commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

lundi, février 11, 2019

En rester à une idée de l'écriture

réveil excessivement tardif, activité qui tentait d'être à la fois efficace et rapide, ce qui était, me concernant, deux impossibilités
le bleu filtrant son sourire à travers l'étendue blanche des premières heures au dessus de ma cour a perdu son pouvoir et ce fut une journée sans lumière, comme se réservant, retenant avant la pluie
lu quelques pages, promenade enchantée, bigarrure de voix qui devenaient toutes voix de Christine Jeanney, de la langue de la girafe https://t.co/WzmMJHQqaf qui le sont devenues plus encore lorsque je l'ai écoutée https://soundcloud.com/cestabrupt/la-langue-de-la-girafe-c-jeanney
écouté la lecture par François Bon de sa traduction de la chose sur le seuil de Lovecraft https://youtu.be/f_pybGPPWdA
rêvé en me promenant dans les petits ports après Gênes sur google.street.view en écoutant de modernes griots
et lu les 28 (je crois, il faudrait que je recompte) dernières contributions à l'atelier du tiers.livre en 4000 mots – recherches sur la nouvelle avec quelques moments de telle admiration que m'auraient dissuadés si je n'avais pris les devants, signe que je suis moins détachée que le prétends http://www.tierslivre.net/revue/spip.php?rubrique17
et ma foi, n'ai guère fait davantage, alors je reprends ma réponse à la proposition 7 de François Bon sur https://youtu.be/-hhNEr1w9zA

Les yeux sur les poutres du plafond, sur la légère ombre que pose la poussière sur l'arrondi au contact des lattes, sur une entaille laissée par l'outil du charpentier, sur un éclat dans la peinture lasse, me demander d'où sont venus, avec l'âge, ce rite, ce risque : écrire, et comme c'est ce que prétends d'ordinaire avec une certaine dose de sincérité, pointe vaguement l'idée que c'est une façon de marquer la course des jours, une tentative d'ancrage dans le réel, fut-il parfois assez éloigné de la réalité, le soupçon souriant que je renoue avec la fillette qui, sous les muriers de l'avenue, là où nous attendions un car scolaire, infligeait chaque matin à ses petites soeurs, un nouveau fragment improvisé d'une histoire – me souviens d'un oiseleur – ou qui, le soir, remplissait un cahier moins secret qu'elle ne l'imaginait de phrases, de petites histoires, qui se voulaient osées. Pour cela ou non, timidement, me défendant soigneusement d'y mettre un enjeu, avec un plaisir qui devient nécessité, je suis entrée dans un monde où l'écriture se fait besoin – me reste pourtant de ma vie d'antan l'impératif, presque toujours respecté, de ne jamais effleurer mes petits démons cruels, qu'importe si je reste dans une aimable médiocrité, compte le plaisir des mots, de leur mise en ordre, d'une petite musique puisque suis réellement inapte à en produire une autre. Ce m'est soutien, médicament... Seulement, comme ne suis pas un écrivain, et parce que l'organisation, le sérieux, ont bien trop enserrés mes jours pour que je ne tente pas maintenant de les éviter, ne le pouvant pas vraiment parce que l'habitude est une bête indomptable, je n'ai pas de véritable rite. Il y a ces moments entre deux réveils, la délicieuse somnolence entre l'aube et le saut dans le jour, où viennent des idées, des mots, des syllabes à compter pour que demeure l'impair, le sentiment que tout est clair, quand s'énoncent des phrases, des poèmes qui, si je n'ai pas sauté hors des draps pour gribouiller une ébauche sur un carnet, s'effaceront dès que je reposerai un pied sur les carreaux de terre cuite, que j'aurai poussé les volets bleus, levé les yeux vers le soleil, bu le reste du café de la veille... Il y a l'eau de la douche qui emporte les soucis, les petites douleurs de l'entrée dans la quotidienneté et ces moments où la pomme et le gant, immobiles, laissent couler sur moi une eau accompagnée d'une formule, d'une phrase que je tente de figer, que je me remémore en m'habillant, m'interrompant pour les écrire si elle résiste. Il y a surtout la marche, mes yeux qui flottent sur les pierres familières, la lumière, leur amitié ou leur mutuelle ignorance, les êtres rencontrés qu'il n'est pas d'usage de scruter et qui laissent une trace pleine de possibilités dans un coin de la mémoire, un poème qui vient, que je note sur le minuscule carnet extrait de la profondeur de mon sac, si petit qu'une page ne contient qu'une dizaine de mots. Il y a les jours où l'été descend dans ma cour sans être encore morsure douloureuse, où adossée aux pierres, les paupières fermées sur de mouvantes lueurs violettes, je tente de décrypter les images et idées qui tournoient lentement sous mon front que le soleil repasse, avant de faire un pas et de me pencher sur la table bouffée par les orages, le carnet expédia ou, en son absence, les pages de garde du livre abandonné, et noter avec le crayon, le stylo bille, l'outil qui git à côté – outil objet de hasard, quel qu'il soit à condition d'être lisse, sans facettes – et d'inscrire quelques mots que j'aurais du mal à relire, comme les notes prises dans le noir pendant un spectacle, supports avec lesquels ma mémoire jouera éventuellement si je décide d'en tirer parti. Il y a les jours vides où je choisis une image, la fixe jusqu'à ce qu'en jaillisse ou suinte quelque chose qui, vaille que vaille, deviendra petit billet. Il y a le principal, quelle que soit l'heure où je le décide – si possible quand je crois disposer d'une longue plage de temps – : ma chaise, qui devrait aller chez un rempailleur et le coussin brodé qui la protège, le contact contre la base de mes paumes de l'acajou de la table-bureau héritée de mon grand-père, pendant que les doigts dansent – un peu trop, je dois les faire revenir en arrière pour corriger les fautes de frappe – sur le clavier de l'ordinateur, le carnet posé à côté, dont je recopie scrupuleusement les mots ou que je dédaigne pour broder à partir de ce dont je me souviens, l'écran sur lequel un fichier qui se garnit peu à peu, cache presque complètement le dernier texte lu.

