Beau ciel et vent frais en
allant aux remparts avant de rentrer pour attendre un plombier (le
débouchage de l'évier cette fois dépasse mes forces et cela dure
depuis vendredi soir) – beaux cernes rouges sous les yeux et une
envie d'attendre la pénombre pour afficher ma face dans la rue
ai entrepris un petit
hommage à mes lectures de novembre, ce qui ne fait pas tant puisque
lis de plus en plus mal ou peu (mais s'ajoutent cinq livres de Jane
Austen relus sur un coup de tête, deux revues d'économie politique
à tenter d'assimiler et des polars délicieusement connus par coeur)
Avec, à vrai dire à
cheval sur octobre, le plaisir bien plus grand qu'attendu des courts
textes de Gustave Geffroy (dont j'avais déjà beaucoup aimé
l'enfermé déjà re-édité
par François Bon auquel je rend grâce pour cette découverte) lisez
ce qu'en dit François Bon qui les re-édite dans sa collection
«grands singuliers» en les rebaptisant il y a toujours à
voir dans les pharmacies reprenant
le titre de l'un d'entre eux
http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article4836
maus c'est plus tôt, au cinquième texte, que le plaisir pour moi
s'est fait plus grand et ne m'a quasiment pas quitté, plaisir du
fond, de la colère et la tendresse, et de la forme avec au
soleil d'automne
Au soleil d'automne,
devant les feuillages rougis, des vieux et des vieilles sont assis
sur la rangée de bancs du jardin public. Ils ne regardent pas le
dernier ciel bleu d'octobre, où errent de beaux et massifs nuages,
pareils à des blocs de marbre, blancs et fauves. Leur contemplation
non plus ne va pas à l'étang où voguent les cygnes de neige et les
canards de velours noir et d'émeraude, ni vers la pelouse brûlée
où de grandes fleurs se convulsent pour mourir...
Avec,
édités, purs et beaux, par Abrüpt
en
bonus, le court double poème d'Arthur Cravan «je suis toutes les
choses – jamais III» https://abrupt.ch/arthur-cravan/jamais/
… Et
tandis que la lune,
Par delà les
marronniers,
Attelle ses lévriers..
pour
les femmes écrasées, cachées par les grands hommes (ouin des
que j'aime) de Corinne Lovera Vitali «Ronette et Modine»
https://abrupt.ch/corinne-lovera-vitali/ronette-et-modine/
je n'arrive pas à
dissocier les photographies de ronin et modet leurs barbes de
hipsters leurs pantalons tendus sur leurs gros bidons où flotte le
sarreau d'artiste-de-son-époque leurs bouches qui tètent
pareillement
un peu
plus long, plus exigeant sans doute, ne se donnant pas d'emblée
puisque recherche.... de Pierre Ménard «Mémoire vive»
https://abrupt.ch/pierre-menard/memoire-vive/
Ecouter sa propre
respiration qui n'est pas vraiment à soi à la fin, au fin fond.
C'est pour annoncer son départ. L'art n'efface pas la perte, il lui
répond. Il est seul, celui qui parle. C'est à peine si on l'entend.
Autant de chances de rendre à jamais présent ce qui paraît perdu.
Par quel trouble suis-je emporté loin de moi ?
Relire
tant et tant d'années après que c'est presque une redécouverte ou
en tout cas une nouvelle lecture, avec peut-être, ou j'en ai
l'illusion, une compréhension plus immédiate, les «leçons
américaines» d'Italo Calvino
Quoiqu'il en soit,
toutes les «réalités» et toutes les «fantaisies» ne peuvent
prendre forme que par l'écriture, où extériorité et intériorité,
expérience et imagination, monde et moi apparaissent composés de la
même matière verbale ; les visions polymorphes des yeux et de l'âme
se trouvent contenues dans des lignes uniformes de caractères
minuscules ou majuscules, de points, de virgules, de parenthèses ;
des pages de signes alignés, tassés comme des grains de sable,
représentent le spectacle bariolé du monde sur une surface toujours
pareille et toujours différente, comme les dunes poussées par le
vent du désert.
La
découverte de Mathias Enard poète, une autre forme pour ses thèmes
habituels, avec Dernière communication à la Société
proustienne de Barcelone chez Babel,
Un fado assassin
t'emporte vers la mer
La saudade te prend au
bord de l'onde amère
Laisse s'enfuir la
joie, livre-toi aux chagrins
Il te guide vers le vin
qui est ton seul amer (vraiment
ouvert au hasard)
Et
puis, petit, comme un écrin qui libère un peu de fantaisie, de
l'humour, de l'ironie, et une belle dose de gravité intelligente
«Münri - ou le livre à découper !» de Christine Jeanney chez
Abrüpt encore https://abrupt.ch/c-jeanney/munri/
que vraiment, dans une crise de douce folie, on peut découper
puisqu'il se présente comme une collection de fausses
cartes-postales mais où au verso des collages, à côté des timbres
dessinés, est écrit un texte, et qu'il est hautement recommandé de
les lire à la suite (sans oublier les sentences sur le recto)
Acceptons,
en tant qu'êtres civilisés et bien édu-
qués de ne
rien comprendre.
De ne rien
comprendre au sens de ce qui est noté.
De ne rien
comprendre à l'objectif plus large que
cela vise.
La réussite
est inextricablement liée
à l'accueil
de l'incompréhension.... ce qui
me réconforte, sans que cela se rapporte à Münri.
Enfin,
commencé la nuit de vendredi, négligé samedi parce que je n'avais
envie que de sombrer et plutôt effleuré dans la nuit de dimanche,
suis pas à mon mieux, ce livre qui n'est pas loin d'être ce que je
préfère de Laurent Margantin, le «carnet d'hiver austral» aux
Editions Oeuvres ouvertes
http://oeuvresouvertes.net/spip.php?article4150
… l'homme qui glandouille assis vautré sur sa chaise
bavardant avec le petit serveur barbu corps cambré main appuyée sur
une chaise a une activité mentale qui trouve son expression
parfaitement adéquate à travers le bavardage auquel il se livre
pendant des heures, j'arrivais donc à la conclusion que l'homme qui
glandouille malgré le fait qu'il glandouille avait une activité
sociale supérieure à la mienne proche du néant quand je suis assis
en train de lire à la petite terrasse et que je choisissais
justement d'aller lire à la petite terrasse afin d'avoir une
activité proche ou même égale au néant...
Le
plombier est venu, je me suis laissée à ma grande honte aller à ne
pas me mettre en colère pour la payer par chèque, il m'a eu – y
compris un gros pourboire – mais j'ai un siphon neuf...
et
m'en suis allée marcher dans le noir (je dois aller au théâtre à
Confluence demain... hésite à cause de ma bouille), seulement
une rafale m'a accueillie sur le seuil et lâchement, l'heure de
marche s'est transformé en tour du pâté de maison soit un sept
minutes...
7 commentaires:
La lecture et ses évasions..même de ne pas "tout comprendre" et pensées vers toi pour tes couleurs qu'un bon fond de teint atténuera
Arthur Cravan, la poésie qui boxe... :-)
Arlette, je crains que ça accentue… et puis il y a la forme
Dominique, poésie assortie à mon nez
pour quelqu'un qui lit moins... ouf :)
Merci pour ces extraits de textes et de poésies. Apparemment la réputation des plombiers demeure malheureusement. Préservez-vous.
Claudine, livres très courts et en un mois...
Godart ceci dit il a été rapide, ponctuel et efficace (aimable aussi d'ailleurs) bon sans doute efficace à rebours pour le fisc (et c'es ce que je me reproche)
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