Chance d'avoir mal calculé
mon temps, d'être déposée avec une demi-heure d'avance devant une
église à Meudon qui n'est pas celle où avait lieu l'enterrement,
et d'avoir juste le temps de descendre retrouver l'assemblée, la
famille, un peu perdue de vue ou familière... beauté d'un texte
écrit par un fils, dit par un de ses frères, retrouver par delà
les différences l'union tendre d'une fratrie, collation dans un
jardin qui arrive sur quelques mètres carrées à unir confort et
légère sauvagerie, comme un jardin de campagne parachuté au bas
d'un petit immeuble qu'on oublie, échanges de tendresses, de
tristesses parées de sourire, de pointes d'esprit sans blessures,
et puis dans la voiture de
petite soeur et son mari rejoindre leur nouvel appartement au Pecq,
plaisir de la voir dans cette ambiance qui lui convient mieux que le
faubourg de Saint Germain en Laye dont la lente dégradation la faisait
souffrir, trouver l'harmonie qu'ils savent créer, et, à ma grande
confusion, au lieu d'une visite à Rueil, voir arriver (en voiture
mais tout de même) la malade aimée portant son soin pour une petite
heure de conversation animée à quatre, l'humour, l'animation qui se
soutient, sans effort apparent, avec le déchirement du regard dans
les pauses, et l'admiration pour elle….
Et puis sur le balcon,
regardant de loin, sur le côté, la terrasse de Saint Germain,
reprendre pour le 4 de l'atelier d'été de François Bon
l'évocation, préparée en marchant le 30, commencée dans le train,
d'une terrasse beaucoup plus petite et secrète du moins pour moi.
Le lendemain matin,
puisqu'elle avait pris pour nous deux jours de vacances, monter en
soeurs vers le marché de Saint Germain, parce que cela reste Sa
ville et puisque le coin du Pecq où elle s'est installée est tout
proche, bâti sur une partie de ce qui fut les deux dernières
terrasses du parc d'origine. Avec le même plaisir, les plaisanteries
avec commerçants, choix de fleurs, légumes etc... sa façon de
créer avec ses moyens limités, une jolie fête sur son balcon pour
un dîner d'amis...
Mais il m'a fallu tirer un
peu sur mes jambes, en m'aspergeant parfois, pour suivre celles de
mon beau frère soucieux de me faire découvrir sur le chemin du RER,
la rampe des grottes, la montée vers le Pavillon Henri IV, le parc,
la terrasse – elle je la connaissais déjà bien entendu – et
suis désolée de l'avoir un peu déçu parce que ma très réelle
admiration, mon plaisir intellectuel et visuel, étaient un rien
cachés derrière mon essoufflement et ma recherche obstinée des
parcelles d'ombre.
Avais un peu plus d'une heure
d'avance -- tournicoter dans la gare, regarder avec absence deux
enfants et un baby foot, savourer lentement un chocolat, et en perdre
le bienfait en fumant les troisième et quatrième bouffées du jour,
et puis trajet sans problème, sauf, en me levant, une chute en me
prenant les pieds dans le fil oublié du téléphone de ma voisine,
freinée ne sais comment (j'étais si crevée que n'ai pas su décrire
exactement de quoi était fait ce moment de pagaille) – taxi,
défaire sac, saluer cour, sortir pâtes et moules dé-coquillées pour préparer dîner, et en faisant lessive du petit linge voir soudain mon avant bras et
l'énorme (vraiment énorme) bosse qui a fait doubler de volume sa
partie haute, rire d'étonnement, et puis m'inquiéter, avoir mal
mais pas tant, bouger doigts lentement et constater que c'est sans
problème, plonger bras dans l'eau froide sans succès apparent, me
dire je ne peux rester ainsi, je ne comprends pas, me dire aussi on
ne va pas pour un rien aux urgences, téléphoner à Médecins sans
frontière et sur le conseil de la secrétaire prendre mon second
taxi vers leur siège au Pontet.... attendre un peu plus de deux
heures pendant que mon bras augmente encore un peu, salué par les
pronostics des attendants, avec un petit monde gentil, débraillé,
plus ou moins souffrant, voir une doctoresse un peu effarée par la
taille du truc, arrivant tout de même à force de le manier par me
faire grimacer sérieusement et m'envoyant aux urgences – en me
disant vous auriez du y aller tout de suite – avec une lettre...
nouveau taxi (qui savait ce qui m'arrivait, nous n'avons pas de
secrets, sourire), nouvelle attente, courtoisie efficace et rapide, et fraternité des patients à une exception près, radio, nouvelle attente dans une
chambre avec une jeune grand mère qui finalement s'était fait une
belle entorse et cassé un orteil grâce à la petite voiture mal
rangée de son petit fils…
et un peu avant quatre heures, alors que
l'enflure commençait à nettement diminuer (là c'est ce qui reste
ce matin, un peu moins de la moitié de ma plus belle extension)
diagnostic, félicitation pour le réflexe eau froide qui a maintenu
ce qu'il fallait de souplesse, et renvoi avec une ordonnance pour
pommade et calmant (quatrième taxi, celui qui s'est fait attendre le plus longuement) vers
l'antre où suis arrivée un peu après quatre heures, pour préparer
dîner, l'avaler (ne pensais plus que : j'en ai marre - en gardant conscience de la médiocrité comique de mes ennuis - et j'ai faim) et
dormir.
Samedi tranquille, réveil
tardif, pharmacien, (presque plus mal mais un besoin de cacher ce
sacré bidule et de le voir se résorber même si très très lentement
maintenant) quelques légumes, un salut à la rose qui n'est pas
complètement morte, recopier mon texte pour l'atelier, le modifier,
le relire ce soir, grimacer un peu et surtout le trouver trop
court... attendre demain.
16 commentaires:
j'aime assez la façon dont vous vivez votre vie
plutôt :dont je veux tenter e vivre ma vie
Au fond tu as eu de la chance .. Et lhumour sauve le reste digne d'un texte pour François Bon Bravo oui !! ta vie est un roman AA
Arlette, euh c'est beaucoup dire, un roman (heureusement)
Ravie de vous revoir en forme, bon dimanche chère Brigitte
Une épopée moins longue que celle d'Ulysse mais pleine de rebondissements et d'aplatissements.
Courage et patience. D'ailleurs le courage n'est-il pas qu'une longue patience ?
j"ai un bras qui a une drôle mais ample forme (sourire)
Impressionnante l'enflure de votre bras qui me fait penser à un mammifère marin. Soulagé que cette mésaventure n'empiète pas sur la verve de votre écriture. Bon dimanche à vous.
Comme une traversée de... la manche.
Vous n'étiez pas "loin de Rueil"... :-)
Et bon rétablissement.
entre autres, Pierre, le courage tranquille de ma malade aimée (finalement n'est ce pas ce qui fait la dignité humaine ?)
Godart, et encore il a très fortement diminué…. se ralentit beaucoup maintenant le dégonflement, et c'est comme une petite vie annexe
Dominique, oui mais honteusement soulagée que Rueil vienne à moi
un grand merci à petite sœur pour le beau portrait sur la terrasse
beaucoup de talents, petite soeur, qui restent cachés sauf pour ses proches
juste un petit coucou de sympathie...
merci
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