retire peu à peu au dessus de mes pas, laissant la
lumière jouer avec les façades.
J'ai fini par découvrir
que le meilleur moyen est le sac de linge sur mon épaule gauche, le
sac-qui-porte-ma-vie sur l'épaule droite, le bras gauche coinçant
le sac de gauche pour aller retenir sur l'épaule droite la
bandoulière du sac-qui-etc... un sourire coloré de rose mat sur mes
lèvres et qu'ainsi j'avance sur mes pieds aux formes étranges,
soutenue par les sourires que je provoque chez les bienveillants...
voir en passant devant la
mairie l'annonce d'une exposition (qui a été inaugurée le 6) et
comme si carcasse veut, si désir se maintient, projet est fait
d'aller la découvrir (sans oublier la collection Lambert, surtout
sans continuer à ignorer...) tant pis, je solde sans attendre ma
visite de samedi,
en partant de la salle
obscure dans laquelle sont exposées (depuis avril 2017, mais ne
l'avais pas vue) des oeuvres de Botticelli, accompagnées de grands
panneaux explicatifs auxquels n'ai pas accordé qu'une attention
distraite (aidée partiellement aujourd'hui de photos partielles
prises à la volée, plus occupée que j'étais par la contemplation
des oeuvres) avec, grâce au dépôt par le Louvre depuis l'ouverture
du musée pour abriter notamment la collection du marquis Campana
dont elle faisait partie, de la belle, charmante (le bouilloné et la
transparence du voile, le visage pensif, occupé uniquement de son
geste pour sortir un sein pour allaiter l'enfant potelé qui lève
vers elle un regard d'attente confiante) Vierge à l'enfant à
mi-corps devant une arcade ouverte sur un fin paysage selon les
nouveaux canons, vêtue de rouge et bleu comme il se doit, qui est notre
tableau phare, d'abord attribué à Filippino Lippi, vierge plus
souple et douce pourtant que les oeuvres de ce dernier, rendue à
Botticelli par Berenson, attribution qui fait maintenant loi.
comme ma photo est de
piètre qualité je la double d'une reproduction trouvée sur le site
du Musée (n'avais pas pensé ces jours-ci à aller y voir)
tableau rejoint récemment
par la Vénus aux trois putti (au long visage un peu bovin, allongée
dans un paysage caressée plus que voilée par une chemise très fine, transparente,
jambes masquées par un manteau en laque route qui est un pudique
repeint ancien, selon ce que je déchiffre sur ma photo de panneau,
incomplète, maquillage comme le sont les guirlandes de lierre cachant les
petits sexes des putti, repeints qui ont peut-être été exécutés
dès la réforme-révolution de Savonarole, auquel cas – ça c'est
moi qui m'interroge – ils pourraient être de la main du peintre ou
de son atelier) tableau (peinture à tempera sur trois planches de
peuplier à fil horizontal) provenant également de la collection
Campana et restauré au Louvre en 2007 ce qui a permis de découvrir
outre les repeints le dessin au pinceau sous-jacent)
Ils sont accompagnés de
deux versions, par l'atelier, d'une madone, et, oeuvre d'atelier
également, de ce long panneau délicat, suave, comme l'est
la campagne tranquille sur lesquels les personnages se découpent, le
«nolli me tangere»
Ai parcouru un peu plus
rapidement la suite de l'étage, sans garder d'image (tableaux trop
grands, reflets etc... et lassitude un poco) si ce n'est deux détails
cet ange vêtu de toiles
animées d'une annonciation attribuée à Bartolomeo della Gatta
(Florence 1448 – 1502)
et puis le visage de ce
bel ange qui annonce comme une confidence à la vierge le secret qui
l'attend sur une annonciation avec saint Jean-Baptiste, saint Antoine
et sainte Catherine (est ce la raison de cette confidence) de Cosimo
Rosselli (Florence 1439-1507)
avant de descendre vers le
cloître-patio
et de continuer, restant
dans la première renaissance, par la salle qui s'ouvre sous les
arcades, à côté de la porte ouvragée de l'escalier, et qui me
rappelle les quelques concerts de musique contemporaine que j'ai pu y
écouter, rassérénée dans mon manque, pendant mes deux premières
années d'Avignon avant qu'ils prennent fin, d'où j'ai ramené ce
détail (vierge protégeant et caressant le baptiste enfant) de la
vierge à l'enfant avec le petit Jean et une sainte d'un florentin,
«Tommaso» dit aussi Maître de la Madone Czartioryski ou Maître du
retable de Santo Spirito dit le cartouche
et, se détachant sur un
ciel suave peuplé d'anges sans corps, une vierge à l'enfant entre
saint Jean Baptiste et saint François d'Assise de Giovanni Battista
Cima da Conegliano (Vénétie 1459 ou 60 – 1517 ou 18)
pour finir avec un tableau
qui n'est pas ce que je préfère de lui (enfin relativement, préfère
les tableaux profanes) la Sainte Conversation de Carpaccio (Venise
bien entendu) dans un paysage très construit à la perspective
maintenant savante, qui me donne une sensation de fouillis un peu
oppressant, mais dont chaque détail est charmant.
A quoi, j'ajoute, puisque
les ai, des images de ma sortie dans la gloire de l'après-midi
finissant.
11 commentaires:
Joli le grain de votre bitume. Ce blond roussi de Botiche est à se désespérer d'être athée. Ça tue le rêve d'être athée. Oui, carcasse cèdera devant volonté, volonté devant nécessité. Venise : Carpaccio ou Bellini?
Œuvres peintes à plusieurs mains, on dirait. Et enfin les paysages.
Botticelli a peut-être inventé le panoramique du cinéma... mon tableau préféré ici !
La vierge si douce qu'une amie à dessine avec talent pour moi et le mouvement gracieux des voiles de l'ange. .un régal y suis retournée plusieurs fois Merci pour tes savoureux commentaires
casabotha plutôt Bellini, en attentant le Tintoret et Titien et puis, tiens Véronèse ...
Claudine la présence des ateliers toujours
Dominique, c'est le tableau phare du Musée (notre Joconde, sourire)
Arlette moi j'ai une faiblesse pour le friselis du voile sur l'épaule
que de merveilles jusqu'à tes photos du dehors, presque des abstractions de lumière... merci!
pendant qu'on en avait une franche… c'est plus douteux ces jours ci
Belle récompense les oeuvres de Boticelli, après le transport du sac à linge récalcitrant.
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