10 commentaires:

casabotha a dit…

j'aime bien la deuxième photo découpée en 4, personnellement ça me donne envie de vous prendre dans mes bras

Brigetoun a dit…

c'est gentil (en fait ce sont quatre photos plus ou moins éloignées dans le temps)

Claudine a dit…

beau texte. je dirais "pareil" pour les couleurs si je savais écrire. un ami commun disait "tendre les mains" pour recueillir les mots

Brigetoun a dit…

Claudine mais parmi "les petits jeunes" ou plus jeunes il y a des choses bien plus abouties

arlette a dit…

Beau travail Merci du partage cela rend meilleur de lire ainsi "bellement" comme tu dis souvent

Brigetoun a dit…

oh on lit tout aussi bellement sur tiers livre (et il y a là des textes bien meilleurs)

jeandler a dit…

"Les yeux sur les poutres du plafond". Seraient-elles en attente de mots de sagesse ?

Brigetoun a dit…

même si le plafond n'est pas très haut elles sont mon lointain

Dominique Hasselmann a dit…

Vous écrivez à la main avant de vous mettre au clavier ? :-)

Brigetoun a dit…

je note les idées qui me viennent quand je pense qu'elles vont fuir avec l'action dans laquelle suis, et puis je me base sur elles ou parfois sur la piste qu'elles me suggèrent (comme tout le monde, non , surtout si mémoire aussi fuyante que la mienne)
et puis parfois je suis loin de mon ordinateur, ou d'autres fois je m'en éloigne pour ne pas être tentée de m'interrompre pour lire un peu n'importe quoi et tenter de trouver un espace de temps vide
chacun ses manies