en milieu d'après-midi,
pensant le mistral un peu fatigué, suis sortie avec papiers et
verres pour les remparts et cinq cents grammes de pulpe de tomate,
une dizaine de racines de gingembre début d'une charge à laquelle
pensait ajouter quatre kilos de petits pois en boites pour la rue
Pasteur (une grosse demi-heure de marche). Le vent m'a cueilli à la
porte, me suis accrochée trois minutes à la poignée, ai fait
quelques pas, me suis accrochée à une descente d'eau, ai repris
avancée, trébuchant dans un brusque calme... bon j'ai jeté ce qui
devait l'être et suis rentrée chez moi, mes sacrées mauvaises
jambes hurlant de crispation... J'espère un léger essouflement
demain (de toutes façons il faut que j'aille, à jeun, place Pie...
les provisions – bien plus que cela mais ne puis davantage charrier
– n'étant nécessaires que pour une fête en fin de semaine, avant
que l'évéché décide l'expulsion).
Ai écrit un peu plus des
quatre cents mots sur les quatre mille demandés pour le 10, le grand
final de l'atelier d'hiver, les ai jeté, et pense que vais
renoncer... ai regardé d'un oeil torve deux photos et aucune des
vagues idées qu'elles avaient éveillé pour les cosaques des
frontières n'est venue se dessinner à traits fermes.. ai lu et, que
les cosaques me pardonnent http://lescosaquesdesfrontieres.com
je recopie un petit texte écrit à Toulon qu'ils ont publié il y a
quelque temps
Un prétendant
Ce serait un royaume que
l'on ne devinerait pas, un royaume marin bordé par ce qu'on nomme la
côte d'azur, un petit royaume sous-marin sur lequel régnerait un
très sage et très vieux mérou, si sage, si vieux surtout, revenu
de toutes illusions, en deuil de ses fils préférés tués dans
leurs repaires par des êtres cruels venus de terre avec leurs
fausses nageoires aux pieds et leurs harpons au déclenchement
imprévisible, si navré que sa lippe se serait accentuée, serait
descendue, tordue, jusqu'à se transformer en un cercle semblant
siffler le désastre que subissait son monde.
Serait venu de mers
lointaines et inconnues un poisson de race indéterminable, un frère
poisson étrange, aussi gros, long et gras qu'un mérou mais vif
comme une sardine, ondulant prestement, nageant rapidement d'un
rocher à l'autre, scintillant avec la rapidité de la lumière au
dessus des prairies d'algues, traversant vivement le royaume d'une de
ses limites à l'autre, dont le roi aurait fait son messager, puis,
peu à peu, son second, quelque chose comme un premier ministre si
cela était possible dans un régime de royauté absolue, un poisson
étranger qui, fort de l'autorité ainsi déférée, aurait
outrepassé ses missions, gardé pour lui des informations dans le
but, au début, de ménager le vieillard, et qui, insensiblement,
aurait pris sur lui de corriger – ou plutôt de modifier – les
décisions de son maître, persuadé, ou décidant de l'être, de la
sénélité grandissante de ce dernier, de son incapacité à
concervoir les changements nécessaires, et, bon gré, mal gré, les
barons, les chefs de familles, depuis les loups, les congres, les
rascasses, jusqu'aux gobies crapotant dans la vase, auraient admis
son rôle de favori, de futur héritier, de seigneur.
Le vieux mérou s'en
allant vers sa fin, si immobile que les molusques, le prenant pour
une roche, tenteraient de s'y fixer, de l'encrouter, le rigidifiant
encore jusqu'à en faire une statue, mi-poisson, mi-Nérée, son
second, pour asseoir sa suprématie, se donner mine de chef, se
serait, usant de toutes les sécrétions, les teintures que pouvaient
lui fournir coquillages, seiches ou herbes, maquillé, dessinant
d'étranges formes sur ses écailles peintes de rouge, de vert, de
jaune, traversées d'épais traits noirs, en une parure aussi riche
que celle, dans les anciens royaumes terriens, d'un empereur
bysantin, comparaison que, bien entendu, ceux dont il voudrait faire
ses sujets auraient été bien incapables de faire mais qui,
inconsciemment, provoquerait en eux, habitués à la bonhommie de
leur roi légitime comme de ses prédécesseurs, une révolte, un
désir de liberté, une fierté qui, la mort du mérou ayant été
dûment constatée, lorsque l'étranger s'avancerait pour être
consacré comme son successeur, déclencheraient une révolution, une
succession de combats violents entre ses affidés et les républicains
en devenir jusqu'à ce qu'il de trouve expulsé du royaume marin,
projeté sur les galets d'une plage, haletant, expirant, pendant que
les sucs, encres, matières dont il s'était enduit, se
solidifieraient, le maintenant en son entier, transformé en un
symbole d'outrecuidant mauvais goût.
9 commentaires:
« L'évéché » ?
« L'expulsion » ?
Qu'es acó ?
carcasse rétive ou pas ne lâchez rien au renoncement la vie tient à vous
Michel le 7 rue Pasteur (théâtre en juillet) qui a été réquisitionné pour des familles et jeunes immigrés est à l'évêché - et il a fait savoir que la tolérance ne 'étendrait que jusqu'à l'été.. je ne sais pas où ils en sont sauf qu'il y a une fête toute la journée le 30, que je n'y serai sans doute pas mais que j'ai promis d'apporter quelques bricoles sur une liste pour les cuisiniers… et que j'ai pas trop la force (sourire)
casabotha et le vent est sur nous
Beau poisson, dont je me souviens, échoué mais vivant... :-)
Dominique, un rien minéral tout de même
Dommage pour les quatre cents mots jetés...
Courage à carcasse...le beau temps arrive..
Moi je l'aime bien ce "mérou" en couleurs.
Souvenir ému de ce mérou ..."de mauvais goût" tout fringuant comme ton texte
Le mistral secouait fort le cyprès il me semble, il en est tout chaviré
pas seulement le cyprès… et même ce soir où le croyais calmé je pense que c'est lui qui a stoppé ma connexion deux fois… et j'ai peur que ça recommence...
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